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Jalal Talabani, premier président kurde d’Irak

jeudi 7 avril 2005, par nassim

Elu mercredi par l’Assemblée nationale transitoire, Jalal Talabani, le leader de l’Union patriotique du Kurdistan promet d’œuvrer à la démocratisation.

L’Assemblée nationale transitoire irakienne a élu, mercredi matin, le Kurde Jalal Talabani à la présidence de la République. C’est la première fois, dans l’histoire de l’Irak moderne, qu’un Kurde accède à la magistrature suprême. La communauté kurde, qui représente entre 15% et 20% de la population irakienne, a en effet été longtemps persécutée sous les différents régimes qu’a connu le pays, et notamment sous Saddam Hussein, qui n’a pas hésité à gazer 5.000 d’entre eux en 1988, à les déplacer par la force et à les jeter sur les routes de l’exil.

Lors des élections générales du 30 janvier dernier, la liste kurde est arrivée en deuxième position : elle compte actuellement 77 députés, derrière celle des chiites de l’Alliance unifiée irakienne, qui en compte 146.

Talabani, 72 ans, est le leader de l’Union patriotique du Kurdistan (UPK), l’un des deux principaux partis kurdes en Irak. Ses fonctions à la tête de l’Irak seront essentiellement honorifiques, mais il devrait cependant appuyer les principales revendications des Kurdes quant à l’adoption d’un régime fédéral ou le rattachement de la ville de Kirkouk à leur province autonome.

Cette éventualité inquiète au plus haut point la Turquie voisine, qui craint un expansionnisme des Kurdes dans le nord de l’Irak, incluant la riche ville pétrolière de Kirkouk dans la zone autonome. La principale crainte d’Ankara, qui défend les droits des Turkmènes (turcophones) de cette ville, est que Kirkouk devienne à terme la capitale d’un Etat indépendant qu’une majorité de Kurdes souhaitent fonder dans cette région située aux portes de la Turquie. Dès après l’élection de Jalal Talabani, le ministre turc des Affaires étrangères, Abdullah Gul, l’a félicité mais applelé à œuvrer en faveur de « l’unité et de l’intégrité » de son pays.

Le chef de l’Etat sortant, le sunnite Ghazi al-Yaouar, et le ministre des Finances sortant, le chiite Adel Abdel Mahdi, ont été élus vice-présidents sur la même liste que Talabani. Il n’y avait pas d’autres candidats pour ces postes, dont l’attribution avait été négociée à l’avance entre les représentants des listes chiite et kurde et des politiciens sunnites. Les trois hommes ont obtenu les voix de 228 des 275 députés présents dans la salle, 29 ayant voté blanc.

A qui le ministère du Pétrole ?

Les trois membres du Conseil présidentiel prêteront serment jeudi, a annoncé le chef du Parlement Hajem al-Hassani. Talabani et ses adjoints seront ensuite chargés de nommer un Premier ministre, en remplacement d’Iyad Allaoui. Ce poste devrait revenir à Ibrahim al-Jaafari, chef du parti chiite Dawaa, qui devra former son cabinet avant de le présenter à la chambre. La majorité des portefeuilles ministériels ont déja été distribués entre les différentes communautés, mais chiites et Kurdes se disputent toujours le ministère stratégique du Pétrole. « Tous sera mis en place la semaine prochaine », a assuré Adel Abdel Mahdi, vice-président de l’Assemblée nationale. L’ensemble de ces mandats prendra fin à l’issue des élections générales prévues, pour l’heure, en décembre 2005.

« Je vous promets de faire tout ce qui est en mon pouvoir pour mériter votre confiance », a affirmé le nouveau président à l’adresse de la chambre. « J’écouterai vos propositions et exécuterai vos décisions et je participerai de toutes mes forces à l’établissement d’un régime démocratique, qui garantisse la liberté pour tous et pour déraciner le terrorisme criminel et la corruption ». Dans une allusion à peine voilée à la Syrie et à l’Iran, Jalal Talabani a assuré que « notre peuple refuse de courber la tête, sauf devant Dieu, et nous demandons à tous de traiter l’Irak avec respect, de ne pas s’ingérer dans ses affaires intérieures et de ne pas aider les terroristes qui mènent une guerre d’extermination contre le peuple irakien ». Aucune allusion directe cependant à l’égard des quelque 140.000 militaires américains qui quadrillent l’Irak.

Par G. T. (avec agences), liberation.fr