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Heurts à Naciria

vendredi 9 avril 2004, par Hassiba

La ville de Naciria, 36 km à l’est de Boumerdès, est le théâtre d’une violente émeute en cette journée du 8 avril 2004. L’élection présidentielle y est pratiquement empêchée par plus de 200 jeunes âgés entre 18 et 35 ans et se réclamant « avec fierté » du mouvement citoyen.

Tout a commencé, en fait, la veille suite à l’installation dans cette localité de nombreuses brigades de CNS. Des dizaines de jeunes sortent, ce soir-là, dans la rue et décident de se relayer pour occuper les principales artères menant au centre de vote Ibn-Badis jouxtant l’APC au centre-ville.

Le face-à-face avec la force publique prendra le lendemain une forme plus radicale. Les protestataires qui tentaient d’avancer vers les bureaux de vote sont violemment réprimés, à intervalles réguliers, par les policiers.

Bombes lacrymogènes, matraquage à volonté suivi de mots grossiers pour riposter aux jets de pierres des manifestants.
3 jeunes âgés entre 18 et 25 ans ont été arrêtés par les policiers aux environs de 10 h, a-t-on signalé. Le quatrième, âgé de 17 ans, sera lui aussi blessé à coups de baïonnette, avant d’être embarqué par les policiers.
Après un détour par un autre quartier où le calme régnait, nous nous mêlâmes à la foule des protestataires. Des cris fusent de partout et dénoncent le régime de Bouteflika. « Pas de vote sous ce système qui a provoqué la mort de 125 jeunes entre 2001 et 2002 en Kabylie. »

Les jeunes révoltés auront aussi une pieuse pensée pour Hakim, le frère de Rachid Allouache, retrouvé asphyxié mercredi matin dans son magasin à Fréha, 30 km à l’est de Tizi Ouzou. L’attachement à la plate-forme d’El Kseur est réitéré. « Nous ne trahirons jamais le combat des martyrs de la Kabylie contre la hogra du pouvoir en place », explique un père de famille. Comme tant d’autres, il s’élèvera contre le comportement inhumain de « ces policiers qui lancent leurs grenades lacrymogènes contre les maisons, asphyxiant les bébés et les asthmatiques ». Tout en nous désignant du doigt, à titre d’exemple, le mauvais état des routes du centre-ville, un autre enchaînera : « Les responsables locaux ne sont eux aussi que les relais des gouvernants indésirables, puisqu’ils ne se sont jamais souciés du sort de la population. »
A 14 h, alors que les heurts se poursuivent, on annonce officiellement que le taux de participation au vote dans cette localité est de 10 %.

Mais dans les bureaux de vote, la participation est très insignifiante. « Je peux vous assurer que seuls les encadreurs de l’opération, comme moi, ont pris la précaution de voter », avoue malicieusement une jeune fille. « Une fois le calme revenu en fin d’après-midi, quelques hommes, surtout, ont pu accomplir leur devoir électoral », témoigne pour sa part un responsable local.

Salim Haddou, Le Matin