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« Diplomatie préventive » envers Damas en attendant la stabilisation de l’Irak

samedi 25 décembre 2004, par Hassiba

Les troupes US en Irak n’ont plus vraiment le cœur aux fêtes de Noël. L’attentat suicide perpétré contre une base américaine avancée à Mossoul a prouvé toute la complexité de la sécurité dans l’après-Saddam.

C’est une guerre qui ne compte pas de lignes de front, rappelle le patron du Pentagone. Avait-il raison quand il fallait trancher la question du maintien ou non de la vieille garde irakienne dans les rangs de la nouvelle armée ? Les soupçons à propos du carnage de Mossoul porteraient sur cette même « filière » dont le dévouement nationaliste au pouvoir déchu de Saddam demeure intact. Le comment de la sécurisation des bases américaines, nouveau casse-tête pour le commandement US. Il promet de repasser le tout-sécuritaire au peigne fin mais il est loin le temps où l’on croyait au risque zéro.

Donald Rumsfeld craint un énième retour de manivelle alors qu’il est sur la sellette pour mauvaise gestion post-guerre préventive éclair. A quoi s’en tenir après les élections du 30 janvier exacerbe le doute. De quoi se retourner vers les voisins de l’Irak qu’il n’a cessé d’accuser d’ingérence dans le processus de stabilisation en cours. Le coup dur de Mossoul redonne de la voix à Washington qui s’en prend violemment au régime d’Al Assad fils. Il semble même que la violation par les chasseurs bombardiers israéliens de l’espace aérien syrien inspire les durs de la politique étrangère américaine. Les Apache de l’armée de Sharon y avait opéré pour limiter l’influence des relais logistiques du Djihad islamique et du Hamas palestinien après l’échec de la diplomatie US à contraindre Damas à une chasse à l’homme sur son sol. Le message n’ayant apparemment pas servi à un changement d’attitude de la Syrie, W. Bush avait déjà donné une indication : Il ne fallait pas espérer que Washington presse Tel-Aviv de reprendre les négociations de paix israélo-syriennes.

Ce ne serait pas la permissivité du régime de Bachar au sujet de la présence des factions palestiniennes en Syrie qui donne du fil à retordre aux Etats-Unis. La stabilité de l’Irak passe avant tous les « marchandages » moyen-orientaux. Ainsi, c’est la supposée influence syrienne parmi les sunnites d’Irak qui risque de ne plus clouer les Hawaks sur le tarmac.

Dans sa dernière livraison, le Jerusalem Post rapporte que les Etats-Unis pourraient mener un raid en Syrie contre des Irakiens soupçonnés d’avoir préparé des attentats contre des cibles américaines en Irak. Si elle venait à se faire, la réplique US interviendrait en réaction à l’attaque suicide de Mossoul. L’agressivité doit primer contre Damas, suggère un haut responsable de l’administration américaine avant de poursuivre : « A la place de la Syrie, je serais inquiet. » Au premier abord, il ne s’agit pas d’hostilités militaires qui compliqueraient la mission des troupes américaines sur le « front » irakien mais de frappes ciblées. Lesquelles, alors que Washington accuse des personnes d’être derrière la conspiration et le sabotage du processus de stabilisation politico-sécuritaire en Irak ? Problématique donc de marquer les objectifs à atteindre en l’absence de bases recensées sur le territoire syrien, contrairement aux intérêts de la résistance palestinienne.

Le régime d’Al Assad provoque une « frustration croissante » chez les Américains ; les plus fermes parmi eux poussent la Syrie à sévir contre les éléments du Baath irakien. Tandis que l’option de leur traque sur le sol syrien reste ouverte, tout porte à croire que celle-ci relèverait plus de « liquidations physiques » au lieu de raids à l’israélienne. Washington prendra-t-il le risque de sombrer dans une pareille « sale affaire » qui lui ferait encore perdre de sa crédibilité dans le monde arabo-musulman ? Voulant à tout prix faire des élections irakiennes un succès à l’image de la présidentielle afghane, l’administration américaine ne se jetterait pas dans la gueule du loup.Pourtant, les dernières déclarations de Bush II n’auguraient rien de reluisant pour les khameneïstes de Téhéran et les baathistes de Damas. Des outils diplomatiques aux pressions économiques, les néo-conservateurs américains choisiraient les plus coercitifs. Quitte à ce que l’amalgame entre ingérence et influence de ces deux pays en Irak soit fait.

Mais pour l’heure -du moins jusqu’aux élections-, il semble que W. Bush n’ira pas jusqu’à la confrontation. Et ce, même si la réunion sécuritaire à propos de l’Irak qu’avait abritée l’Iran démontrait le fiasco au bout du compte. Au-delà de la guerre des mots qu’il livre à ses ennemis, Washington fait preuve d’une grande patience à l’égard de l’Iran. Presque convaincu d’un échec à venir dans les négociations irano-européennes, George Walker sermonne la « diplomatie préventive ». Désormais, c’est un retour vers l’universalisme qui prévaut à la White House. En usera-t-elle envers les autorités syriennes au moment où l’Etat hébreu paraît avantager la surenchère par médias interposés ? Contrairement à ce qui se dit du côté de Tel-Aviv au sujet d’éventuels raids américains en territoire syrien, de hauts fonctionnaires du gouvernement américain précisent qu’aucune nouvelle sanction anti-syrienne n’est à prévoir.

Si la loi « Syria Accountability Act » est constamment réexaminée, Washington garde le bâton derrière le dos du fait que Damas a montré quelques signes de coopération en matière de « terrorisme transfrontalier ». « Il n’y a pas de discussions en ce moment sur le fait de faire quelque chose de plus », a dit un responsable américain sous le couvert de l’anonymat. Ainsi, les Etats-Unis choisissent de profiter de la maigre contribution des Syriens plutôt que de tout perdre.

Faut-il s’attendre donc au dépôt d’une nouvelle résolution franco-américaine durcie après que le régime de Bachar Al Assad s’est contenté de redéploiement de ses troupes au Liban au lieu de leur retrait définitif ? Pour le moment, rien n’a filtré à ce propos, des responsables militaires israéliens sont intervenus pour qualifier d’erreur stratégique un éventuel départ de l’armée syrienne du pays du Cèdre. Pourtant, des analystes politiques prétendent que la France a toute la latitude pour une seconde manche anti-syrienne. Surtout depuis que ses deux otages en Irak sont rentrés sains et saufs à la maison. Bien que leur libération conforte les thèses de Washington quant à l’existence d’un agenda djihadiste islamique plus qu’irakien, rien n’indique que la coalition diplomatique en question va aller au-delà de ses châtiments initiaux. Une chose est sûre, le cercle des meneurs en chef de la lutte contre le terrorisme international vient de s’agrandir en Occident. Incluant finalement ceux qui se ravisent à associer les suppôts de Ben Laden au processus politique en Irak.

Par Anis Djaad, latribune-online.com