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Les vautours du Djurdjura menacés de disparition
samedi 15 mai 2004, par
Le gypaète, le percnoptère et le vautour fauve, espèces de vautours répertoriées dans le parc national du Djurdjura où elles vivent et nichent dans les corniches de falaises, sont menacées d’extinction pour des causes liées au changement de leur milieu biotope et a d’autres facteurs de déprédation, selon un constat d’un ornithologue de l’université de Tizi-Ouzou.
Au titre des menaces pesant sur ces rapaces, M. Boukhamza cite des modifications substantielles de la chaîne alimentaire liant les différentes espèces animales, induites notamment par l’emploi à grande échelle de pesticides dans l’agriculture, ce qui aggrave les risques d’empoisonnement du vautour, du fait qu’il occupe le sommet de la pyramide de cette chaîne. La consommation des charognes, consistant généralement en des cadavres d’animaux, leur est également souvent fatale, car les bergers ont de plus en plus tendance à empoisonner leurs bêtes mortes qu’ils abandonnent en pleine nature, plutôt que de les enfouir. Ces appâts empoisonnés sont destinés à éliminer les chacals et les hyènes, ennemis des troupeaux d’animaux domestiques.
L’existence des vautours dépend, est-il expliqué, de l’économie pastorale. Les troupeaux de moutons et de caprins qui séjournent dans les montagnes du Djurdjura leur fournissent des ressources régulières en bêtes accidentées ou mortes de maladie, ainsi que des déchets d’animaux.
Privés de chairs en putréfaction, en hiver, période d’amenuisement d’occasions alimentaires, ils se contentent de l’ingestion de rongeurs, de batraciens, de vers, voire d’herbes sèches. La vue extraordinaire d’un vautour lui permet de distinguer à plus de 300 mètres entre un animal mort et un animal endormi, en restant immobile sur des rochers, ou il a coutume de passer la nuit et de se reposer.
Si le gypaète et le vautour fauve vivent dans les montagnes et les collines rocailleuses, le percnoptère "Isghi" est la seule espèce à fréquenter les alentours des villages du Djurdjura, où il rode sur les dépôts d’immondices à la recherche de la nourriture.
Selon cet ornithologue, ces charognards sont également menacés par l’homme, grand prédateur qui leur donne la chasse "gratuitement", ou en détruisant leurs nids, afin de "conjurer le mauvais œil" que symboliserait cet oiseau, selon des croyances locales.
En effet, synonyme de malheur, le nom de ce mangeur de cadavres est souvent utilisé pour designer les gens cupides, cruels, dépouillant leurs victimes, prêts à tout pour de l’argent. "Là ou le vautour rode, il y a malheur", dit-on. Ces préjugés sont sans aucun fondement scientifique, assure le même ornithologue, en soulignant la nécessité de les extirper et de montrer que le vautour est un remarquable "éboueur de la nature" qui, en se nourrissant des bêtes mortes, rend service à l’homme, en prévoyant les épidémies. Il n’attaque jamais un être vivant.
Ce rapace peut vivre jusqu’à 40 ans et ne pond qu’un seul œuf par an. L’unique petit doit être constamment protégé par ses parents contre les attaques de prédateurs, en particulier le grand corbeau.
Le gypaète barbu, vivant dans le haut du Djurdjura où l’hôtel de Tala Guilef porte son nom "Iguidhar", est l’espèce la plus curieuse des vautours. Il est reconnaissable à ses longues ailes et à sa grande queue qui lui permettent de voler très haut. Il est flanqué d’une tête blanche avec une large bande noire en travers de l’œil, se terminant en avant avec une touffe de plumes (barbe) qui recouvre une partie du bec. Le gypaète est silencieux pendant tout le temps, sauf durant les parades nuptiales, ou il se décide à caqueter pour solliciter les faveurs de sa dulcinée.
Solitaire, le gypaète barbu ne se joint jamais à la curée des autres espèces exploitant une carcasse animale. Il attend toujours que les autres vautours aient terminé leur festin, pour s’emparer des os qu’il casse, en les laissant tomber d’en haut sur une surface dure, pour en avaler la moelle ainsi libérée.
Un film documentaire sur une curée de vautours, rappelle-t-on, a été réalisé dans les années 80 par la télévision nationale, en collaboration avec le parc national du Djurdjura.
Source : APS