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Les prix du gaz, le marché communautaire et l’activité à l’international

lundi 24 janvier 2005, par Hassiba

Dans un rapport sur le secteur de l’énergie dans le Vieux Continent, élaboré récemment par la Commission européenne, il est relevé que sur le marché communautaire, les prix de gros du gaz naturel, indexés sur ceux du pétrole, ont connu une hausse d’environ deux euros à fin 2004.

Les prix de gros du gaz se prêtent à la comparaison dans la majorité des vingt-cinq Etats de l’UE aujourd’hui, à la différence de ceux de détail, qui, eux, enregistrent des différences considérables, est-il écrit dans le document de la Commission européenne. Cette évolution ne semble cependant pas se répercuter sur les circuits d’approvisionnement dont les capacités sont actuellement amplement suffisantes pour satisfaire la demande en hausse, rassure Bruxelles. Et puis, il existe déjà de bonnes raisons pour les pays producteurs et les fournisseurs communautaires de conclure des contrats pour satisfaire une demande croissante.

La consommation gazière diffère d’un pays à un autre. Elle augmente d’environ 14% en Espagne par exemple. A moyen terme, un certain nombre de projets, notamment pour des terminaux GNL (gaz naturel liquéfié) sont en cours ou envisagés. Bruxelles déplore toutefois les faiblesses de la construction d’un marché européen concurrentiel dans ce secteur. La création du marché intérieur du gaz, estime-t-il ainsi, exige une intégration plus forte ainsi qu’une intensification des efforts en vue de diversifier l’approvisionnement. La Commission européenne note que « même s’il existe plusieurs fournisseurs, leur concurrence mutuelle risque de se révéler inefficace s’ils achètent tout leur gaz au même grossiste ». Et d’ajouter : « Le développement du marché intérieur est freiné par le maintien de réservations à long terme de capacités de transport. Autre chose, le manque de cohérence entre les structures de tarification des différents exploitants de systèmes de transport a également empêché la concurrence dans certains domaines. » Les marchés gaziers continuent de présenter d’importantes rigidités dans de nombreux cas, généralement à cause du manque persistant d’intégration entre les marchés nationaux, y est-il écrit. Dans plusieurs pays, il est aujourd’hui difficile de changer de fournisseur du fait que les régimes d’équilibrage et de stockage sont inadéquats. Et que les tarifs de distribution sont élevés, soulignent les rédacteurs de ce rapport. A ce stade de la métamorphose du marché, les Européens se donnent une échéance : d’ici à juillet 2007, tous les clients pourront avoir la possibilité de choisir les fournisseurs d’électricité et de gaz qui leur conviennent. Mais en théorie, et seulement en théorie, du moins dans les conditions actuelles du marché. Il est, selon Bruxelles, important que l’ouverture du marché présente aux ménages et aux petites entreprises le même niveau de continuité de service pour l’électricité et le gaz et le même niveau de transparence des prix et des conditions contractuelles, indépendamment du choix du fournisseur.

Une ouverture en solo
La libéralisation du marché communautaire a été faite en solo. Bruxelles n’a pas jugé utile d’y associer ses partenaires fournisseurs. Première conséquence de cette ouverture, une remise en question de deux clauses consignées pourtant dans les relations commerciales entre l’UE et les pays exportateurs de gaz, comme l’Algérie, la Norvège et la Russie. Il s’agit de deux types de contrats : les contrats à long terme et la clause de destination (destination finale du gaz commercialisé). Il a fallu des mois de négociations et de prises de contacts pour que l’Algérie -le cas qui nous concerne- parvienne à ramener les Européens à reconsidérer les contrats à long terme et à accepter un partage des bénéfices issus de la revente du gaz algérien à des pays tiers (clause de destination). La formule partage des bénéfices a été faite par l’Algérie. Elle consiste en un partage des bénéfices produits par la revente du gaz algérien par un pays de l’UE lié à l’Algérie par un accord commercial à un pays tiers. Et libre au pays de l’UE d’en déterminer le prix. La clause de destination, de même que les contrats à long terme, a suscité un chaud débat entre Européens et Algériens. La raison en est simple. Elle est d’ordre financier a priori. Les pays exportateurs de gaz comme l’Algérie, la Russie et la Norvège jugeaient en effet qu’une telle mesure rendrait frileuses et hésitantes les institutions financières sur le financement des projets gaziers dont l’amortissement ne peut se réaliser qu’à long terme. Politiquement, la directive en question fait la part trop belle à une idéologie néolibérale triomphante et ignore la spécificité et les contraintes de l’industrie gazière. Aussi peut-elle être la source d’une sclérose à long terme de ce secteur d’activité, fait savoir Mustapha Benkhemou, expert, dans une contribution à la Tribune. Explication : les moyens considérables à mettre en œuvre pour explorer et mettre à jour de nouvelles accumulations de gaz, les risques techniques et financiers liés aux investissements nécessaires à la mise en production de nouveaux gisements ainsi qu’au transport du gaz imposent d’appréhender la problématique posée par les réformes contenues dans la directive dont il s’agit. Cette dernière vise à démonopoliser et à balayer toutes les entraves aux transactions commerciales gazières sur le marché européen. Mais comment y parvenir, tout en garantissant aux producteurs la rentabilisation de leurs investissements, se demande-t-il. Mustapha Benkhemou relève aussi que l’examen attentif des principales dispositions contenues dans cette directive et de leur transposition par les pays consommateurs concernés, compte tenu du principe de subsidiarité, peut permettre à un fournisseur majeur de ce marché comme l’Algérie d’anticiper les mutations significatives des termes du marché en fonction des acteurs anciens et nouveaux.

11% du marché communautaire
La directive de Bruxelles établit les règles communes se rapportant au transport, à la distribution, à la fourniture et au stockage du gaz naturel. Elle établit également les modalités de fonctionnement, d’organisation de ce secteur, d’accès au marché et d’exploitation des réseaux ainsi que les critères et les procédures applicables en matière d’octroi d’autorisations de transport, de distribution, de fourniture et de stockage, rappelle cet expert. En vertu de cette directive, les deux modalités d’accès au réseau doivent aboutir à des résultats économiques équivalents dans les Etats membres et donc à un niveau comparable d’ouverture des marchés et d’accès au marché du gaz, lesquels Etats peuvent cependant imposer aux entreprises des obligations de service public dans l’intérêt économique général. Ces obligations portent sur les aspects de sécurité, l’approvisionnement compris, de régularité, de qualité, de prix de fourniture et de la protection de l’environnement. Les Etats membres peuvent ne pas appliquer certaines dispositions relatives à la distribution, dans la mesure où ces dernières pourraient mettre dans la gêne les entreprises du gaz naturel, quand il s’agit de l’application des obligations qui leur sont imposées, dans l’intérêt général. En matière de désignation des clients éligibles, les Etats membres veillent à ce que cette éligibilité, tout comme l’entrée en vigueur de la directive, aboutisse à une ouverture du marché égale à 20% au moins de la consommation annuelle totale du marché national du gaz. Un taux qui sera porté à 28% en cinq ans après l’entrée en vigueur de la directive et à 42,3% après dix ans. Même si elle fournit 11% des besoins en gaz sur le marché communautaire, l’Algérie s’intéresse aussi à d’autres marchés comme les Etats-Unis, la Chine ou encore l’Inde. Déjà, un projet d’installation aux Etats-Unis de terminaux gaziers est, dans cette perspective, en route. Même avec deux euros de plus sur 2004, le prix du gaz dans l’Europe communautaire reste dans une proportion moyenne par comparaison au marché américain où les prix sont relativement élevés. Une offre intéressante pour l’Algérie. Dans le marché américain, elle peut se faire une place depuis le Pérou où elle travaille sur un important gisement gazier.

Pays pétrolier et gazier, l’Algérie table sur des exportations de quatre-vingt-cinq milliards de mètres cubes d’ici à 2010. Entre autres projets gaziers importants qu’elle s’apprête à mettre à exécution, celui de Gassi Touil. Le groupe Sonatrach y est associé aux Espagnols de Repsol et Gas-Natural. Une fois achevé, il fera augmenter substantiellement les exportations gazières. Dans une déclaration récente au journal londonien The Financial Times, le ministre de l’Energie et des Mines révèle que d’ici à 2015, trente pour cent de la production de Sonatrach proviendra de l’international. Outre le Pérou, la compagnie nationale des hydrocarbures fait des prospections au Mexique, en Afrique et en Asie.

Par Youcef Salami, La Tribune