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Le tourisme dans le Sahara algérien dans la tourmente

mardi 30 novembre 2004, par nassim

Les propriétaires d’agence de tourisme dans le Sahara algérien réclament plus d’écoute de la part des pouvoirs publics.

Un responsable au niveau du ministère du Tourisme déclarait ,à l’occasion de l’arrivée d’un vol charter avec à son bord 100 touristes, que l’année 2000 devait marquer la transition entre la décennie noire et le retour au calme. C’était il y a quatre ans. En 2000, 18 autres vols devaient être programmés à destination du grand sud. Quatre années plus tard, les propriétaires des agences de tourisme et des voyages affirment que l’activité est encore au ralenti.

“L’embargo sur la destination Algérie n’est pas encore brisé”, a déclaré le président de l’association des agences de tourisme à Djanet. Pour lui, il est plus que jamais nécessaire d’intervenir auprès des tour-opérateurs pour se débarrasser de cette image négative et surtout erronée qui entrave sérieusement la relance du tourisme.
“Le tourisme serait notre meilleur ambassadeur auprès de ses compatriotes. Pour le moment, nous avons affaire aux plus téméraires, mais c’est loin d’être suffisant”, nous dit-il, pointant un doigt accusateur sur les pouvoirs publics qui, de son avis, ne font pas assez d’efforts pour lever tous les obstacles. “Dans l’état actuel des choses, il relève de l’absurde de penser à investir dans le secteur du tourisme. Il n’existe aucune garantie. Nous avons vécu dix longues années d’isolement qui n’ont pas été sans incidence sur l’activité touristique et sur tout notre quotidien. Aujourd’hui, on nous reproche de travailler avec un matériel vétuste. Nous ne pouvons pas faire autrement que de continuer à colmater les brèches lorsqu’on apprend qu’un véhicule de marque Toyota coûte pas moins de 500 millions de centimes. On nous propose, certes, des crédits que nous ne pouvons accepter pour la simple raison qu’il nous est impossible d’amortir l’investissement en cinq ans”, dit-il en déplorant ainsi l’incohérence de la politique de relance du tourisme prônée actuellement.

RETOMBÉES DE L’AFFAIRE DES TOURISTES ENLEVÉS en 2003
Évoquant l’affaire des touristes enlevés en février 2003 et tout récemment la disparition des cinq pseudo-touristes allemands, ce qui a failli créer une autre crise, il estime que “l’incident des touristes enlevés en 2003 nous est tombé sur la tête comme un coup de massue et nous a plongés dans les pires cauchemars. Nous avons pris conscience de ce que l’on savait déjà, qu’il ne pouvait y avoir meilleur garant de ce désert que ses propres enfants. Il y va de notre survie”, nous dit-il tout en indiquant que les corps de sécurité faisaient un travail irréprochable et que les guides étaient encore plus rassurés en croisant des patrouilles au cours de leurs sorties.Il a, cependant, précisé que les professionnels du tourisme ne trouvent aucun inconvénient à se plier aux exigences administratives, alors que d’autres estiment que ces formalités sont quelque peu exagérées, voire handicapantes de par leur lenteur. Concernant la préservation des vestiges historiques, les professionnels du tourisme considèrent que ces espaces ne bénéficient pas de l’attention qu’ils méritent.

“En tant qu’agence de tourisme et de voyages, nous essayons, selon nos moyens, de participer à des manifestations qui relèvent du secteur et de voir ce qui se fait à travers le monde. Nous avons remarqué que certains européens ont été jusqu’à fermer des sites et ne présenter que des reproductions par souci de les préserver. Nous sommes bien loin de toutes ces préoccupations et c’est bien dommage”, ont-ils déploré.“Certes, on assiste depuis quelque temps à un regain d’activité, mais nous sommes bien loin de ce qui devrait être”, ont-ils reconnu.“Aucune agence n’a, jusque-là, annulé son circuit pour manque de carburant, mais cela ne signifie pas que le problème n’existe pas pour autant”, ont-ils révélé, ne niant pas, cependant, que le trafic du fuel à travers les frontières est monnaie courante dans cette wilaya frontalière de l’Extrême-Sud. Outre ce fait évident, Tamanrasset, qui abrite une population de 100 000 habitants et plus de 13 000 véhicules, ne dispose que de deux pompes d’essence (Naftal). Et cette situation date des années 1970, alors que la population locale a bien évolué. Ajoutez à cela que pas moins de 700 km de route sont complètement endommagés. Ce qui n’avantage en rien l’activité touristique. “La concurrence existe bel et bien, mais se situe au niveau des prix et non de la qualité et c’est bien dommage, car elle ne sera que plus féroce lorsque les tour-opérateurs. seront installés et cette ère n’est pas bien loin”, nous a déclaré M. Zonga Mokhtar, propriétaire d’agence de tourisme, qui a déploré, entre autres, l’absence d’un musée à Tamanrasset.

“Les professionnels du tourisme devraient s’entendre et poser les véritables problèmes, à commencer par celui du transport”, a-t-il insisté En effet, la cherté des billets d’avion pour Tam et Djanet et la rareté de la fréquence des vols en provenance de l’étranger (absence de charters) constituent, de l’avis des professionnels du tourisme, des blocages majeurs en vue de développer un tourisme aussi bien local qu’international. Ils demandent, par conséquent, une plus grande écoute de la part des pouvoirs publics. “J’ai pris l’initiative d’écrire au directeur d’Air Algérie pour le solliciter de programmer une correspondance sur Djanet un samedi soir, car cela correspond au programme des européens. Et je reste convaincu qu’il devrait y avoir des vols directs car les périodes de vacances sont très courtes pour en perdre la moitié dans le transport”, a expliqué un propriétaire d’agence de tourisme à Djanet, pour illustrer le manque de cohérence dans la politique touristique, qui ne peut s’accomplir qu’à travers l’intersectorialité.

Par Nabila Saïdoun, Liberté