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Le dollar en chute libre

samedi 27 novembre 2004, par Hassiba

Le dollar a poursuivi hier sa chute libre -malgré un certain répit en fin de matinée en Europe- propulsant l’euro, le franc suisse et le yen à de nouveaux plus hauts historiques.

L’euro est le grand gagnant du plongeon du billet vert : la devise européenne a dépassé hier matin pour la première fois depuis son lancement en 1999 le seuil de 1,33 dollar pour s’envoler jusqu’à 1,3329 dollar vers 06h20 GMT. Sur la semaine, l’euro a bondi de 0,75% face au dollar, établissant jour après jour de nouveaux records historiques.Le décrochage de la devise américaine a également profité à une série de devises et à l’or : le franc suisse a bondi jusqu’à 1,1307 FS pour un dollar, son plus haut niveau depuis novembre 1995 et le métal jaune a dépassé le seuil de 455 dollars l’once pour la première fois depuis seize ans.De son côté, le yen a bondi à son plus haut niveau depuis janvier 2000 tandis que le dollar canadien a établi un nouveau record de 12 ans, sans oublier le rand sud-africain (record de 5 ans) et le won sud-coréen (plus haut depuis novembre 1997).

« Le sentiment est tellement négatif sur le marché des changes à l’égard du dollar que toute information est capable d’accélérer le repli du billet vert et de conforter ce thème dominant », souligne un économiste à la banque Tokyo-Mitsubishi.Cet économiste fait allusion aux informations publiées hier dans la presse chinoise, citant un membre du comité monétaire de la Banque centrale, sur une réduction des avoirs en bons du Trésor américains à 180 milliards de dollars. Ces informations avaient fait dégringoler le dollar. Elles ont ensuite été clarifiées par ce même responsable chinois : la Chine a diminué la part relative de ses réserves de changes détenues en bons du Trésor américains, mais pas leur montant absolu, pour se prémunir contre la faiblesse du dollar, a déclaré Yu Yongding, membre du comité monétaire de la Banque centrale, dans un communiqué.

Selon un économiste à la banque Calyon, « ce genre d’informations est au cœur de l’évolution actuelle des devises sur le marché des changes ». Même s’il ne s’agit que d’une part relative des avoirs, « toute information montrant qu’une Banque centrale réduit ses actifs en dollars agit comme un facteur qui déclenche des nouvelles ventes de dollars », explique l’économiste de la banque Calyon. Lorsque la Banque centrale de Russie n’a pas exclu mercredi d’augmenter la part de ses réserves en euros au détriment du dollar. Le dollar a ainsi plongé face aux principales devises.« Dans un contexte, poursuit l’économiste de Calyon, où l’on s’inquiète de la volonté des investisseurs étrangers -notamment les banques centrales asiatiques- à financer l’énorme déficit de la balance des comptes courants des Etats-Unis, ce genre d’information ne peut qu’alimenter le pessimisme à l’égard du dollar. »

Le problème qui pèse structurellement sur le dollar depuis plusieurs semaines est l’ampleur des déficits du budget et de la balance des comptes courants des Etats-Unis. Ces déficits, notamment celui des comptes courants qui s’est élevé au deuxième trimestre à 166,2 milliards de dollars, sont financés notamment par les achats de bons du Trésor américains par des investisseurs étrangers. Si ces derniers devaient réduire leurs investissements aux Etats-Unis, la balance des comptes courants pourrait encore se creuser, minant encore davantage le dollar. Le billet vert a certes repris des couleurs durant les échanges européens après le communiqué de la Banque centrale de Chine.

Les cambistes s’attendent à ce que le dollar poursuive son repli : « Le prochain objectif pour l’euro est le seuil de 1,35 dollar », prévient un économiste à la banque ABN Amro. « Tout reste en place sur le marché des changes pour que le dollar poursuive son repli, renchérit l’économiste de Calyon. Il faut toutefois s’attendre à une période de prudence. »

Par Rafik Elias, La Tribune