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L’ovin de l’Aïd El-Adha reste cher

samedi 8 janvier 2005, par Hassiba

À deux semaines de l’Aïd el-Adha, les bordures des axes autoroutiers de la capitale commencent d’ores et déjà à accueillir les troupeaux de moutons.

Chargé dans des camions et camionnettes, le cheptel, venu de l’intérieur du pays, arrive à la conquête de leurs futurs propriétaires. Le scénario auquel on a assisté l’année dernière se produit encore une fois en ce début 2005. Les mêmes faits et gestes des maquignons, les retrouvailles entre les producteurs et les chevillards, le contact de ces derniers avec les clients potentiels s’effectuent, en effet, dans plusieurs endroits, pas souvent autorisés, des communes et autres localités. Ce qui d’année en année diffère cependant reste incontestablement les prix pratiqués par les différents intervenants.

Chaque année, à l’approche de la fête de l’Aïd, les tarifs de l’ovin connaissent une flambée brusque et constante. Les prix enregistrent une hausse importante durant, notamment les quelques jours qui nous séparent du jour du sacrifice. À titre d’illustration, les petits moutons pesant plus de 15 kilogrammes sont proposés actuellement entre 15 000 DA et 17 000 DA. Dans d’autres lieux, le prix minimum est de 20 000 DA pour un mouton moyen. Les plus costauds et les plus beaux sont, tenez-vous bien, proposés à plus de 60 000 DA ! Qui dit mieux ? Les enchères sont ouvertes à longueur de journée. Au grand dam des petites bourses, aucun contrôle des prix n’est autorisé. “Les prix sont malheureusement libres. Nous ne pouvons, par conséquent, intervenir”, précisera le directeur de la concurrence et des prix (DCP) d’Alger.

Ainsi, le coût est, dans la majeure partie des points de vente, négocié entre le vendeur et l’acheteur. Le citoyen ayant un revenu moyen trouve, toutefois, inabordables les tarifs de l’ovin. L’espoir pourrait, néanmoins, venir de l’entreprise Latraco qui a mis récemment en vente quelque 12 000 têtes à des prix se situant dans la fourchette de 17 000 DA à 27 000 DA.

La pluie désavantage les bourses moyennes
Cette situation est essentiellement due, faut-il l’expliquer, aux dernières pluies qui se sont abattues sur plusieurs régions du pays. L’importante pluviométrie qui caractérise depuis plus de trois ans notre pays constitue l’un des facteurs de cette hausse.
L’éleveur a préféré laisser son bétail s’engraisser tout le long des parcours steppiques de pâturage. Il n’a pas besoin d’autres aliments pour nourrir son cheptel d’autant plus que l’herbage existe en abondance. Plus le mouton s’engraisse, plus il pèse lourd et plus il coûte cher...
Pour l’éleveur, la conduite à tenir est donc claire. D’où la décision de reporter la date de la vente et, par ricochet, de l’abattage des béliers à des mois plus tard. Contrairement à la période de sécheresse où il est tenu de dépenser de l’argent en plus pour acheter les aliments indispensables à la survie de son bétail dont les prix avoisinent dans de nombreuses wilayas les 1 200 DA. Du coup, il opte pour la vente et l’abattage qui lui éviteront toute dépense supplémentaire. Pendant cette période, faut-il le souligner, une importante consommation de viande ovine et une forte demande sont enregistrées.
Cette cadence sera maintenue également jusqu’au retour des hadjis de leur pèlerinage des Lieux Saints. Les pèlerins sacrifient cette bête pour fêter leur hadj. Les béliers viennent de Djelfa, de Laghouat, de Médéa, de Tiaret... et se dirigent vers Alger et sa périphérie, considérées comme un marché juteux. Le prix final de l’ovin est fixé en tenant compte aussi du coût du transport à partir des wilayas fournisseuses, la prise en charge du séjour du maquignon, ses consommations...

Prix : les raisons d’une hausse identifiées
Selon certains spécialistes, la valeur de l’ovin subit une hausse de plus de 40%, dans une première phase, dès son arrivée à Alger. À cela, il y a lieu d’ajouter le phénomène des intermédiaires qui n’attendent que cette occasion pour s’enrichir davantage en revendant les bêtes à un prix double, voire plus. L’autre raison de la hausse a trait au manque de cette espèce animale. L’offre n’est pas aussi suffisante que l’on croit. Tous les jours que Dieu fait, des quantités non négligeables de moutons quittent notre pays et traversent nos frontières pour atterrir chez nos voisins. Une enquête menée par des experts indique qu’au niveau des régions agropastorales situées près des frontières orientales, il existe deux formes de circuits de commercialisation : un circuit formel qui ne concerne que les marchés locaux et un autre informel qui cible le transfert transfrontalier des animaux, les peaux de chèvre et les aliments du bétail tels que la paille. Pour limiter le trafic clandestin d’animaux vers la Tunisie, le wali de Tébessa, pour ne citer que cet exemple, a instauré un arrêté qui réglemente le transport des animaux à trois ovins à la fois et des aliments de bétail dans la zone frontalière. Au cas où l’éleveur voudrait transporter plus d’animaux, affirme-t-on dans le rapport de cette enquête, il est dans l’obligation d’établir une autorisation des douanes locales lui permettant de transporter un effectif supérieur à trois. Chaque semaine, l’éleveur est appelé à présenter sa carte professionnelle aux douanes pour déclarer les animaux mis sur le marché. Pour les éleveurs qui ne possèdent pas de carte professionnelle, ils achètent leurs animaux et les font transporter par des éleveurs possesseurs de registre mais à des prix élevés.

Par ailleurs, les moutons proposés à la vente doivent, une fois arrivés à Alger, passer chez les vétérinaires pour un contrôle sanitaire. Ceux qui ne souffrent d’aucune maladie obtiennent systématiquement un certificat sanitaire. À ce moment-là, le bétail peut être dirigé vers les lieux désignés pour la circonstance à travers un arrêté signé par le wali. Or, la vente se fait partout engendrant ainsi une anarchie totale. Les services vétérinaires doivent être à ce propos vigilants.

Par Badreddine Khris, Liberté