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Etats-Unis : faut-il débrancher Terri Schiavo ?

lundi 21 mars 2005, par Hassiba

Sur la dernière vidéo de Terri Schiavo, datée d’août 2001, on voit une jeune femme au regard absent, dont le visage semble figé dans un éternel sourire.

Les médecins l’ont déclarée dans un état de « coma végétatif permanent », après une attaque cérébrale en 1990, mais ses parents, Bob et Mary Schindler, assurent que leur fille leur répond et que sa condition « pourrait s’améliorer ». En un week-end en tout cas, l’affaire Terri Schiavo est devenue l’enjeu d’une bataille politico-juridique sans précédent aux Etats-Unis, relançant un vaste débat national sur l’euthanasie.

Alors que les docteurs ont arrêté vendredi l’alimentation artificielle de cette Floridienne de 41 ans, le président Bush a raccourci son week-end pour rentrer hier à Washington afin de pouvoir signer une loi qui pourrait maintenir Terri Schiavo en vie. Les leaders républicains du Congrès, qui auraient dû profiter du début de leurs vacances de Pâques, n’ont pas quitté Capitol Hill, assurant qu’ils allaient « tout faire pour préserver le droit à la vie d’une femme qui n’a aucune chance de se défendre ». Selon les médecins, elle peut survivre encore deux semaines sans la nourriture liquide qui lui était dispensée à travers des tubes en plastique.

Bataille juridique.
C’est vendredi à la mi-journée que l’histoire de Terri Schiavo s’est de nouveau retrouvée sur toutes les télévisions américaines. Après une bataille juridique de sept ans, Michael Schiavo, le mari et tuteur de Terri, qui assure que sa femme lui a toujours dit qu’elle ne voudrait pas être maintenue en vie si elle tombait dans un coma, avait obtenu de la part d’un juge de Floride le débranchement de son cathéter d’alimentation. Mais, à la surprise générale, plusieurs membres républicains du Congrès annonçaient qu’ils avaient décidé d’ouvrir une enquête sur toute l’affaire. Ils convoquaient alors plusieurs membres de la famille pour des auditions fin mars. Aussitôt, un premier juge floridien suspendait la décision d’interrompre l’alimentation de la jeune femme. Avant qu’un autre ne donne son accord pour « débrancher » Terri.

« Barbarie ».
En quelques heures, la saga de Terri Schiavo allait provoquer une véritable tourmente politique à Washington. Malgré la décision de mettre fin à l’alimentation de la jeune femme, le représentant républicain Tom Delay promettait qu’il n’était « pas question d’abdiquer devant la barbarie ». samedi soir, les élus républicains du Congrès annonçaient qu’ils étaient parvenus à un accord sur un texte de loi. Celui ci réfère au « cas unique de Terri Schiavo » et demande à un tribunal fédéral d’intervenir, en stipulant que « les droits constitutionnels » de la jeune femme n’ont pas été respectés.

Hier, les négociations ont donc commencé à la Chambre des représentants pour l’approbation de ce texte. Les discussions pourraient cependant être vives, alors que plusieurs démocrates ont d’ores et déjà précisé qu’ils allaient s’opposer au document.

Mais la bataille à Washington a surtout ouvert un vaste débat sur le rôle du Congrès dans une affaire que nombre d’Américains considèrent privée et personnelle. « C’est une intrusion du gouvernement fédéral et des politiciens dans une décision qui devrait rester une décision familiale », a estimé le représentant démocrate de l’Oregon, Earl Blumenauer. La campagne pour « sauver Terri Schiavo » est en outre soutenue depuis plusieurs années par les groupes chrétiens ultraconservateurs et tous les opposants à l’avortement.

En 2003 déjà, l’alimentation artificielle de Schiavo avait été stoppée, avant d’être rétablie sur intervention de Jeb Bush, le gouverneur de Floride et frère du Président. La semaine dernière George W. Bush avait estimé que « dans de tels cas, qui posent des questions graves, notre société, nos lois et nos tribunaux devaient avoir une présomption en faveur de la vie ».

Récupération.
Hier, la mère de Terri Schiavo a de nouveau lancé un appel « à tous ceux qui pouvaient sauver ma petite fille », demandant également qu’on « évite toute récupération politique ». Depuis des mois, des manifestants se relaient devant l’hôpital où se trouve Terri Schiavo pour allumer des bougies et prier « contre la mise à mort d’une jeune innocente ».

New-York, Fabrice ROUSSELOT, liberation.fr