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Cybercafés à Annaba : L’anarchie

jeudi 26 août 2004, par Hassiba

Depuis quelques années, le réseau Internet fait la tendance en Algérie. Avec l’Asymmetric Digital Subcriber Line (ADSL), une technique qui permet d’accéder à Internet haut débit, ce réseau a atteint des piques inimaginables.

En Algérie, d’aucuns avancent que ce moyen de communication assume pleinement la forte demande.

Celle-ci est actuellement de l’ordre de plus de 500 000 internautes, 50 000 abonnés et 2000 sites et un réseau de câblage en fibre optique qui s’étend sur 8000 km. Plus de 3500 cybercafés ont ouvert leurs portes sur l’ensemble des régions du pays, y compris dans des localités les plus reculées. Depuis 2000, avec l’apport des investisseurs étrangers dans ce créneau, de nouveaux records de chiffres d’internautes sont enregistrés chaque mois.

Des dizaines de milliers de potentiels internautes souhaitent essayer ce type de moyen de communication interplanétaire qui a pour principaux fournisseurs en Algérie, Cerist, Servret, Solinet, Express-Wanadoo. Bien que s’étant tardivement raccordée, l’Algérie peut s’enorgueillir d’être très en avance dans le développement du réseau Internet par rapport aux autres pays africains et ceux du monde arabe. Cette position privilégiée qu’occupe notre pays est le résultat d’une politique très libérale en matière d’accès à n’importe quel site sans restriction aucune.

Ce qui n’est pas le cas dans d’autres pays, et particulièrement la Tunisie, où, selon une de nos consœurs interrogée à l’occasion d’une rencontre de journalistes méditerranéens, a déclaré : « En Tunisie, l’accès à Internet est sous le contrôle direct de la présidence de la République. Chez nous rien ne passe, Internet est passé au crible. » Bien développé dans notre pays, Internet l’est, mais semble ne pas répondre à toutes les sollicitations. Le handicap majeur rencontré par les internautes dans leur recherche de contact en surfant se situe au niveau de la maîtrise d’une autre langue que celle nationale.

Situation que confirme du reste Mlle F. Zanat, gérante d’un cybercafé à Annaba, wilaya qui en compte à elle seule 200 : « L’affluence des jeunes populations moins de 30 ans est en baisse. Le problème de la langue se pose avec acuité. Nos jeunes ne maîtrisent pas la langue. Ce qui les décourage et les incite à abandonner l’usage d’Internet. Pour se faire accepter par leurs interlocuteurs étrangers, certains de nos internautes utilisent des identités étrangères en majorité occidentales ». Au handicap de la langue s’ajoute celui de l’apparente incompétence de ceux qui, dans notre pays, ont en charge la gestion de la commutation téléphonique. Les coupures intempestives et fréquentes des communications virtuelles sont un autre handicap majeur à l’origine de milliers d’abandons. « Effectivement, le problème des fréquentes coupures a fait fuir les internautes. Ajoutez les dépenses de près de 2000 DA par jour qu’ils engagent, ce problème a entraîné la plupart des cybercafés à fermer leur porte pour cause de faillite. Je précise que ces problèmes qui ne se posent nulle part ailleurs, sont spécifiques à la wilaya de Annaba. Autant que pour les cybercafés et les internautes, ce problème est également préjudiciable à l’administration des P et T », a précisé Mlle Zanat. Cette déclaration offre un plus grand éclairage sur les difficultés de connexion que rencontrent quotidiennement les internautes.

Pour étancher leur soif de voyager virtuellement ou pour éviter une rupture avec leur correspondant habituel à l’autre bout du monde, certains de ces internautes n’hésitent pas à veiller jusqu’au petit matin pour espérer se connecter sur le réseau. Rafik B. est un jeune homme qui ne rate pas une occasion pour prospecter dans le virtuel une possibilité d’améliorer sa situation sociale. Petit fonctionnaire dans une administration, il n’hésite pas à mettre la totalité de sa mensualité pour satisfaire son besoin en communication.

Il en veut aux P et T de Annaba qu’il accuse être un véritable frein au développement du réseau Internet dans la wilaya de Annaba. « Partout dans le pays, l’administration des téléphones s’est mise au diapason des technologies de la communication notamment Internet. A Annaba, cette administration marque réellement le pas à moins qu’il ne s’agisse d’un acte prémédité visant à stopper l’élan du virtuel et le développement de la culture générale de notre jeunesse par le biais d’Internet », considère Rafik qui a également dénoncé l’anarchie sévissant sur le marché de la communication virtuelle, la guerre des prix que se livrent les gérants des cybercafés et l’utilisation par la majorité de ces derniers des lignes directes des P et T au moment où d’autres utilisent le réseau satellitaire, Rédha M. est un autre gérant de cybercafé implanté au centre-ville, dans une rue très fréquentée. Interrogé sur son activité, il pointe un doigt accusateur sur les P et T de Annaba affirmant qu’elles sont à l’origine de tous les déboires des cybercafés et des internautes. Pour argumenter ses déclarations, il a souligné : « Je ne vais pas tarder à fermer. Les coupures de connexion fréquentes et régulières m’ont pratiquement assommé. Ma clientèle a fui et je ne sais plus quoi faire. Au moment où les responsables politiques affirment que le réseau national de téléphonie est numérisé et que plusieurs projets, notamment la réalisation de lignes à très haut débit, de stations de commutation et de 3 millions de lignes supplémentaires, vont être lancés, je me pose bien des questions. Il ne faut pas se leurrer, notre pays n’a pas les moyens de sa politique. C’est l’anarchie la plus totale dans le secteur de la communication, toutes branches confondues. »

A l’administration des P et T de Annaba, il semble que certains aient tissé une toile étanche autour du directeur de cette administration au point que toute tentative de prise de contact est vouée à l’échec. La seule déclaration que nous avons pu enregistrer sous le sceau de l’anonymat émane d’un agent : « Dans notre administration, l’ambiance de travail est malsaine. Je peux vous dire que certains de nos responsables locaux font tout pour créer des difficultés avec pour objectif la relève du directeur de wilaya qui fait tout pour améliorer la situation de la wilaya en matière de téléphonie et autres prestations postales. »

Par N.B., El Watan