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Cellules souches : Bush menace d’user de son droit de veto

samedi 21 mai 2005, par Hassiba

Si le président George Bush avait jusqu’à présent réussi à tenir une ligne relativement médiane entre les ailes radicale et modérée du Parti républicain, il est en train d’y renoncer. Vendredi 20 mai, il a annoncé qu’il ferait usage de son veto pour s’opposer à un projet de loi sur la recherche sur les cellules souches, alors qu’une trentaine de parlementaires républicains y sont favorables.

Bush cède à la droite chrétienne en menaçant d’utiliser son droit de veto.

Le sénateur démocrate Edward Kennedy a estimé que cette menace de rejet trahissait "à quel point la Maison Blanche est débitrice de la droite extrême du Parti républicain" .
Cette nouvelle crispation vient s’ajouter aux difficultés que rencontre le président américain pour faire passer son programme au Congrès, alors qu’il dispose d’une confortable majorité. La réforme des retraites avance au ralenti. La nomination de John Bolton au poste d’ambassadeur aux Nations unies n’est pas encore certaine. Quant à la confirmation des juges de cour d’appel, elle s’achemine vers un dénouement, peut-être dès mardi 24 mai, qui risque de voir un changement historique des règles de procédure au Sénat et une victoire à la Pyrrhus pour les républicains.

L’un des projets de loi sur les cellules souches que M. Bush refuse de signer est actuellement à l’étude à la Chambre des représentants. Le texte autorise le financement de recherches sur des embryons surnuméraires obtenus dans le cadre de traitements pour la fertilité et qui risquent de toute façon d’être éliminés.

LE PREMIER VETO

"Je suis un grand partisan de la recherche sur les cellules souches adultes, déclare le président. Mais j’ai dit très clairement au Congrès que j’étais opposé à l’utilisation de l’argent du contribuable pour faire avancer une science qui détruit la vie afin de la sauver. Donc si c’est ce que dit le projet, j’y mettrai mon veto." Pour lui, aucune subvention fédérale ne doit financer de recherches sur les cellules souches embryonnaires utilisant des lignées établies après le 9 août 2001.

En cas de refus, ce serait le premier veto de la présidence Bush. Les républicains avaient jusqu’alors évité de se déchirer sur cette question, sans cacher leurs divergences. Certains, avec Nancy Reagan, souhaitent encourager la recherche, afin de lutter contre des maladies dégénératives, comme la maladie d’Alzheimer. L’ancien sénateur républicain et ambassadeur à l’ONU John Danforth est aussi de cet avis. A l’instar de Ted Kennedy, il a reproché au président sa position. "Il n’y a qu’un seul argument contre la recherche sur les cellules souches, c’est celui de satisfaire les exigences de la droite religieuse", a-t-il dit.

Une autre mesure de l’influence de la droite fondamentaliste devrait être prise mardi au Sénat. L’enjeu est la nomination de juges qui sont notoirement opposés à l’avortement. Après des semaines de débats, le chef de la majorité républicaine, Bill Frist, a annoncé qu’il demandera un vote sur la confirmation de la juge Priscilla Owen, bloquée depuis trois ans par les démocrates. Ceux-ci ont normalement droit de recourir à la "flibuste" , une technique d’obstruction qui leur permet d’empêcher une nomination qui leur paraît dangereuse (les juges d’appel sont nommés à vie). Mais les républicains entendent changer la procédure et considérer que 51 voix suffisent pour interrompre ce flibuster (contre 60 normalement).

Une tentative de compromis de sénateurs centristes pourrait encore faire échouer ce scénario, dit de "l’option nucléaire" . Ils ont discuté pendant trois jours des conséquences d’un tel geste, qui modifierait la nature de leur mission consistant à trouver des compromis.

L’"option nucléaire" est le scénario dont rêve la droite fondamentaliste : elle créerait un précédent qui pourra se révéler utile lorsque devront être confirmés les candidats à la Cour suprême.

Par Corine Lesnes, lemonde.fr