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Alger et son patrimoine

vendredi 23 avril 2004, par Hassiba

Ainsi, à travers l’évolution de son nom, Icosim par les Phéniciens, Icosium par les Romains, Alger indique bien les itinéraires de son empreinte identitaire où la Méditerranée demeure au centre de son histoire. Selon Ibn Khaldoun, les premiers habitants d’Alger furent les Banu Mezghenna, l’une des tribus berbères sanhadjias

Concernant le vieux bâti de l’ancienne médina intra-muros qu’est La Casbah d’aujourd’hui, beaucoup de gens pensent que celui-ci fut construit par les Ottomans. Si El Djazaïr, qu’on aime à appeler El Mahroussa, et les différents palais construits çà et là en son sein ont été érigés pendant la présence ottomane, les anciennes demeures du vieil Alger ou douérate sont de typologie traditionnelle autochtone d’inspiration berbéro-mauresque, à l’image de celles construites à Koléa, Dellys, Miliana ou Médéa avec un patio et un seul niveau. Il faut bien souligner aussi que lors de la période ottomane, Alger avait été ébranlée par trois tremblements de terre dont celui de 1716, qui avait détruit aux trois quarts la médina.

Selon Mohamed Benmedour, chargé des études historiques et de la communication à l’Agence nationale d’archéologie (ANA) « les constructions ont été érigées après le séisme, selon le même cachet architectural, en ajoutant deux autres niveaux et une terrasse (El menzah) ». Il va sans dire que la colonisation française procéda dès 1830 à des destructions dans La Casbah dont la superficie s’étalait sur 44 ha et qui regroupait environ 8 000 maisons, un tissu urbain délimité à l’est et à l’ouest par un double rempart.

De 8000 à 800 bâtisses
Mais au fil des ans, Alger sortit de ses remparts que l’on finit par détruire, à l’initiative d’une politique d’urbanisation de type colonial, en détruisant une bonne partie de l’ancienne médina ou en interférant dans le style architectural des maisons autochtones avec un bâti colonial notamment le long des axes principaux (boulevard de la Victoire, la rue de la Lyre, la rue de Chartres, la rue Randon). Faut-il préciser aussi que des 2 000 demeures qui existaient en 1962 dans La Casbah d’Alger, classée patrimoine mondial depuis 1992, il n’en restait que 1860 en 1980 avant de voir le nombre réduit presque de moitié, soit 800 bâtisses au 31 décembre 2003.

Quant au témoignage des sites et monuments historiques, ces derniers constituent autant d’éléments physiques de notre mémoire qu’il s’agit de conserver et de protéger des outrages du temps. Dès lors, il ne s’agit pas d’énumérer la centaine sinon plus des lieux de culte (mesdjeds, djemaâs et zaouïas) démolis pendant la colonisation, le millier de maisons hispano-mauresques détruites ou les dizaines de foudouks, hammams, fontaines, moulins et fourns disparus, mais de préserver et mettre en valeur ce qui reste comme patrimoine qu’il serait salutaire de capitaliser.

Combien reste-t-il de ces monuments, classés ou présentant l’intérêt historique et l’identité nationale, sur lesquels la wilaya d’Alger et le ministère de la Communication et de la Culture se penchent pour leur restauration ?

Aussi, n’est-il pas regrettable de constater l’absence de synergie et de coopération entre les directions d’urbanisme et les spécialistes de l’Agence nationale d’archéologie quant aux différentes interventions de préservation
des sites ou aux fouilles archéologiques ? Car les exemples sont légion s’agissant de la négligence, voire du piétinement de certains monuments et sites comme l’abandon du Fort turc de Bordj El Kiffan, la ville d’Ibn Mezghenna qui voit ces dernières années un pan de son patrimoine en chantier. Ainsi, après les villas Abdeltif et Mahieddine qui sont en cours de restauration, d’autres palais dans la vieille médina sont l’objet de réhabilitation de la mémoire comme Dar Essouf, Dar El Cadi, Dar Mustapha Pacha, Dar El Hamra et surtout « la citadelle dont les travaux de réhabilitation sont menés à pas comptés, et ce, au regard des lentes opérations de restauration qui ne sont qu’à 20% depuis l’évacuation des squatters en 1975 », nous confie le directeur général de l’ANA, Abdelkader Guessab, en attendant, ajoute-t-il, l’enveloppe promise des deux milliards de dinars qui doit être débloquée ultérieurement pour poursuivre l’opération.

Par Madjid T., El watan