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Al-Jazira interdite en Iran

mercredi 20 avril 2005, par Stanislas

La chaîne de télévision qatarie Al-Jazira a "regretté", lundi 18 avril, la décision "injustifiée" du gouvernement iranien de fermer son bureau à Téhéran.

Appelant les autorités iraniennes à revoir leur décision,

Al-Jazira interdite en Iran pour sa couverture des affrontements au Khouzistan.

la chaîne arabe affirme qu’elle poursuivra "sa ligne éditoriale fondée sur la diversité des opinions et sa couverture de l’actualité en Iran en toute objectivité et de manière équilibrée". Le gouvernement iranien a décidé cette fermeture "provisoire" en accusant Al-Jazira de "subversion", à la suite des affrontements ethniques qui, au Khouzistan, dans le sud-ouest du pays, à proximité de la frontière irakienne, ont fait trois morts. "Cette suspension durera le temps nécessaire pour que nos experts examinent le rôle éventuel que la chaîne Al-Jazira a joué pour inciter des éléments subversifs à déclencher les troubles qui se sont produits dans la ville d’Ahvaz", a déclaré Mohammad Hossein Khoshvaght, directeur général du ministère de la culture et de la guidance islamique, qui est chargé de superviser la presse étrangère en Iran. Il a précisé qu’il attendait "des explications claires" des responsables de la chaîne sur la façon dont les événements ont été couverts.

Deux cents personnes ont été arrêtées à la suite des heurts entre la majorité arabe du Khouzistan iranien et les forces de police, a déclaré le porte-parole du ministère de l’intérieur, Jahanbakhsh Khanjani. Le ministre des renseignements, Ali Younessi, a souligné que "tous les fauteurs de troubles" ont été appréhendés, et a accusé Al-Jazira d’avoir provoqué ces incidents par sa couverture des événements. Selon M. Younessi, il est apparu que les instigateurs des troubles "étaient liés aux groupes et aux télévisions subversifs", qualificatif employé pour désigner tous les partisans d’un renversement du régime islamique.

Les heurts se sont produits, vendredi 15 avril, entre les forces de sécurité et la population arabe d’Ahvaz, majoritaire dans cette ville, mais qui ne représente que 3 % de la population iranienne totale, d’environ 70 millions d’habitants. Al-Jazira a été l’une des premières chaînes à faire état de ces heurts. Ses journalistes ont rapidement parlé de trois morts alors que les autorités ne faisaient état que d’une seule victime, et ils ont présenté les troubles comme étant de nature séparatiste. Al-Jazira a cité le Front populaire et démocratique des Arabes d’Ahvaz, établi à Londres, une organisation interdite en Iran, lequel parle de quatre-vingts années "d’occupation iranienne" du Khouzistan. Un représentant du Front, cité par la chaîne sur son site, a évoqué un projet "d’épuration ethnique" matérialisé par un courrier, prétendument officiel, qui a circulé dans la province.

C’est ce document qui aurait mis le feu aux poudres. Les autorités iraniennes sont très sourcilleuses sur ces questions, au point de s’indigner de l’appellation "golfe Arabo-Persique" pour "golfe Persique". Elles le sont encore plus parce que la province est celle que l’ex-président irakien Saddam Hussein, grand ennemi de l’Iran, appelait "l’Arabistan". Il avait juré de la "libérer" lorsqu’il avait commencé son offensive contre l’Iran, en 1980.

Les autorités ont affirmé catégoriquement que la lettre demandant de modifier la composition ethnique de la province était un faux. "Tous ces troubles sont survenus à cause d’une lettre falsifiée attribuée au bureau de la présidence de la République, mais quiconque a travaillé dans une administration sait qu’il s’agit d’un faux", a déclaré M. Younessi. Ce faux a été attribué à l’ancien vice-président Mohammad-Ali Abtahi, mais ce dernier a démenti. A la suite des heurts, les députés de la province du Khouzistan avaient demandé, dans une lettre au ministère de la culture, "des mesures contre Al-Jazira et l’expulsion des représentants de la chaîne, qui a joué un rôle important dans les troubles"

Source : AFP