En 1966, quatre bombes nucléaires sont tombées par accident sur le village espagnol de Palomares sans faire — miraculeusement — de victime. Dans les mois qui ont suivi, l’armée américaine a déclenché un protocole d’urgence pour retrouver les têtes nucléaires.
Plus de quatre-vingts jours d’angoisse. Le 7 avril 1966, il y a près de soixante ans, l’armée américaine retrouvait la dernière tête nucléaire perdue quelques semaines auparavant, plaçant le village espagnol de Palomares en alerte maximale.
L’accident a lieu le 17 janvier de la même année, rapporte la BBC. À l’époque, la Guerre froide fait rage et les relations entre les États-Unis et l’URSS sont exécrables. Pour dissuader son adversaire de déclencher une guerre nucléaire, Washington a mis en place l’opération « Chrome Dome » : douze avions B-52 Stratefortress survolent en permanence l’Europe, du cercle Arctique à la mer Méditerranée, équipés d’armes nucléaires.
Pour assurer leur mission jusqu’au bout, ces avions ont besoin de se fournir en carburant en plein vol. Mais ce 17 janvier, le B-52 qui survole l’Espagne arrive trop rapidement et entre en collision avec l’aéronef censé le réapprovisionner. Le tanker s’enflamme, tuant toute l’équipe à son bord. Le B-52 est aussi en flammes : trois soldats meurent, quatre autres réussissent à s’éjecter. L’avion explose quelques secondes après. Son chargement amorce une chute libre de 9,5 km : quatre bombes thermonucléaires, cent fois plus puissantes que la bombe d’Hiroshima, s’abattent sur le petit village espagnol de Palomares.

De la poussière de plutonium, hautement radioactive, se déploie
Heureusement, aucune des quatre bombes ne se déclenche : les têtes nucléaires ne sont pas armées et des dispositifs de sécurité empêchent une mise à feu incontrôlée. Mais l’accident fait des dégâts dans ce petit village isolé. Si l’une des ogives est retrouvée intacte dès le lendemain, grâce au déploiement de parachutes intégrés qui l’amènent à se poser doucement à proximité d’une rivière, deux autres explosent sous l’impact. Un cratère se forme, et de la poussière de plutonium hautement radioactive se disperse sur plusieurs centaines d’hectares. La dernière reste portée disparue.
Dans le village, l’armée américaine se déploie en urgence. Partout se murmurent les mots « broken arrow », le nom de code américain des accidents nucléaires. L’armée américaine retrouve rapidement les trois premières bombes. 700 soldats et scientifiques américains arrivent sur place pour contenir la pollution, et retrouver la dernière ogive qui manque à l’appel. Les hommes organisent des battues et parcourent la zone en rangs serrés. Des soldats équipés de compteurs Geiger, qui mesurent la radioactivité, arrivent sur place : dans les zones lourdement contaminées par le plutonium, il faut dépolluer. On enlève jusqu’à 7 cm de terre. En tout, 1 400 tonnes de terres irradiées sont renvoyées aux États-Unis dans des barils scellés.

L'épave du B-52G 58-0256 à Palomares, Espagne, janvier 1966.
La bombe avait coulé par 860 mètres de fond
La recherche aura duré près de trois mois avant que la dernière bombe nucléaire ne soit retrouvée. C’est l’un des pêcheurs témoins de la scène, qui avait secouru l’équipage du B-62, qui a mis l’armée américaine sur la piste : il avait cru voir un cinquième soldat de l’US Air Force tomber en mer le jour de l’accident. C’était en fait la bombe, qui a coulé par 860 mètres de fond. L’arme est délicatement remontée, puis définitivement désarmée à bord de l’USS Petrel.
L’accident a laissé des traces. Un traumatisme d’abord pour ces villageois du sud-est de l’Espagne. « Il y avait beaucoup de pierres et de débris qui tombaient autour de nous. […] Il y a eu une terrible explosion. Nous avons cru que c’était la fin du monde », a confié à la BBC une femme, témoin de l’accident. Mais l’armée américaine a aussi laissé un autre héritage, funeste et durable. Des mesures de radioactivité ont été régulièrement menées depuis 2004 dans cette zone de la province d’Almeria. Elles ont révélé une contamination persistante du sol, de l’eau et des cultures dans les zones touchées par les deux explosions. Un accord de dépollution, signé par l’Espagne et les États-Unis en 2015, n’a pas été suivi d’effets. 40 hectares demeurent, aujourd’hui, entièrement fermés au public.
ouest-france.fr
Plus de quatre-vingts jours d’angoisse. Le 7 avril 1966, il y a près de soixante ans, l’armée américaine retrouvait la dernière tête nucléaire perdue quelques semaines auparavant, plaçant le village espagnol de Palomares en alerte maximale.
L’accident a lieu le 17 janvier de la même année, rapporte la BBC. À l’époque, la Guerre froide fait rage et les relations entre les États-Unis et l’URSS sont exécrables. Pour dissuader son adversaire de déclencher une guerre nucléaire, Washington a mis en place l’opération « Chrome Dome » : douze avions B-52 Stratefortress survolent en permanence l’Europe, du cercle Arctique à la mer Méditerranée, équipés d’armes nucléaires.
Pour assurer leur mission jusqu’au bout, ces avions ont besoin de se fournir en carburant en plein vol. Mais ce 17 janvier, le B-52 qui survole l’Espagne arrive trop rapidement et entre en collision avec l’aéronef censé le réapprovisionner. Le tanker s’enflamme, tuant toute l’équipe à son bord. Le B-52 est aussi en flammes : trois soldats meurent, quatre autres réussissent à s’éjecter. L’avion explose quelques secondes après. Son chargement amorce une chute libre de 9,5 km : quatre bombes thermonucléaires, cent fois plus puissantes que la bombe d’Hiroshima, s’abattent sur le petit village espagnol de Palomares.
De la poussière de plutonium, hautement radioactive, se déploie
Heureusement, aucune des quatre bombes ne se déclenche : les têtes nucléaires ne sont pas armées et des dispositifs de sécurité empêchent une mise à feu incontrôlée. Mais l’accident fait des dégâts dans ce petit village isolé. Si l’une des ogives est retrouvée intacte dès le lendemain, grâce au déploiement de parachutes intégrés qui l’amènent à se poser doucement à proximité d’une rivière, deux autres explosent sous l’impact. Un cratère se forme, et de la poussière de plutonium hautement radioactive se disperse sur plusieurs centaines d’hectares. La dernière reste portée disparue.
Dans le village, l’armée américaine se déploie en urgence. Partout se murmurent les mots « broken arrow », le nom de code américain des accidents nucléaires. L’armée américaine retrouve rapidement les trois premières bombes. 700 soldats et scientifiques américains arrivent sur place pour contenir la pollution, et retrouver la dernière ogive qui manque à l’appel. Les hommes organisent des battues et parcourent la zone en rangs serrés. Des soldats équipés de compteurs Geiger, qui mesurent la radioactivité, arrivent sur place : dans les zones lourdement contaminées par le plutonium, il faut dépolluer. On enlève jusqu’à 7 cm de terre. En tout, 1 400 tonnes de terres irradiées sont renvoyées aux États-Unis dans des barils scellés.

L'épave du B-52G 58-0256 à Palomares, Espagne, janvier 1966.
La bombe avait coulé par 860 mètres de fond
La recherche aura duré près de trois mois avant que la dernière bombe nucléaire ne soit retrouvée. C’est l’un des pêcheurs témoins de la scène, qui avait secouru l’équipage du B-62, qui a mis l’armée américaine sur la piste : il avait cru voir un cinquième soldat de l’US Air Force tomber en mer le jour de l’accident. C’était en fait la bombe, qui a coulé par 860 mètres de fond. L’arme est délicatement remontée, puis définitivement désarmée à bord de l’USS Petrel.
L’accident a laissé des traces. Un traumatisme d’abord pour ces villageois du sud-est de l’Espagne. « Il y avait beaucoup de pierres et de débris qui tombaient autour de nous. […] Il y a eu une terrible explosion. Nous avons cru que c’était la fin du monde », a confié à la BBC une femme, témoin de l’accident. Mais l’armée américaine a aussi laissé un autre héritage, funeste et durable. Des mesures de radioactivité ont été régulièrement menées depuis 2004 dans cette zone de la province d’Almeria. Elles ont révélé une contamination persistante du sol, de l’eau et des cultures dans les zones touchées par les deux explosions. Un accord de dépollution, signé par l’Espagne et les États-Unis en 2015, n’a pas été suivi d’effets. 40 hectares demeurent, aujourd’hui, entièrement fermés au public.
ouest-france.fr
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