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Bébés à la rue à Lyon : à qui la faute ?

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  • Bébés à la rue à Lyon : à qui la faute ?


    Plusieurs cas de mères à la rue avec des bébés âgés de quelques jours ont été documentés à Lyon ces dernières semaines. Alors que l’État et la métropole se renvoient la responsabilité, travailleurs sociaux et collectifs militants se désespèrent d’une situation « jamais vue ».


    Lyon (Rhône).– À la question « qu’est-ce qui vous fait honte dans votre ville ? », posée en 2020 par Paris Match, le président de la métropole de Lyon, Bruno Bernard, répondait : « Les enfants qui dorment dehors. » Quatre ans plus tard, malgré le fort investissement de la majorité écologiste sur le sujet de l’hébergement d’urgence, ce sont désormais des bébés, âgés seulement de quelques jours, qui grandissent à la rue.

    De mémoire de travailleurs sociaux, on n’avait jamais vu ça. « Toutes les mères enceintes sont remises à la rue après la maternité, qu’elles soient en couple ou isolées », raconte une professionnelle de la Métropole, atterrée par la situation.

    Plusieurs cas ont été documentés par la presse ces dernières semaines. Rue89Lyon a notamment rencontré la mère d’un bébé de 5 jours, restée sans solution d’hébergement après son accouchement par césarienne, alors qu’elle était jusqu’alors prise en charge par la Métropole.

    Agrandir l’image : Illustration 1Manifestation du collectif Solidarité entre femmes à la rue, le 14 août 2024, à Lyon. © Photo : Compte X @jamaissanstoit
    Le 16 août, sur son compte LinkedIn, Maud Bigot, la directrice du Samu social lyonnais (le 115, géré par l’association Alynea), a aussi dénoncé la remise à rue d’une mère avec un bébé de 11 jours. « Je me demande ce que c’est que de découvrir la rue depuis le bitume. (…) J’ai tellement honte », a‑t‐elle écrit sur le réseau social, dans un post abondamment relayé et commenté.

    Auprès de Mediacités, Juliette Murtin, militante du collectif Solidarité femmes à la rue, confirme avoir constaté la remise à la rue « de quatre ou cinq femmes » avec des enfants de moins de deux semaines, et se dit inquiète au sujet de plusieurs autres accouchements prévus à la fin du mois d’août. « Jusqu’à présent, ils gardaient les mères un ou deux mois. Là, elles n’ont aucune solution », déplore‐t‐elle. Comment en est‐on arrivé là ?

    Le coup de frein de la Métropole…


    Ces situations sont directement liées à une décision prise par la métropole de Lyon en juillet dernier, que Mediacités avait détaillée à l’époque. Au début de l’été, la collectivité a brutalement décidé de suspendre toute nouvelle entrée dans son dispositif d’hébergement. En théorie, le Grand Lyon est compétent pour mettre à l’abri les femmes enceintes, les mères isolées avec enfant de moins de trois ans, ou les mineur·es isolé·es. Les autres situations, notamment les familles avec des enfants en bas âge, relèvent normalement de l’État, via les services de la préfecture.

    Mais, depuis plusieurs années, la métropole prend en charge des cas qui relèvent en théorie de l’État – 40 % des situations selon un chiffre de 2022 fourni par la collectivité. En compensation, elle réclame en vain une aide financière. Elle accuse aussi les départements limitrophes, comme l’Ain ou la Loire, de mener des politiques beaucoup plus restrictives en matière d’hébergement d’urgence, ce qui entraîne une accumulation des demandes sur le territoire lyonnais.

    Confrontée à des difficultés budgétaires, la majorité écologiste et de gauche a décidé de couper dans sa politique d’hospitalité, qui était pourtant l’un de ses marqueurs politiques forts depuis son arrivée au pouvoir en 2020. L’exécutif de Bruno Bernard poursuit ainsi son bras de fer engagé avec l’État depuis plusieurs années, en espérant le forcer à déployer de nouveaux moyens pour mettre à l’abri les publics les plus fragiles. Avec une nouveauté toutefois : désormais, la collectivité refuse de prendre en charge des publics qui relèvent pourtant bien de sa compétence.

    Le 22 août, les sept députés de gauche du Rhône ont écrit à plusieurs ministres démissionnaires pour demander la mise à l’abri d’urgence des familles avec des enfants de moins d’un an, notamment en réquisitionnant des logements vacants. Selon les parlementaires, l’arrêt des nouvelles prises en charge de sans‐abri par la Métropole est « la conséquence tragique et directe de la politique gouvernementale actuelle », notamment de l’austérité budgétaire décidée par Bercy qui plombe son budget.

    …et le durcissement de la préfecture


    Lundi 26 août, c’était au tour du maire de Lyon, Grégroy Doucet, d’exhorter sur BFM les services de la préfecture à prendre leurs responsabilités. « C’est d’abord à l’État de proposer des solutions. On ne laisse pas un nourrisson de quatre jours à la rue, ce n’est pas possible », a dénoncé l’élu écologiste.

    Selon le maire de Lyon, les services de la préfecture ont décidé au début de l’été « de mettre en place un nouveau critère de vulnérabilité qui les a conduits à estimer qu’un nourrisson de quelques jours ne rentrait plus dans ces critères et pouvait être laissé sans solution ». Une affirmation confirmée par Juliette Murtin : « Avant [depuis 2019], une famille avec un enfant de moins d’un an était hébergée en priorité. Maintenant, il faut un autre critère comme un problème de santé ou de sécurité », explique la militante.

    Interrogée par Mediacités, la préfecture affirme quant à elle que ces critères de « mise à l’abri immédiate (…) ont été modifiés en réaction, considérant la tension supplémentaire sur la demande hébergement suite à la décision de la Métropole ». Autrement dit, l’État aurait été contraint de prioriser pour compenser la baisse de régime du Grand Lyon. Au passage, la préfecture rappelle que le parc d’hébergement d’urgence « a presque doublé » en dix ans pour atteindre 8 000 places dans le Rhône et la métropole.

    « La situation n’est pas acceptable », a estimé Bruno Bernard mardi 27 août, interviewé par BFM Lyon. Selon le président de la Métropole, la crise actuelle s’expliquerait d’abord par le manque de politique nationale de lutte contre le sans‐abrisme. Il a notamment évoqué la trop faible production de logements sociaux, les non‐régularisations de migrant·es et, surtout, le manque de places d’hébergement d’urgence créées par l’État.

    « La volonté de la Métropole est de continuer à aider », a‑t‐il déclaré en rappelant que sa collectivité gère actuellement 430 places « qualitatives » et doit en ouvrir 92 « à la fin du mois ». Mais, ajoute Bruno Bernard, le Grand Lyon souhaite aussi « arrêter d’avoir du monde dans les hôtels parce qu’ils sont mal accueillis et parce que ça coûte très cher ». En juillet dernier, près de 800 personnes étaient hébergées dans des hôtels par la collectivité.

    « Le résultat, c’est que tout le système est en train de se gripper, regrette la travailleuse sociale déjà citée plus haut. La Métropole ne met plus à l’abri, l’État ne met pas plus de moyens. Et on ne sait pas jusqu’à quand cette suspension va s’appliquer. »

    Des divisions politiques internes ?


    Au‐delà de ce jeu de ping‐pong entre l’État et la Métropole, le calendrier choisi par l’exécutif du Grand Lyon interroge. Mettre la pression sur l’État alors que le gouvernement démissionnaire n’est pas en position de prendre des arbitrages semble peu judicieux. La décision de couper les vannes de l’hébergement, prise en catimini et dont les raisons ont été peu assumées par les élu·es, attise par ailleurs des tensions politiques, en interne, entre Bruno Bernard et son vice‐président chargé du logement, Renaud Payre.

    Envoyé au casse‐pipe devant la presse pour défendre la position de la Métropole pendant l’été (il a assuré que la collectivité avait préservé l’existence de 12 sites d’hébergement et de 300 places d’hôtel), Renaud Payre commence à afficher certaines ambitions personnelles. Le 5 septembre, l’ancien directeur de Sciences Po Lyon lancera officiellement un nouveau mouvement politique, baptisé Voix commune. Une première étape en vue d’une candidature métropolitaine en 2026 ? Avec son initiative, le vice‐président au logement esquisse en tout cas une ligne sociale plus marquée que celle de Bruno Bernard, réputé moins sensible à ces enjeux.

    « Il existe un bras de fer entre Bruno Bernard, qui a pris cette décision sur l’hébergement d’urgence, et Renaud Payre qui reste loyal pour le moment mais est en désaccord avec ce choix », estime un professionnel qui a suivi de près le sujet au Grand Lyon. « Sur le fond, les écologistes ont raison de dire que la situation n’est pas tenable et de mettre la pression sur l’État. Mais remettre des bébés à la rue, avec une consigne politique aussi claire, c’est du jamais vu. Les services du Grand Lyon sont mal à l’aise », observe notre interlocuteur. Sollicité via le service presse de la Métropole, Renaud Payre n’a pas répondu à notre demande d’interview.

    Le sujet a aussi provoqué quelques remous au sein de l’aile gauche de la majorité métropolitaine. Dès le mois de juillet, Nathalie Perrin‐Gilbert, ex‐adjointe à la culture de la ville de Lyon et conseillère au Grand Lyon, a fait savoir sur le réseau social X qu’elle se désolidarisait « de cette orientation politique particulièrement cynique ». De son côté, le groupe Insoumis rappelle dans un communiqué que « la protection de l’enfance n’est pas un sous‐droit fluctuant selon les moyens disponibles. Etablir un plafond d’allocataires RSA ou d’élèves au collège n’aurait aucun sens ». Pour autant, les quatre élus du groupe estiment qu’il est « encore l’heure du travail collectif » et estiment que la Métropole est déjà « très volontariste (…) là ou la droite et l’ensemble des départements alentours ont démissionné ».

    Une crise qui pourrait encore s’aggraver


    En attendant une clarification politique, l’inquiétude est grande parmi les professionnel·les et les militant·es de collectifs locaux. Avec la fin de l’été, le nombre de sans‐abri devrait augmenter, d’autant que deux squats qui hébergent aujourd’hui près de 150 personnes risquent d’être expulsés dans les prochains mois.

    Le premier se trouve rue Neyret, dans les Pentes de la Croix‐Rousse. Près de 70 mineur·es non accompagné·es y dorment, dans un bâtiment appartenant à la congrégation chrétienne des Lasalliens. L’expulsion est prévue le 31 août, sans que l’on sache si la Métropole a prévu une prise en charge pour ces jeunes, qui relèvent clairement de sa compétence.

    Dans le second, quai Arloing, dans le 9e arrondissement, près de 80 femmes et enfants se sont installées dans un bâtiment du Grand Lyon, à l’initiative du collectif Solidarité entre femmes à la rue. Ils seront fixés sur leur sort le 13 septembre. Devant le tribunal judiciaire de Lyon, l’avocat du bailleur social a demandé que le délai de deux mois entre le jugement et l’expulsion ne s’applique pas, ce qui entraînerait le départ des occupantes avant le début de la trêve hivernale.

    Avant d’investir ce bâtiment, le collectif avait tenté à deux reprises d’occuper des gymnases de Lyon, avant d’être expulsés par les forces de l’ordre. En juin, l’adjointe au maire déléguée aux solidarités, Sandrine Runel, avait évoqué avec les militantes un projet d’ouverture d’un lieu d’hébergement d’une soixantaine de places dans un bâtiment de la SNCF à Vaise. Depuis, celle‐ci a été élue députée et « le projet est resté lettre morte », indique Juliette Murtin. Et la militante de s’interroger à voix haute : « Qu’est-ce qu’il va se passer ensuite ? On va laisser des bébés dehors en novembre ? »

    Mathieu Périsse (Médiacités Lyon)

    وألعن من لم يماشي الزمان ،و يقنع بالعيش عيش الحجر

  • #2
    Il faudrait que Tebboune soit président de la France , il leur construirait des millions de logements comme en Algérie .
    J'ai désiré et demandé la beauté dans ce bas monde , on m'a montré et donné la laideur de ce bas monde.
    aristochat.

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