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De longue date, une solidarité à l’égard de la cause palestinienne s’exprime en France, particulièrement chez les musulmans. Communauté de foi, arabité, mais aussi même sentiment d’être « marginalisés »… Regards croisés de deux politologues.
Une manifestation de « soutien au peuple palestinien » devait être organisée samedi 28 octobre à Paris, à l’appel du collectif Urgence Palestine. Mais elle a été annulée, jeudi 26 octobre, par le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez. « Ce n’est pas une manifestation statique, c’est une déambulation dans Paris, toujours beaucoup plus risquée », a-t-il fait valoir sur France Info. « Et les organisations qui ont déposé cette déclaration, par les propos qu’elles ont pu tenir, pouvaient laisser à penser qu’elles étaient quand même en soutien au Hamas, et donc j’interdirai cette manifestation », a-t-il annoncé.
Dimanche dernier, des milliers de manifestants pro-palestiniens s’étaient déjà rassemblés dans le calme, à Paris pour demander l’arrêt des opérations militaires d’Israël à Gaza, à l’appel d’un collectif.
De longue date, une solidarité s’exprime en France à l’égard de la cause palestinienne, particulièrement chez les musulmans, que l’on estime de 5 à 6 millions. La cause palestinienne « a toujours été relayée, notamment dans le monde associatif immigré, avant même l’organisation de l’islam en France », explique Franck Fregosi, directeur de recherches au CNRS, spécialiste de l’islam.
Elle l’a aussi été « dans les milieux de gauche et notamment les communistes ». Aujourd’hui, cette solidarité est surtout portée par les musulmans et notamment les jeunes. D’autres causes (la Bosnie, la Syrie, les Rohingyas en Birmanie…) ont mobilisé, mais sans parvenir à « supplanter la cause palestinienne dans le cœur et dans l’imaginaire de bon nombre de musulmans », constate le chercheur.
« Communauté de foi »
Pourquoi les musulmans français sont-ils particulièrement sensibles au sort des Palestiniens ? Il y a naturellement une « communauté de foi entre les musulmans d’ici et les musulmans de là-bas », analyse d’abord Haoues Seniguer, maître de conférences à Sciences Po Lyon. Jérusalem occupe, en plus, une « place prééminente dans l’imaginaire musulman ». Si aujourd’hui, les musulmans tournent leur visage vers la Mecque (en Arabie Saoudite, N.D.L.R.) pour prier, « avant, à une époque très lointaine, ils se tournaient vers Jérusalem ».
Outre « l’arabité » qui les relie, il y a aussi une « dimension coloniale et post-coloniale qui traverse les deux communautés, en France et en Palestine, explique Haoues Seniguer. D’un côté, les Palestiniens, sans État, sont colonisés en Cisjordanie et Gaza subit un sévère blocus depuis 2007. De l’autre, les ascendants des musulmans en France ont eu à subir, en Algérie, au Maroc, en Tunisie, l’État colonial français. Ces ressacs de mémoire coloniale restent présents. »
« Cause-miroir »
Franck Fregosi voit, aussi, s’exprimer une « cause miroir » : les musulmans de France ont tendance à s’identifier à ce que vivent les Palestiniens. Même s’il n’y a « rien de comparable », souligne-t-il, ils sont reliés par le même sentiment d’être « marginalisés, minorés dans la société ». Il y a aussi une « fascination face à la résistance du peuple palestinien qui n’a jamais cessé de se battre depuis 1947 », poursuit le chercheur.
Cette solidarité à l’égard des Palestiniens va-t-elle jusqu’au soutien du Hamas ? « Cela peut arriver. Mais, rappelle Haoues Seniguer, beaucoup de musulmans connaissent le génocide des juifs et y sont sensibles. Et cette mémoire crée une communauté émotionnelle en France. À ces interdits moraux s’ajoutent des interdits légaux : les musulmans savent qu’on ne peut faire l’apologie du terrorisme en France, au risque d’avoir des ennuis avec la justice ».
Quant aux autorités musulmanes, elles sont sur un fil. Tout en affichant leur solidarité à l’égard de la cause palestinienne, elles veillent à « ne pas faire l’amalgame entre le Hamas et les Palestiniens, remarque Franck Fregosi. Elles sont prises en étau entre cette base militante de musulmans jeunes et revendicatifs et leur volonté de ne pas se mettre en porte-à-faux avec des pouvoirs publics aux aguets sur cette question ».
Ouest France
Une manifestation de « soutien au peuple palestinien » devait être organisée samedi 28 octobre à Paris, à l’appel du collectif Urgence Palestine. Mais elle a été annulée, jeudi 26 octobre, par le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez. « Ce n’est pas une manifestation statique, c’est une déambulation dans Paris, toujours beaucoup plus risquée », a-t-il fait valoir sur France Info. « Et les organisations qui ont déposé cette déclaration, par les propos qu’elles ont pu tenir, pouvaient laisser à penser qu’elles étaient quand même en soutien au Hamas, et donc j’interdirai cette manifestation », a-t-il annoncé.
Dimanche dernier, des milliers de manifestants pro-palestiniens s’étaient déjà rassemblés dans le calme, à Paris pour demander l’arrêt des opérations militaires d’Israël à Gaza, à l’appel d’un collectif.
De longue date, une solidarité s’exprime en France à l’égard de la cause palestinienne, particulièrement chez les musulmans, que l’on estime de 5 à 6 millions. La cause palestinienne « a toujours été relayée, notamment dans le monde associatif immigré, avant même l’organisation de l’islam en France », explique Franck Fregosi, directeur de recherches au CNRS, spécialiste de l’islam.
Elle l’a aussi été « dans les milieux de gauche et notamment les communistes ». Aujourd’hui, cette solidarité est surtout portée par les musulmans et notamment les jeunes. D’autres causes (la Bosnie, la Syrie, les Rohingyas en Birmanie…) ont mobilisé, mais sans parvenir à « supplanter la cause palestinienne dans le cœur et dans l’imaginaire de bon nombre de musulmans », constate le chercheur.
« Communauté de foi »
Pourquoi les musulmans français sont-ils particulièrement sensibles au sort des Palestiniens ? Il y a naturellement une « communauté de foi entre les musulmans d’ici et les musulmans de là-bas », analyse d’abord Haoues Seniguer, maître de conférences à Sciences Po Lyon. Jérusalem occupe, en plus, une « place prééminente dans l’imaginaire musulman ». Si aujourd’hui, les musulmans tournent leur visage vers la Mecque (en Arabie Saoudite, N.D.L.R.) pour prier, « avant, à une époque très lointaine, ils se tournaient vers Jérusalem ».
Outre « l’arabité » qui les relie, il y a aussi une « dimension coloniale et post-coloniale qui traverse les deux communautés, en France et en Palestine, explique Haoues Seniguer. D’un côté, les Palestiniens, sans État, sont colonisés en Cisjordanie et Gaza subit un sévère blocus depuis 2007. De l’autre, les ascendants des musulmans en France ont eu à subir, en Algérie, au Maroc, en Tunisie, l’État colonial français. Ces ressacs de mémoire coloniale restent présents. »
« Cause-miroir »
Franck Fregosi voit, aussi, s’exprimer une « cause miroir » : les musulmans de France ont tendance à s’identifier à ce que vivent les Palestiniens. Même s’il n’y a « rien de comparable », souligne-t-il, ils sont reliés par le même sentiment d’être « marginalisés, minorés dans la société ». Il y a aussi une « fascination face à la résistance du peuple palestinien qui n’a jamais cessé de se battre depuis 1947 », poursuit le chercheur.
Cette solidarité à l’égard des Palestiniens va-t-elle jusqu’au soutien du Hamas ? « Cela peut arriver. Mais, rappelle Haoues Seniguer, beaucoup de musulmans connaissent le génocide des juifs et y sont sensibles. Et cette mémoire crée une communauté émotionnelle en France. À ces interdits moraux s’ajoutent des interdits légaux : les musulmans savent qu’on ne peut faire l’apologie du terrorisme en France, au risque d’avoir des ennuis avec la justice ».
Quant aux autorités musulmanes, elles sont sur un fil. Tout en affichant leur solidarité à l’égard de la cause palestinienne, elles veillent à « ne pas faire l’amalgame entre le Hamas et les Palestiniens, remarque Franck Fregosi. Elles sont prises en étau entre cette base militante de musulmans jeunes et revendicatifs et leur volonté de ne pas se mettre en porte-à-faux avec des pouvoirs publics aux aguets sur cette question ».
Ouest France
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