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"Flic": récit d'un journaliste infiltré dans la police en France

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  • "Flic": récit d'un journaliste infiltré dans la police en France

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    "Flic" : pourquoi le livre du journaliste Valentin Gendrot, infiltré dans la police parisienne, suscite la polémique
    Le reporter évoque notamment, dans son livre paru jeudi, la façon dont il a vu un adolescent roué de coups par un policier.

    Violences, insultes racistes, sexistes et homophobes, mais aussi manque de moyens des commissariats, suicide et mal-être des agents... Dans Flic, publié jeudi 3 septembre (éd. Goutte d'or), le journaliste Valentin Gendrot raconte deux années d'infiltration dans la police parisienne, et notamment dans le commissariat du 19e arrondissement, à Paris, de mars à août 2019. Si le livre a bénéficié d'une forte couverture médiatique, il est aussi controversé. En voici les raisons.

    Ce qu'on lui reproche. De n'avoir pas dénoncé des violences policières qu'il décrit dans son livre. La préfecture de police de Paris a d'ailleurs annoncé, jeudi 3 septembre, avoir signalé au procureur de la République aussi bien ces "faits supposés" que l'absence de signalement. Le parquet de Paris a annoncé vendredi avoir ouvert une enquête, confiée à l'IGPN, la "police des polices".

    "Afin d'établir la véracité des faits relatés dans ce livre et relayés par les médias, et à la demande du ministre de l'Intérieur, le préfet de Police, Didier Lallement, les a portés à la connaissance du procureur de la République et a saisi parallèlement à titre administratif l'Inspection générale de la police nationale", écrit-elle dans son communiqué. "L'enquête devra également déterminer les raisons pour lesquelles les faits supposés n'ont pas fait l'objet d'un signalement immédiat au Procureur", poursuit la préfecture de police.

    Ce que dit l'auteur. Valentin Gendrot assure avoir vu un policier rouer de coups un adolescent, puis établir un "PV mensonger". Il dit également avoir participé à ce "PV mensonger" visant à "absoudre le policier". Ce jour-là, sa patrouille est appelée par un voisin se plaignant de jeunes écoutant de la musique au pied d'un immeuble. Le contrôle dégénère quand l'un des policiers "tapote" la joue d'un adolescent qui, en réponse, provoque le fonctionnaire : "Je te prends en un contre un".

    Le policier met une première "baffe" au jeune homme "puis deux, puis trois, peut-être quatre ou cinq", écrit le reporter. L'agent "se déchaîne" ensuite à "coups de poing" et d'insultes sur l'adolescent, qui est embarqué au commissariat pour une vérification d'identité. Le policier porte alors plainte pour outrage et menaces, l'adolescent pour violences. Un PV "mensonger" est rédigé pour "charger le gamin" , affirme Valentin Gendrot, qui incriminera lui aussi l'adolescent lors d'une enquête interne. "A aucun moment il n'apparaît dans ce texte que le policer a frappé" le jeune homme, explique-t-il au site d'investigation Mediapart. Il précise aussi que le "PV mensonger" auquel il a participé est un "faux en écriture publique", considéré comme "un crime" passible de quinze ans de prison.

    Pourquoi n'a-t-il pas dévoilé la bavure au moment des faits ? L'auteur a expliqué à l'AFP avoir ainsi voulu pouvoir "dénoncer mille autres bavures de ce type", même si "ça a été une décision extrêmement compliquée".

    Ce qu'on lui reproche. D'avoir fait son enquête sans se signaler comme journaliste. Au sein de la profession, la méthode est dénoncée par certains, à l'instar de l'éditorialiste politique Dominique de Montvalon, comme "peu déontologique". La charte d'éthique professionnelle des journalistes, que l'on trouve sur le site du Syndicat national des journalistes, proscrit ainsi "tout moyen déloyal" pour se procurer des informations.

    Mais elle a été employée par des journalistes de renom comme Florence Aubenas (Le Monde) qui avait travaillé, sans mentionner son vrai métier, comme femme de ménage en Normandie pour écrire le récit Le Quai de Ouistreham. Plus récemment, rappelle le site Arrêt sur images, plusieurs "livres salués par la profession ont utilisé cette méthode d'enquête", tel "Steak Machine, de Geoffrey Le Guilcher (...), qui relate quarante jours d'infiltration dans un abattoir breton".

    Certains des anciens "collègues" policiers de Valentin Gendrot, avec qui il avait tissé des liens, lui ont aussi fait savoir qu'ils étaient "choqués" et "abasourdis" de cette dissimulation.

    Comment l'auteur se justifie. Comme d'autres journalistes ayant recouru à la même méthode, il estime que cette démarche lui a permis d'aller "là où personne ne va jamais". "Infiltrer la police, c'est une démarche lourde, cela permet d'aller là où personne ne va jamais, de montrer au grand public que si la police est la profession la plus contrôlée de France, il existe aussi des zones grises où personne n'a de contrôle sur ce qui se passe. Des zones grises, les interventions sous les radars sans que cela ne soit écrit ou dit sur les ondes police, cela existe et c'est ce que je raconte. Trois ou quatre passages à tabac de migrants sont passés sous les radars", a-t-il expliqué à franceinfo.

    Ce qu'on lui reproche. En substance, de dire ce que l'on savait déjà. Critique ainsi portée par cette journaliste sur Twitter.

    Coline Clavaud-Mégevand
    @colinecm
    3 sept. 2020
    "Est-ce que je suis à l'aise avec l'idée qu'un journaliste a infiltré la police, assisté au tabassage d'un ado noir puis fait de son "expérience" un livre choc ? Non.
    Dans les prochains jours, on va bcp parler du livre "Flic", sur Twitter et dans les médias tradi (déjà des contenus sur Médiapart et Konbini). La parole de Valentin Gendrot sera érigée en preuve que les violences policières sont racistes, systémiques... SAUF QU'ON LE SAIT DÉJÀ"

    Les violences policières ont été effectivement très documentées, notamment, depuis les manifestations des "gilets jaunes", par les enquêtes du journaliste indépendant David Dufresne publiées sur Mediapart. Autre exemple parmi d'autres, fin juillet, le site d'information en ligne Street Press a publié de son côté des révélations sur "des centaines de cas de maltraitance et de racisme dans les cellules du tribunal de Paris". Il n'y aurait donc pas de "scoop" à proprement parler dans le livre de Valentin Gendrot.

    Ce que répond l'auteur. "La police, dit-il dans une interview télévisée au site LeMediaTV, est un sujet extrêmement clivant. Il y a une partie de la population qui va soutenir la police et axer ses commentaires et ses remarques sur la dénonciation des conditions de travail des forces de l'ordre (...). Et il y a une autre partie de la population qui déteste la police et qui va plutôt dénoncer les violences policières. Moi ce qui m'intéressait, c'était d'aborder de plein fouet les deux grands tabous de la police, les violences policières et le mal-être policier". Il s'est attaché aussi, poursuit-il, à décrire "le quotidien d'un policier dans un commissariat parisien".

    Du coup, son travail au long cours s'intéresse aussi à des aspects moins connus de la police. Le journaliste se montre ainsi très critique sur la formation des policiers. C'est "une formation low-cost", déclare-t-il à franceinfo. "En trois mois, je suis sorti de l'école avec une habilitation pour porter une arme sur la voie publique. Je n'avais jamais touché une arme de ma vie avant".

    Interrogé par le site d"information et de loisirs Konbini, il précise qu'avant de travailler dans le commissariat du 19e arrondissement où il avait été nommé, il s'était rendu "sur YouTube pour trouver un tuto" expliquant "comment on met en service une arme de policier". "Parce que c'est quelque chose que j'avais complètement oublié depuis 15 mois", complète-t-il.

    Konbini news
    @konbininews
    C’est le tout premier journaliste à infiltrer la police. De sa "formation low cost" jusqu’à une "bavure", Valentin Gendrot raconte son enquête inédite pour comprendre les violences policières et le mal-être des agents. "


    On le savait déjà, mais les preuves manquaient car c'est la complcité et la loi du silence surtout si beaucoup de policiers votent extrême droite.
    Dernière modification par panshir, 05 septembre 2020, 16h58.

  • #2
    20minutes.fr

    "« A un certain moment, avec un certain policier, tout peut être permis », explique le journaliste Valentin Gendrot
    INTERVIEW Valentin Gendrot, journaliste spécialisé dans l’infiltration, raconte le racisme, la formation « low-cost », les violences et le mal-être des policiers dans son nouveau livre « Flic, un journaliste a infiltré la police »

    ......

    Ce qui est frappant dans votre livre, c’est la différence entre les textes de lois et le code de déontologie de la police qui encadre en principe la pratique du métier, et la réalité du terrain où on a l’impression que tout est permis. Comment l’expliquez-vous ?

    Tout n’est pas permis, parce que dans la majorité des opérations, les policiers doivent rendre compte de ce qu’ils font. Et c’est ce qu’ils font. Le problème, et c’est aussi ce que permet l’infiltration, c’est que j’ai eu accès à un certain nombre de zones grises. Des zones, un peu comme la téléphonie mobile et les zones blanches, où on ne capte plus parfois. Alors, on n’a plus cette obligation de rendre compte de ce qui se passe, et là tout est possible. Ces zones grises c’est par exemple, des moments en garde à vue.

    Pour les gardés à vue, vous pouvez tomber sur un policier violent qui va plus facilement frapper. Une garde à vue est parfois une zone de non-droit. Il y a aussi ces situations auxquelles j’ai assisté à 3 ou 4 reprises où il y a des migrants qui sont embarqués dans un fourgon, tabassés, et qu’on relâche à plusieurs kilomètres du lieu d’interpellation. L’infiltration permet d’accéder à ces zones grises. Tout n’est pas permis, mais à un certain moment, avec un certain policier, tout peut être permis.

    Cette infiltration vous a-t-elle fait changer d’opinion sur la police ?

    Je ne connaissais pas de policiers dans mon environnement personnel. Je n’avais pas d’avis favorable ou défavorable sur le métier de policier. Maintenant, ce que je connais du métier c’est que c’est un environnement anxiogène. Tous les jours vous côtoyez la violence. Dès 6 heures du matin, vous baignez dans l’odeur d’urine, d’excréments, de sueur… Il faut d’abord être armé psychologiquement avant d’avoir une arme de service. J’ai eu l’impression parfois qu’ils ne l’étaient pas assez parce qu’ils vivaient dans cette image idéale d’une police qui traque. Ce n’est pas ça être policier d’arrondissement, c’est beaucoup de postes où tous les jours vous restez au même endroit. Vous avez le temps de vous ennuyer, ce n’est pas de la grande police.

    J’ai une empathie pour ces policiers-là et j’essaye d’ailleurs tout au long du livre de comprendre leur environnement, leur vie. Je considère le métier de journaliste comme étant celui qui montre, raconte au grand public les choses qu’il ne pourrait pas voir autrement. Moi je me borne à rester à cette hauteur-là, je ne prétends pas révolutionner la police. J’espère juste qu’avec ce livre – mettre des mots, raconter les violences, raconter un suicide, essayer de comprendre… – que tout ça permette d’améliorer le rapport entre police et habitants, et aussi l’institution elle-même.

    La préfecture de police a signalé certains des faits de votre livre au procureur de la République, était-ce votre objectif ?

    Non, mon objectif, c’était de raconter. Forcément vous avez des choses qui ne plaisent pas à tout le monde et dans la police, un cas de violence policière c’est le sujet clivant. Il y en a qui vont dire que ça n’existe pas tandis que d’autres vont dire « regardez encore une ». Mon objectif c’était de montrer, raconter. Lors d’une infiltration vous prenez le train en route, vous ne savez pas sur quoi vous allez tomber, vous ne savez pas avec qui vous allez travailler, il y a énormément de données que vous ne maîtrisez pas.

    Je n’avais pas du tout cette idée d’arriver à une saisine de l’IGPN. Par contre, ce que je me suis dit quand j’ai vécu cette bavure [le passage à tabac d’un ado noir par un policier], c’est que c’était un choc d’un point de vue personnel. Je me suis aussi dit en tant que journaliste : je tiens de l’or. Parce que j’ai tous les éléments pour raconter une bavure, pour raconter cette histoire qui est d’une banalité assez confondante. Je fais le choix d’aller jusqu’au bout de la bavure parce que je me dis qu’en racontant tout, de A à Z, ça permet à terme de pouvoir en dénoncer pleins d’autres."

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