12 JUIN 2018 ÉDITION DU MATIN
À mesure que l’enquête amène ses réponses et qu’il apparaît clairement qu’il n’y a pas de trace de viol, les médias relayent non pas des informations mais du jugement, voire une forme de jubilation sur une personne qu’ils ne connaissent souvent qu’à travers leur propre média.
Pourquoi autant d’articles sur la vie privée d’un homme ? Rappelons que l’instruction est sujette au secret professionnel, mais qui s’en soucie ? Apparemment pas certains journalistes.
Si les psychologues témoignaient des Hommes, que diraient-ils ?
Si les psychologues devaient témoigner au sujet des hommes, que diraient-ils ? Certainement que tout être humain sur sa route est soumis à sa part humaine et terrestre. Le psychisme est fait de tensions, de luttes, d’épreuves, de difficultés, de compréhension de soi, des autres.
La chute fait partie du chemin. Personne ne sait la force de se relever s’il ne tombe pas lui-même. Personne ne sait s’il aurait fait mieux à la place de celui qu’il regarde, admire, ou déteste, souvent pour des raisons inconscientes de projection, d’identification ou d’image de soi.
La vie humaine est faite d’apprentissages. Et nul n’en parle mieux que celui qui passe par là et a conscience des ombres qui peuplent nos âmes. Rien n’est facile dans un vécu avec soi, sur la terre, avec les Hommes. Mais tout se transforme par l’effort, la patience, le temps et l’indulgence. Ce que les musulmans appellent Djihad an nafs , est une notion centrale qui implique que le rapport au monde passe par l’effort et la lutte que l’Homme livre avec lui-même pour avancer et rejoindre Dieu. Dans le Judaïsme cette notion existe aussi, c’est l’effort et non l’accomplissement d’un but qui importe. « Selon l’effort est la récompense », dit le Talmud. Intention, effort, on parle ici d’un chemin. Pendant qu'une certaine presse, elle, parle de ce qu'elle ne connait pas.
En psychologie, l’équivalent serait la compréhension de soi et de son vécu pour se libérer, petit à petit, de ses névroses, de ses questions, des zones de souffrance que nous traversons tous à un moment de notre vie. Personne n’avance sans turbulences. Toute vie est faite de questions, de doutes, de peurs, de confiance, d’amour et de haine, de colère et de tristesse. Nos vies ont mille couleurs et chaque couleur se transforme par le temps, la compréhension et l’acceptation que nous sommes ombre et lumière à la fois. La plus grande bataille de l’homme c’est lui-même. La plus grande force de l’homme, c’est sa capacité à l’avancement. La psychologie rend indulgent et aussi conscient que nous sommes des êtres en route et que notre route n’est jamais linéaire. Être un homme debout, c’est être conscient que tout peut arriver. L’important est de se comprendre et d’avancer. Se relever. Faire mieux.
Journalistes français, ne parlez pas au nom d’une communauté que vous instrumentalisez sans cesse
Alors, à tous ces journalistes qui se positionnent en « bonne morale » et parlent au nom des musulmans de France. Êtes-vous sûrs de celui ou celle que vous êtes dans votre vie privée ? Êtes-vous exempts de luttes ? Que dirait un ou une journaliste sur vous, s’il/elle avait accès à la clef de votre intimité ? Un peu de retenue dans les propos et de l’éthique dans la gestion de l’information.
Je finirai cette tribune sur un rappel aux journalistes peu éthique qui se positionnent en juge de la bonne morale. L’islam est une religion de miséricorde, de pardon et de la conscience que l’évolution de l’âme et de l’homme s’inscrivent dans une temporalité.
Tariq Ramadan a souvent dit qu’il cherchait la cohérence avec ses principes. Recherche signifie chemin. Il ne s’est jamais positionné en prêcheur, en prédicateur, ou en représentant de la loi islamique. Il est un intellectuel, un homme, un père, un grand-père, un époux, un frère, un citoyen, un professeur, un ami. Il est loyal tant dans sa démarche que dans ses liens aux personnes qui l’entourent.
"Tariq Ramadan est debout, aux côtés de chaque personne qui se bat pour le bien" a dit une sage collègue rencontrée sur ma route lors d'un voyage humanitaire en Bosnie. Je reprends ses mots aujourd'hui. Merci, Tariq, nous attendons ta sortie. Nous serons mémoire.
Dr Fanny Bauer-Motti
Mediapart
À mesure que l’enquête amène ses réponses et qu’il apparaît clairement qu’il n’y a pas de trace de viol, les médias relayent non pas des informations mais du jugement, voire une forme de jubilation sur une personne qu’ils ne connaissent souvent qu’à travers leur propre média.
Pourquoi autant d’articles sur la vie privée d’un homme ? Rappelons que l’instruction est sujette au secret professionnel, mais qui s’en soucie ? Apparemment pas certains journalistes.
Si les psychologues témoignaient des Hommes, que diraient-ils ?
Si les psychologues devaient témoigner au sujet des hommes, que diraient-ils ? Certainement que tout être humain sur sa route est soumis à sa part humaine et terrestre. Le psychisme est fait de tensions, de luttes, d’épreuves, de difficultés, de compréhension de soi, des autres.
La chute fait partie du chemin. Personne ne sait la force de se relever s’il ne tombe pas lui-même. Personne ne sait s’il aurait fait mieux à la place de celui qu’il regarde, admire, ou déteste, souvent pour des raisons inconscientes de projection, d’identification ou d’image de soi.
La vie humaine est faite d’apprentissages. Et nul n’en parle mieux que celui qui passe par là et a conscience des ombres qui peuplent nos âmes. Rien n’est facile dans un vécu avec soi, sur la terre, avec les Hommes. Mais tout se transforme par l’effort, la patience, le temps et l’indulgence. Ce que les musulmans appellent Djihad an nafs , est une notion centrale qui implique que le rapport au monde passe par l’effort et la lutte que l’Homme livre avec lui-même pour avancer et rejoindre Dieu. Dans le Judaïsme cette notion existe aussi, c’est l’effort et non l’accomplissement d’un but qui importe. « Selon l’effort est la récompense », dit le Talmud. Intention, effort, on parle ici d’un chemin. Pendant qu'une certaine presse, elle, parle de ce qu'elle ne connait pas.
En psychologie, l’équivalent serait la compréhension de soi et de son vécu pour se libérer, petit à petit, de ses névroses, de ses questions, des zones de souffrance que nous traversons tous à un moment de notre vie. Personne n’avance sans turbulences. Toute vie est faite de questions, de doutes, de peurs, de confiance, d’amour et de haine, de colère et de tristesse. Nos vies ont mille couleurs et chaque couleur se transforme par le temps, la compréhension et l’acceptation que nous sommes ombre et lumière à la fois. La plus grande bataille de l’homme c’est lui-même. La plus grande force de l’homme, c’est sa capacité à l’avancement. La psychologie rend indulgent et aussi conscient que nous sommes des êtres en route et que notre route n’est jamais linéaire. Être un homme debout, c’est être conscient que tout peut arriver. L’important est de se comprendre et d’avancer. Se relever. Faire mieux.
Journalistes français, ne parlez pas au nom d’une communauté que vous instrumentalisez sans cesse
Alors, à tous ces journalistes qui se positionnent en « bonne morale » et parlent au nom des musulmans de France. Êtes-vous sûrs de celui ou celle que vous êtes dans votre vie privée ? Êtes-vous exempts de luttes ? Que dirait un ou une journaliste sur vous, s’il/elle avait accès à la clef de votre intimité ? Un peu de retenue dans les propos et de l’éthique dans la gestion de l’information.
Je finirai cette tribune sur un rappel aux journalistes peu éthique qui se positionnent en juge de la bonne morale. L’islam est une religion de miséricorde, de pardon et de la conscience que l’évolution de l’âme et de l’homme s’inscrivent dans une temporalité.
Tariq Ramadan a souvent dit qu’il cherchait la cohérence avec ses principes. Recherche signifie chemin. Il ne s’est jamais positionné en prêcheur, en prédicateur, ou en représentant de la loi islamique. Il est un intellectuel, un homme, un père, un grand-père, un époux, un frère, un citoyen, un professeur, un ami. Il est loyal tant dans sa démarche que dans ses liens aux personnes qui l’entourent.
"Tariq Ramadan est debout, aux côtés de chaque personne qui se bat pour le bien" a dit une sage collègue rencontrée sur ma route lors d'un voyage humanitaire en Bosnie. Je reprends ses mots aujourd'hui. Merci, Tariq, nous attendons ta sortie. Nous serons mémoire.
Dr Fanny Bauer-Motti
Mediapart
Commentaire