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Chandeleur : d'où viennent les «crêpes» ?

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  • Chandeleur : d'où viennent les «crêpes» ?

    Le lexicologue Jean Pruvost, auteur d'un Dico des dictionnaires qui fait référence, analyse chaque semaine pour Le Figaro un mot de l'actualité. L'écrivain s'interroge aujourd'hui, à l'occasion de la chandeleur, sur l'origine du mot «crêpe».

    Ne pas se tromper de genre, c'est important pour les mots «poêle» et «crêpe». On peut s'en étonner mais «le crêpe du poêle» pourrait ne pas être absurde, même si nos papilles n'y trouveraient pas leur compte. Pour la Chandeleur, certes pas d'hésitations, ce sera «la crêpe dans la poêle». Mais avant de faire sauter la «fine galette» qu'on a fait frire «dans une poêle», selon la définition générique de «la» crêpe, radiographions ces mots dont les genres respectifs nous orientent dans des directions a priori incompatibles. Encore que…

    Frisée au féminin…

    Pour le mot «crêpe», au masculin comme au féminin, tout vient du latin «crispus», frisé. La crêpe n'est autre en effet qu'une pâte d'abord liquide composée de lait, de farine et d'œufs, que l'on saisit dans la poêle et dont la pâte prend cet aspect «frisé» qui lui vaut son nom. En somme une crêpe aurait pu s'appeler une «frisée».

    À la fin du XIIIe siècle s'installe dans notre palette gastronomique d'abord la «crispe», puis la délectable «crêpe» à la fin du XIVe siècle. Aucune raison pour que l'apanage gastronomique de la Chandeleur ne change de genre: le féminin lui convient.

    Soleil et printemps

    Ce serait au pape Gélase Ier - à l'origine de la fête de la Chandeleur - qu'on devrait cette tradition, née d'une pratique bienveillante d'accueil de sa part pour les pèlerins. À leur arrivée à Rome les attendaient en effet ces crêpes dont la rondeur rappelait la lumière et le soleil, propres à symboliser le printemps tout proche.

    Frisé au masculin et en deuil

    Le premier article de dictionnaire consacré au mot «crêpe» se décline au masculin, et on le doit à Richelet dans son Dictionnaire françois publié en 1680. Quelle définition en est offerte? «Sorte d'étoffe noire, fort légère faite de fine laine, & qui sert à marquer le deuil qu'on porte de la mort d'une personne.»

    Jean Genet, volontiers rebelle, donnera un point de vue injuste et acerbe sur ledit crêpe: «Si j'admettais la tenue de grand deuil des veuves, sa réduction à l'échelle d'insigne, les brassards noirs, le lé de crêpe au revers du veston, et chez les ouvriers une cocarde noire à la casquette, dans le coin de la visière, autrefois me paraissaient ridicules.»

    Le crêpe poétique

    Il n'en reste pas moins que deux grands maîtres firent s'élever aux firmaments poétiques ce type de crêpe. Comment ne pas être ému, chez Baudelaire, dans Spleen et Idéal, par ce «soleil couvert d'un crêpe», accompagné de la «Lune de ma vie!» qui plonge «tout entière au gouffre de l'Ennui»? Plus sobre mais percutant, Victor Hugo se contentera d'un alexandrin sans appel: «D'un crêpe nébuleux le ciel était voilé.»

    À Marcel Aymé de se montrer plus joyeux en évoquant en 1941 dans le Passe-muraille «un tailleur en crêpe de Chine avec un assortiment de blouses et un paletot de couleur réséda à poches rapportées». Quelle classe pour un tailleur ou un châle, que le crêpe de Chine fort à la mode au XIXe siècle!

    Frisé, au masculin et aux pieds…

    Beaucoup plus prosaïques sont les chaussures aux semelles de crêpe qui, un temps, représentèrent le modernisme en matière de chaussures. «Ces souliers aux épaisses semelles de crêpe, des souliers dans lesquels on marcherait sans faire de bruit et sans se mouiller les pieds», voilà ce qui fait rêver Simone de Beauvoir dans Les Mandarins. Le crêpe correspond de fait à une feuille de latex de caoutchouc, coagulé et séché, et c'est sa surface irrégulière et grenelée qui lui valut le nom de crêpe. Au masculin, pour ne pas confondre semelle et crêpe au froment…

    Crêpe Suzette

    La crêpe est rarement isolée dans notre langue. Avant d'être au contact de la langue et de ses papilles, elle sonne délicieusement aux oreilles: crêpes roulées, fourrées, dentelle, flambées, au Grand Marnier, au rhum, crêpes à la confiture, et pourquoi pas une crêpe Suzette, c'est-à-dire «au sucre, parfumée au citron ou au curaçao»!

    Que vient faire ici Suzette? Il faut prendre la direction de Monte-Carlo où un restaurateur, Carpentier, eut l'idée de parfumer à la mandarine ses crêpes sucrées, tout en les faisant flamber. La légende veut alors que le futur Édouard VII, dont la compagne s'appelait Suzette, se délecta de la crêpe dont il demanda immédiatement le nom. Carpentier était à court d'idée: le futur Prince de Galles aurait alors galamment suggéré qu'elle soit dédiée à Suzette!

    Du «petit plat» à la poêle


    Du latin patella, petit plat, est née vers 1170 la «paele», synonyme de chaudron. Puis, en 1636 est attestée la «poêle», de forme ronde et plate, à bords bas et munie d'une longue queue, sans laquelle on ne ferait pas sauter les crêpes pour les retourner. Allaient désormais s'imposer deux types de poêles, la poêle à frire et la poêle à crêpes. Au féminin.

    Quatre cordons pour un poêle…

    De même orthographe, naissait au masculin et issu du latin pallium, «étoffe», le «poile», au XIIIe siècle, puis le «poêle» au XVIe, c'est-à-dire le drap recouvrant un cercueil pendant les funérailles. Ainsi devait-on «tenir les cordons du poêle», aux quatre coins dudit drap, pendant le déplacement du cercueil: «Quatre personnages en toge rouge tenaient gravement les cordons du poêle», écrit encore au XXe siècle Émile Henriot dans Le Diable à l'hôtel en 1919.

    Le poêle sur la tête

    Le poêle désigna aussi le voile maintenu au-dessus de la tête des mariés dans la tradition catholique. Victor Hugo le rappelle dans les Misérables, décrivant un couple «à genoux coude à coude sous le poêle de moire blanche dans la fumée de l'encensoir». Avouons que l'image aujourd'hui surprend les élèves qui ne connaissent que le poêle où brûle un combustible…

    Descartes dans le poêle…


    Du latin pe(n)silis balneae, désignant les étuves suspendues des Romains, est né le poille, attesté en 1351 et désignant la chambre chauffée, bientôt dite, dès 1545, le poêle. C'est dans un poêle que naquit Descartes… Une telle assertion ferait évidemment sourire si Georges Duhamel, dans son Manuel du protestataire paru en 1952 ne nous rappelait à la réalité des mots: «Si Descartes est devenu Descartes c'est qu'il a passé tout un hiver déterminant pour le monde, à rêver seul et en silence dans cette chambre chauffée qu'on appelait le poêle.» De la chambre chauffée on passerait ensuite au moyen de chauffage, qu'il s'agisse d'un poêle allemand en faïence décorée ou du solide poêle en fonte.

    Résumons: pas très loin du poêle, dans ses chaussures aux semelles de crêpe, déguster une crêpe dentelle qu'on vient de faire sauter à la poêle, quel régal étymologique!
    LeFigaro

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  • #2
    les bonnes crêpes de février
    La patience n'a l'air de rien, c'est tout de même une énergie.

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    • #3
      Toute l'année pour moi

      Sinon une poêle en inox ça colle , j'ai essayé avec un peu d'huile mais ça colle toujours .

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      • #4
        J'espère que vous avez fait le stock de Nutella à Inter'm
        Ou pas !
        Osef

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        • #5
          Hello Choue, ils font des soldes sur le Nutella 1 acheté le 2eme 50%
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