Avons-nous sacrifié nos différences au nom de l’égalité entre les sexes ? Aujourd’hui, hommes et femmes découvrent que, pour mieux vivre ensemble, chacun doit réaffirmer sa propre identité.
Il y a trente ans, cette interrogation aurait semblé incongrue. « Jusqu’en 1985, il était même interdit de mentionner la moindre différence » , rappelle la sociologue Evelyne Sullerot, fondatrice du Mouvement français pour le planning familial. Aujourd’hui, au contraire, on scande sur différents tempos que féminin et masculin ont chacun leur déclinaison, et qu’il y a urgence pour eux à revisiter leurs différences.
Les signes de cette tendance ? Une mixité à l’école fortement remise en question, et France 2 qui bat des records d’audience avec un feuilleton qui raconte, en quinze minutes, les aléas entre Un gars et une fille, différences de caractère et de comportement obligent !
L’explosion des repères identitaires
Que s’est-il passé ? « Des mouvements de balancier comme il y en a tous les cinquante ans, analyse la philosophe Geneviève Fraisse. Soit on avance sur le débat de l’égalité, soit celui sur la différence occupe le devant de la scène . » Une scène qui ressemble à un "chantier" : tous nos repères sociaux, psychologiques et familiaux ont, en effet, subi le contrecoup de la course pour l’égalité des droits . Les femmes étant devenues "des hommes comme les autres", les hommes sont convoqués dans leur foyer pour apprendre à s’occuper des enfants, tandis que les héroïnes de Sex in the city parlent « de bons coups à sauter » comme de vrais machos…
Se profile aussi la panne du désir dans les couples contemporains, avec des hommes et des femmes qui se ressemblent et « n’éprouvent plus aucune attirance pour le corps de l’autre », ainsi que l’annonce le dérangeant Michel Houellebecq dans Plateforme (Flammarion). Comment s’y retrouver ? La démocratie, c’est vrai, demande du semblable et de l’égal ; tout le reste – psychanalyse, anthropologie ou traditions spirituelles – nous rappelle que c’est la différenciation des sexes qui fonde une humanité « désirante »…
Mieux connaître son propre sexe
Premier réflexe pour s’y retrouver : plonger dans sa propre spécificité d’homme ou de femme . Et pour cela, se regrouper avec des gens de même sexe. C’est le "claning" sous toutes ses formes : enterrement de vies de jeunes filles, soirées pizza entre copains, groupes de paroles pour hommes, cercles de femmes… « Comme on a du mal à appréhender la différence de l’autre, on a tendance à se rapprocher du même » , avoue Isabelle Sorrente, écrivain à l’écoute de sa génération, les 25-30 ans, qui a publié L (Lattès).
On peut aussi penser que, tels des adolescents qui se cherchent, les hommes et les femmes d’aujourd’hui ne peuvent plus dissocier la quête de connaissance d’eux-mêmes d’une recherche sur leur propre genre. C’est d’ailleurs du monde du développement personnel qu’est arrivé le best-seller planétaire Les hommes viennent de Mars, les femmes viennent de Vénus (J’ai lu). Le thérapeute américain John Gray mettait enfin des mots sur les différents malaises des couples contemporains : lui est, par nature, un chasseur silencieux, elle cherche avant tout l’intimité par la parole ; elle veut être soutenue dans ses émotions, lui a besoin d’être concrètement utile. Ce succès éditorial – imprévisible – a révélé une soif du grand public : mieux connaître et vivre sa différence sexuelle pour s’épanouir.
Tel est le cas de Jean-Pierre Ortais, animateur de stages de développement personnel, qui ouvre ce mois-ci un groupe de paroles pour hommes en Dordogne (Association Synapses Plus). Toutes les interrogations tournent autour d’une recherche de masculinité : « Comment être “nouvel homme” face à des “nouvelles femmes” » ? « On est en plein désarroi, confie l’animateur. Moi-même, en tant qu’homme, j’avais tout “bien fait” : arrêté les sports violents pour me consacrer à mes enfants, été un mari modèle, travailleur… Bref, j’ai reproduit ce que mon père avait fait pour rendre ma mère heureuse. Et ma femme m’a quitté ! »
Du côté des femmes, le questionnement n’est pas moins intense. Nelly, une psychologue de 42 ans qui a été initiée dans un groupe de femmes du Midwest, aux Etats-Unis (Woman Within), explique : « A ce moment de ma vie, les rôles étaient un peu chamboulés dans notre couple : c’était moi qui ramenais l’argent au foyer, tandis que mon compagnon s’occupait de notre fils… Tout à coup, j’ai ressenti un intense besoin de me reconnecter à quelque chose d’intemporel et de sacré, qui était passé de ma grand-mère maternelle à ma mère, puis à moi. Je voulais aller à l’essence féminine… Le groupe m’a aidée en cela. »
La philosophe Paule Salomon, qui anime depuis plus de quinze ans des groupes de ce type, croit en cette démarche : « Plus une personne évolue, plus elle se “sexue”. Non pas dans l’opposition à l’autre, mais dans une différence qui est aussi une affirmation de soi. » Se "sexuer" revient alors à passer de sa seule identité sexuelle biologique à sa pleine dimension d’homme ou de femme des points de vue psychique et affectif.
PSYCHOLOGIE.COM
Il y a trente ans, cette interrogation aurait semblé incongrue. « Jusqu’en 1985, il était même interdit de mentionner la moindre différence » , rappelle la sociologue Evelyne Sullerot, fondatrice du Mouvement français pour le planning familial. Aujourd’hui, au contraire, on scande sur différents tempos que féminin et masculin ont chacun leur déclinaison, et qu’il y a urgence pour eux à revisiter leurs différences.
Les signes de cette tendance ? Une mixité à l’école fortement remise en question, et France 2 qui bat des records d’audience avec un feuilleton qui raconte, en quinze minutes, les aléas entre Un gars et une fille, différences de caractère et de comportement obligent !
L’explosion des repères identitaires
Que s’est-il passé ? « Des mouvements de balancier comme il y en a tous les cinquante ans, analyse la philosophe Geneviève Fraisse. Soit on avance sur le débat de l’égalité, soit celui sur la différence occupe le devant de la scène . » Une scène qui ressemble à un "chantier" : tous nos repères sociaux, psychologiques et familiaux ont, en effet, subi le contrecoup de la course pour l’égalité des droits . Les femmes étant devenues "des hommes comme les autres", les hommes sont convoqués dans leur foyer pour apprendre à s’occuper des enfants, tandis que les héroïnes de Sex in the city parlent « de bons coups à sauter » comme de vrais machos…
Se profile aussi la panne du désir dans les couples contemporains, avec des hommes et des femmes qui se ressemblent et « n’éprouvent plus aucune attirance pour le corps de l’autre », ainsi que l’annonce le dérangeant Michel Houellebecq dans Plateforme (Flammarion). Comment s’y retrouver ? La démocratie, c’est vrai, demande du semblable et de l’égal ; tout le reste – psychanalyse, anthropologie ou traditions spirituelles – nous rappelle que c’est la différenciation des sexes qui fonde une humanité « désirante »…
Mieux connaître son propre sexe
Premier réflexe pour s’y retrouver : plonger dans sa propre spécificité d’homme ou de femme . Et pour cela, se regrouper avec des gens de même sexe. C’est le "claning" sous toutes ses formes : enterrement de vies de jeunes filles, soirées pizza entre copains, groupes de paroles pour hommes, cercles de femmes… « Comme on a du mal à appréhender la différence de l’autre, on a tendance à se rapprocher du même » , avoue Isabelle Sorrente, écrivain à l’écoute de sa génération, les 25-30 ans, qui a publié L (Lattès).
On peut aussi penser que, tels des adolescents qui se cherchent, les hommes et les femmes d’aujourd’hui ne peuvent plus dissocier la quête de connaissance d’eux-mêmes d’une recherche sur leur propre genre. C’est d’ailleurs du monde du développement personnel qu’est arrivé le best-seller planétaire Les hommes viennent de Mars, les femmes viennent de Vénus (J’ai lu). Le thérapeute américain John Gray mettait enfin des mots sur les différents malaises des couples contemporains : lui est, par nature, un chasseur silencieux, elle cherche avant tout l’intimité par la parole ; elle veut être soutenue dans ses émotions, lui a besoin d’être concrètement utile. Ce succès éditorial – imprévisible – a révélé une soif du grand public : mieux connaître et vivre sa différence sexuelle pour s’épanouir.
Tel est le cas de Jean-Pierre Ortais, animateur de stages de développement personnel, qui ouvre ce mois-ci un groupe de paroles pour hommes en Dordogne (Association Synapses Plus). Toutes les interrogations tournent autour d’une recherche de masculinité : « Comment être “nouvel homme” face à des “nouvelles femmes” » ? « On est en plein désarroi, confie l’animateur. Moi-même, en tant qu’homme, j’avais tout “bien fait” : arrêté les sports violents pour me consacrer à mes enfants, été un mari modèle, travailleur… Bref, j’ai reproduit ce que mon père avait fait pour rendre ma mère heureuse. Et ma femme m’a quitté ! »
Du côté des femmes, le questionnement n’est pas moins intense. Nelly, une psychologue de 42 ans qui a été initiée dans un groupe de femmes du Midwest, aux Etats-Unis (Woman Within), explique : « A ce moment de ma vie, les rôles étaient un peu chamboulés dans notre couple : c’était moi qui ramenais l’argent au foyer, tandis que mon compagnon s’occupait de notre fils… Tout à coup, j’ai ressenti un intense besoin de me reconnecter à quelque chose d’intemporel et de sacré, qui était passé de ma grand-mère maternelle à ma mère, puis à moi. Je voulais aller à l’essence féminine… Le groupe m’a aidée en cela. »
La philosophe Paule Salomon, qui anime depuis plus de quinze ans des groupes de ce type, croit en cette démarche : « Plus une personne évolue, plus elle se “sexue”. Non pas dans l’opposition à l’autre, mais dans une différence qui est aussi une affirmation de soi. » Se "sexuer" revient alors à passer de sa seule identité sexuelle biologique à sa pleine dimension d’homme ou de femme des points de vue psychique et affectif.
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