El Moufettiche
par El-Guellil
par El-Guellil

Tant bien que mal, mal surtout, il a pu se nourrir, s'instruire juste pour pouvoir compter jusqu'à dix, comme un arbitre de boxe. Il a fondé un foyer. Il eut ses deux enfants. Il a réussi à leur construire une superbe maison, avec toutes les commodités. Le garage abritait une superbe voiture. Les enfants ne manquaient de rien. Argent de poche, habillés de dernier cri, il pouvait leur offrir des vacances de rêve et ils menaient tous un train de vie... loin du sal-air. Fi sidna ramadane, notre moufettiche recevait ses gouffas à domicile.
Notre contrôleur était très à cheval sur l'éducation de ses deux garçons. Il ne voulait pas que ses garnements ratent leur vie. Il s'est sacrifié et mettait du coeur à l'ouvrage, notre contrôleur. Il a su, lors de ses nombreuses missions, faire celui qui «chef et celui qui ma chef oualou». Ce qui lui a valu une promotion de chef-contrôleur. Maintenant, ce sont ses subalternes qui font le travail pour lui.
On raconte qu'un jour, il était rentré chez lui et, comme à l'accoutumée, demanda le carnet de notes à ses enfants. C'est d'abord le cancre qui lui tend le sien. Que des mauvaises notes. Zéro partout. Son enfant, l'aîné, doit redoubler. Il le regarde bien dans les yeux. Et, sans mot dire, lui rend son livret scolaire.
C'est au tour de l'autre. Le cadet, lui excellent, tout en sourire, tend le carnet de notes à son paternel. Le père, pas très contrôleur en chef, le consulte, le feuillette une première fois, une deuxième fois, se penche sur son enfant et lui assène une gifle cinglante, avant de disparaître.
- Je ne comprends pas, dit le bon élève à son frère le cancre. Toi, tu redoubles et il te laisse tranquille. Moi, avec mes excellentes notes, j'ai droit à une gifle !
- C'est que moi, entre les feuilles de mon carnet de notes, je lui ai glissé quelques billets de l'argent que j'ai économisé.
L'Afric, c'est où ?
Le Quotidien d'Oran