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Un climat dégradé dans les hôpitaux en France

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  • Un climat dégradé dans les hôpitaux en France

    La «violence ordinaire» monte en puissance dans les hôpitaux français, selon le médiateur de la République. Ce «climat de méfiance et d'agressivité» est mis en lumière par le premier bilan du pôle santé, dont Le Figaro a pris connaissance.

    Quelque 4 800 requêtes liées aux droits des malades et à la sécurité des soins ont été reçues depuis le 1er février 2009. «Dans une plainte sur deux, on rencontre des situations de maltraitance au sens large du terme , observe Loïc Ricour, responsable du pôle santé. Nous avons été très surpris par l'ampleur du phénomène, qui concerne aussi les centres de rééducation.»

    Les témoignages relatent une violence insidieuse, apparemment anodine et qui ne donne pas lieu à des procédures judiciaires. C'est une vieille dame oubliée pendant des heures, sans couverture, sur un brancard des urgences. Un patient dont la douleur a été minimisée, voire moquée. Ce sont des propos infantilisants, un bruit constant, y compris la nuit, un soin intime réalisé porte ouverte… «On retrouve aussi très souvent le sentiment de ne pas avoir été informé sur sa maladie, de ne pas avoir été écouté, ni compris», indique Loïc Ricour.

    Le bilan cite ainsi le cas d'une mère qui, bouleversée par les douleurs de son fils, n'aura de cesse d'alerter l'équipe médicale, sans jamais être prise en compte.

    La «maltraitance ordinaire» est particulièrement ressentie dans les services d'urgences, où «l'attente et le manque d'information décuplent l'angoisse», selon Nicolas Brun, chargé de mission à l'Union nationale des associations familiales. On la retrouve aussi en réanimation, des unités très techniques, qui appliquent des procédures rigoureuses. «Les familles ont souvent l'impression d'être tenues à l'écart, alors que leur proche vit des situations de douleur et d'angoisse extrêmes», remarque Marie-Christine Pouchelle, directrice de recherche au CNRS.

    Pour Jean-Paul Delevoye, le médiateur, «ce sentiment d'incompréhension génère des tensions, qui s'expriment de plus en plus par des violences à l'encontre des professionnels de santé». Le pôle a ainsi reçu 60 témoignages de médecins ou d'infirmiers victimes de violences. Les injures, insultes, crachats ou coups à l'encontre des personnels médicaux sont en augmentation régulière depuis quatre ans, selon l'Observatoire national des violences en milieu hospitalier. Le commissaire divisionnaire Fabienne Guerrieri constate que «l'hôpital n'est plus un lieu de respect : on s'y comporte comme dans la vie, en laissant éclater sa colère à la moindre frustration».

    «Apprendre à devenir empathique»


    La Haute Autorité de santé (HAS), qui s'apprête à rendre un rapport sur le sujet, vient d'introduire la «bientraitance» comme critère de certification des hôpitaux et cliniques. «Des progrès ont été réalisés ces dernières années dans la prise en compte des droits des patients, mais il reste une nouvelle étape à franchir», concède Raymond Le Moign, directeur à la HAS, pour qui l'accent doit être mis sur la sensibilisation et la formation. «Ce n'est pas parce que vous êtes médecin que vous êtes naturellement sensible et empathique, mais on peut apprendre à le devenir», constate Nicolas Brun. Le manque de moyens humains et les conflits de pouvoirs au sein des services sont aussi évoqués pour expliquer ce phénomène longtemps ignoré. Les spécialistes pointent le rôle du chef de service dans l'impulsion d'une dynamique positive : «S'il est attentif au respect de la dignité et de l'intimité, en général son équipe le sera aussi.»

    Selon le médiateur, un dialogue rompu peut avoir des conséquences graves. Le traumatisme se révèle parfois difficilement surmontable et le doute peut alors s'insinuer sur la qualité de la prise en charge médicale.

  • #2
    L'indignation des parents de François, mort à 17 ans

    Ce ne sont pas des coups, ni même des insultes, mais une série de petits gestes et de remarques infiniment blessantes lancées au moment même où leur fils luttait pour sa vie. Quatre ans après la mort de François, 17 ans, ces souvenirs douloureux rendent le deuil impossible. «Hospitalisé en réanimation, notre enfant était affaibli, profondément souffrant et vulnérable, témoignent ses parents, Marie-Christine et Gérard Ginet. Nous avons dû nous battre contre sa maladie et contre l'équipe médicale qui était censée prendre soin de lui.»

    A tteint d'un déficit immunitaire génétique, François Ginet reçoit, le 13 octobre 2005, une première greffe de moelle osseuse au service d'hématologie pédiatrique de l'hôpital Necker, à Paris. Demeurant dans le Nord, le couple a loué un petit appartement à Paris pour être plus près de lui. Femme au foyer, Marie-Christine Ginet passe ainsi tout son temps avec son fils, pendant que son mari continue à travailler.

    «Le 23 novembre 2005 au soir, après l'échec d'une première greffe, François a malheureusement été transféré au service de réanimation adulte. À partir de ce jour, nous n'avons plus eu le droit de le voir librement. Les visites étaient autorisées de 15 heures à 17 heures et de 18 heures à 20 heures. Il a fallu se battre pour les élargir. Nous devions aussi sortir de sa chambre pendant les soins et la toilette», se souvient Marie-Christine Ginet .

    Absence de compassion

    Ces moments sont trop rares aux yeux de l'adolescent, qui «pleure» lorsque ses parents le quittent. Les relations avec l'équipe médicale se tendent. «Très vite, on m'a fait passer pour une mère envahissante pour son enfant et gênante pour les soignants. On m'a culpabilisée ; on m'a conseillé d'aller faire des emplettes à Paris»… Le passage d'un service pédiatrique à un environnement très technique, accueillant des adultes, est un choc. Selon ses parents, l'intimité de l'adolescent, nu sur son lit, perfusé et très amaigri, n'est pas respectée. L'hygiène laisse, selon eux, à désirer.

    Surtout, l'absence manifeste de compassion et de douceur des soignants les bouleverse : «Fran-çois souffrait horriblement, mais il fallait parfois attendre une demi-heure parce que c'était le moment du changement d'équipe. Certaines infirmières venaient en soufflant ou en levant les yeux au ciel. Elles n'avaient jamais un mot gentil. Un matin, François m'a raconté, en larmes, qu'il avait été obligé de crier pendant la nuit parce que sa sonnette était encore cassée. Il les entendait rire et papoter dans leur pièce.»

    Entre la famille et l'équipe médicale, tout dialogue devient impossible. L'état de François se dégrade. Il succombe le 27 février 2006 d'une complication. L'adolescent aura passé trois mois en unité de réanimation. Son père s'interroge encore aujourd'hui : «C'était un gamin confiant, décidé à se battre, mais il a fini par se replier… Ces mauvaises pratiques ont forcément eu un impact sur la maladie. Comment savoir ce qui serait arrivé s'il avait été bien traité ?»

    Plusieurs mois après la disparition de leur enfant, le couple a donc écrit à la directrice de l'hôpital Necker. «Ce n'est pas la mort de François qui est inadmissible, mais ce qu'il a subi», expliquent-ils. Selon l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris, leur témoignage poignant a donné lieu à une «réelle émotion» au sein de l'hôpital, qui a engagé une réflexion sur l'amélioration de la prise en charge des adolescents en réanimation.

    Par le Figaro

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