ENTRE FOSSE ET DALLE DE PIERRE...
Pleurez, mes yeux, et répandez
les dons généreux de vos larmes;
que facilement elles sourdent
et viennent innonder mes joues,
comme l'eau qui fuit de nos outres
pleines jusqu'au bord, à l'instant
où nous les chargeons sur les bêtes
qui doivent les porter aux champs.
Pleurez sur la perte d'un frère,
pleurez sur Sakhr qui pour toujours
a fait halte en lieu étroit,
entre fosse et dalle de pierre.
Poussière subtile amassée
aux alentours de son tombeau,
que le souffle de la tempête,
violent, divulgue et disperse...
C'est lui le seigneur de noblesse,
maître puissant et redouté,
lui-même issu d'autres seigneurs,
de maîtres à la tête altière.
Il supportait seul le fardeau
accablant des coups que frappait
le destin cruel sur l'ensemble
des malheureux de sa tribu.
Il allait partout pour remettre
les os fracturés en leur place,
guérir ainsi l'homme ployé,
faire cesser toutes les plaintes.
Quand il accordait quelque don,
c'étaient d'un seul coup cent chameaux
de race noble et généreuse,
hauts sur pieds et faits pour la course.
Il acceptait de pardonner
une injure, une offense grave,
à son parent, au commensal
qui avait partagé son pain.
Un pardon conscient et voulu
de sa part, preuve de noblesse,
quand il choisit de pardonner,
de gré fait pencher la balance.
Voilà celui dont autrefois
nous obtenions la guérison
pour ceux d'entre dont les membres
étaient faibles et languissants.
Il détournait dessus nos têtes
le tranchant des glaives hostiles.
Il rabattait aussi l'orgueil
de la haine dissimulée.
Par sa mort, le siècle furieurx
nous a traîtreusement atteints;
il nous a transpercés soudain
des coups de sa corne acérée,
comme s'il sétait proposé
de placer dessus notre gorge
le couteau affilé propice
à sacrifier les victimes.
Et nos femmes ont élevé
la plainte funèbre de l'éloge
pour célébrer le disparu,
après la maîtresse du deuil.
Elles pleurent et se lamentent,
les yeux privés de leur sommeil,
gémissant commen tristes bêtes
qui, devant l'eau, oublient de boire.
Les traits altérés, les cheveux
en désordre, elles se lamentent
sans cesse, alors qu'est parvenue
à son terme la Nuit des pleurs.
Elles pleurent la mort du frère
de la Noblesse généreuse,
du Bien, des Qualités précieuses
qui font un homme vertueux;
celui qui donnait sans compter,
à la paume toujours ouverte,
celui dont les dons épandus
comblaient les gens aux alentours.
C'est à présent que nous restons
d'un rang égal aux autres hommes,
ainsi que les dents alignées
dans la bouche d'un homme adulte.
AL-KHANSA' (fin du VI-première moitié du VII siècle, ère chrétienne)
j'ai lu ,aimé je partage
Néo...
Pleurez, mes yeux, et répandez
les dons généreux de vos larmes;
que facilement elles sourdent
et viennent innonder mes joues,
comme l'eau qui fuit de nos outres
pleines jusqu'au bord, à l'instant
où nous les chargeons sur les bêtes
qui doivent les porter aux champs.
Pleurez sur la perte d'un frère,
pleurez sur Sakhr qui pour toujours
a fait halte en lieu étroit,
entre fosse et dalle de pierre.
Poussière subtile amassée
aux alentours de son tombeau,
que le souffle de la tempête,
violent, divulgue et disperse...
C'est lui le seigneur de noblesse,
maître puissant et redouté,
lui-même issu d'autres seigneurs,
de maîtres à la tête altière.
Il supportait seul le fardeau
accablant des coups que frappait
le destin cruel sur l'ensemble
des malheureux de sa tribu.
Il allait partout pour remettre
les os fracturés en leur place,
guérir ainsi l'homme ployé,
faire cesser toutes les plaintes.
Quand il accordait quelque don,
c'étaient d'un seul coup cent chameaux
de race noble et généreuse,
hauts sur pieds et faits pour la course.
Il acceptait de pardonner
une injure, une offense grave,
à son parent, au commensal
qui avait partagé son pain.
Un pardon conscient et voulu
de sa part, preuve de noblesse,
quand il choisit de pardonner,
de gré fait pencher la balance.
Voilà celui dont autrefois
nous obtenions la guérison
pour ceux d'entre dont les membres
étaient faibles et languissants.
Il détournait dessus nos têtes
le tranchant des glaives hostiles.
Il rabattait aussi l'orgueil
de la haine dissimulée.
Par sa mort, le siècle furieurx
nous a traîtreusement atteints;
il nous a transpercés soudain
des coups de sa corne acérée,
comme s'il sétait proposé
de placer dessus notre gorge
le couteau affilé propice
à sacrifier les victimes.
Et nos femmes ont élevé
la plainte funèbre de l'éloge
pour célébrer le disparu,
après la maîtresse du deuil.
Elles pleurent et se lamentent,
les yeux privés de leur sommeil,
gémissant commen tristes bêtes
qui, devant l'eau, oublient de boire.
Les traits altérés, les cheveux
en désordre, elles se lamentent
sans cesse, alors qu'est parvenue
à son terme la Nuit des pleurs.
Elles pleurent la mort du frère
de la Noblesse généreuse,
du Bien, des Qualités précieuses
qui font un homme vertueux;
celui qui donnait sans compter,
à la paume toujours ouverte,
celui dont les dons épandus
comblaient les gens aux alentours.
C'est à présent que nous restons
d'un rang égal aux autres hommes,
ainsi que les dents alignées
dans la bouche d'un homme adulte.
AL-KHANSA' (fin du VI-première moitié du VII siècle, ère chrétienne)
j'ai lu ,aimé je partage
Néo...
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