Ce récit est un jeu
Je ne sais s’il a eu ou s’il aura lieu
Chacun va disant
Que le pays ne guérit pas
Nous voulons demeurer entre nous
Si un jour les épreuves prennent fin
Que l’étranger s’éloigne
Et que nous nous occupions de notre pays
Mais la guerre éclatera entre nous
Car nous, les Kabyles, nous sommes oublieux
Nous en venons à prendre
L’étranger pour arbitre
Chacun tenait son discours…
De vrais poèmes
Le jour où l’étranger est parti
Le pays est revenu aux siens
Chaque Kabyle s’en réjouissait
Voyant déjà ses jours fleuris
Mais la fête finie
Chacun revint à la raison :
Il faut maintenant que nous sachions
Comment conduire ce pays
Le pays fut gouverné avec justice
Par un de ses enfants
Nous étions tous d’accord
Pour qu’il eût pouvoir de décider
Puis chaque tribu cria :
Celui-là n’est point des nôtres
Inutile de tergiverser
Enlevons-le et trouvons-en un autre
Puis les tribus de concert
Elurent un homme
Vaillant, sagace et sage
Comme on n’en trouve pas de pareil
Alors dans les villages on cria :
Nous ne connaissons pas cet homme
Inutile de tergiverser
Enlevons-le et trouvons-en un autre
On chercha dans les villages avec soin
Et on trouva un homme avisé
Amant de la vérité
Du bon droit
Mais des villageois se levèrent et jurèrent
Qu’il fallait enlever cet homme
Inutile…
Enlevons-le et trouvons-en un autre
Le village avait juré de trouver
Il chercha et… trouva
Un homme hors du commun
A la hauteur de tous les défis
Une fraction se leva irritée
Et dit : nous n’en voulons pas
Inutile…
Enlevons-le et trouvons-en un autre
Un hameau se mit unanime
A chercher parmi les gens
Il choisit un homme de combat
Respecté de tous
Mais son frère se leva pour le contester
Ainsi tu crois être mieux que moi ?
Inutile…
Enlevons-le et trouvons-en un autre
Maintenant toute raison a fui
Jusqu’à un point de non-retour
Qui doit gouverner
Puisque vous ne voulez point de moi ?
Qui doit gouverner
Puisque nous ne voulons pas de toi ?
Et bien ! Savez-vous ce que nous devons faire ?
Nous allons appeler un étranger
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Il en est plus d’un qui dira
Que je démobilise
Ceux-là ignorent
Comment vont les choses
Avant de semer l’orge
Il faut d’abord étudier le sol
Kabyle ah ! Kabyle
Qui surestimes l’étranger
Kabyle ah ! Kabyle
Qui avilis ton frère
Parce qu’il a hérité de son père une fortune
Dont il ignore le chiffre
Il va me donner des ordres ?
Je vais accepter cela ?
Non sa parole ne fera pas loi
Nous brisons mais nous ne plions jamais
Kabyle ah ! Kabyle
Qui surestimes l’étranger
Kabyle ah ! Kabyle
Qui avilis ton frère
Quoi ? Un fils de berger
Aujourd’hui me commandera ?
Parce qu’il a la chance d’avoir fait des études
Il va maintenant me regarder de haut ?
Et bien ! si je laisse prévaloir sa parole
Que l’on me rase ces moustaches (c’est la fin du discours des hommes du hameau)
Kabyle ah ! Kabyle
Qui surestimes l’étranger
Kabyle ah ! Kabyle
Qui avilis ton frère
Personne n’est au-dessus de nous !...
C’est que nous oublions nos vices
Quand notre ciel enfante un astre
Nous en faisons un ennemi
Nous le laissons d’abord resplendir
Puis nous nous dressons pour le combattre
Kabyle ah ! Kabyle
Qui surestimes l’étranger
Kabyle ah ! Kabyle
Qui avilis ton frère
(Traduction de Tassadit YACINE)
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