Trois mois après sa prise de fonctions, l'ancien dirigeant de Disney + quitte son poste à la tête de l'application de courtes vidéos virales appartenant au chinois ByteDance.
Une manière de protester contre la décision du président américain de bannir l'application si le groupe ne vend pas ses opérations américaines d'ici à mi-septembre.
Kevin Mayer ne veut pas être englué dans la guerre froide technologique entre les Etats-Unis et la Chine. Trois mois après sa prise de fonctions, le patron américain de TikTok a annoncé, mercredi soir, démissionner suite à la pression exercée par Donald Trump pour que sa maison mère, le chinois ByteDance, vende entièrement les opérations de TikTok dans le pays à une société américaine. La plateforme de courtes vidéos virales compte 1 milliard d'utilisateurs, dont 100 millions aux Etats-Unis.
Cet ancien responsable du service de streaming Disney+ est remplacé par Vanessa Pappas, manageuse de la plateforme, le temps qu'un nouveau PDG soit nommé. L'embauche de Kevin Mayer devait aider TikTok à effacer ses racines chinoises - mais, en consacrant l'application comme un géant du divertissement capable de recruter un ponte de l'industrie, elle semble avoir encore plus attiré l'attention de Donald Trump sur sa force de frappe.
« Le coeur lourd »
« Au cours des dernières semaines, au fur et à mesure que l'environnement politique a sévèrement changé, j'ai profondément réfléchi à ce que les changements de la structure de l'entreprise vont exiger. […] Le rôle pour lequel j'ai signé - qui comprenait la direction de TikTok au niveau mondial - sera très différent car l'administration américaine pousse à vendre les opérations américaines », écrit Kevin Mayer dans une lettre aux employés pour justifier son départ « le coeur lourd ».
Selon le « Financial Times », il aurait décidé de jeter l'éponge après que Donald Trump a adopté un décret il y a trois semaines qui bannira l'application sur le territoire si ByteDance ne vend pas ses opérations américaines d'ici au 15 septembre.
Poursuite en justice
Lundi, le groupe chinois a poursuivi l'administration américaine en justice, l'accusant de violer la Constitution en ne lui donnant pas une chance de répondre avec un délai suffisant et en limitant la liberté d'expression. Une tactique qui pourrait lui
permettre d'obtenir un délai au-delà de l'élection présidentielle du 3 novembre, et ainsi de voir le décret tomber en cas d'élection du démocrate Joe Biden, qui n'a pas la même conception des relations avec la Chine.
L'administration républicaine estime que l'application, premier réseau social à avoir décollé aux Etats-Unis et en Europe, communique les données personnelles de ses concitoyens à Pékin. Elle l'accuse aussi de censurer certains contenus en fonction des consignes du Parti communiste, notamment sur la révolte pro-démocratie à Hong Kong ou l'oppression des musulmans Ouïghours dans la région du Xinjiang.
Donald Trump mène une croisade similaire contre l'équipementier télécoms chinois Huawei, qui souffre depuis la décision des Etats-Unis de le bannir des équipements 5G et de l'empêcher de se fournir en composants auprès de fabricants américains.
Microsoft et Oracle
TikTok assure n'avoir aucun lien avec le gouvernement chinois et stocker les données de ses utilisateurs américains et européens aux Etats-Unis et à Singapour. Le groupe estime que les Etats-Unis refusent que les champions technologiques chinois entrent sur le marché américain afin de protéger ses champions nationaux comme Facebook - l'inverse étant aussi souvent le cas en Chine, où les applications américaines sont régulièrement inaccessibles pour les utilisateurs chinois.
Les géants des logiciels Microsoft et Oracle ont chacun soumis des offres de rachat au cours de l'été et les négociations allaient bon train jusqu'à ce que Donald Trump impose cette deadline de mi-septembre, qui pénalise TikTok dans ses négociations. Le président a aussi exigé que le département du Trésor récupère « beaucoup d'argent » de la vente. Une requête qui pourrait compliquer la conclusion d'un accord.
Anaïs Moutot ( Correspondante à San Francisco)
Publié le 27 août 2020 à 8:51Mis à jour le 27 août 2020 à 13:58
Une manière de protester contre la décision du président américain de bannir l'application si le groupe ne vend pas ses opérations américaines d'ici à mi-septembre.
Kevin Mayer ne veut pas être englué dans la guerre froide technologique entre les Etats-Unis et la Chine. Trois mois après sa prise de fonctions, le patron américain de TikTok a annoncé, mercredi soir, démissionner suite à la pression exercée par Donald Trump pour que sa maison mère, le chinois ByteDance, vende entièrement les opérations de TikTok dans le pays à une société américaine. La plateforme de courtes vidéos virales compte 1 milliard d'utilisateurs, dont 100 millions aux Etats-Unis.
Cet ancien responsable du service de streaming Disney+ est remplacé par Vanessa Pappas, manageuse de la plateforme, le temps qu'un nouveau PDG soit nommé. L'embauche de Kevin Mayer devait aider TikTok à effacer ses racines chinoises - mais, en consacrant l'application comme un géant du divertissement capable de recruter un ponte de l'industrie, elle semble avoir encore plus attiré l'attention de Donald Trump sur sa force de frappe.
« Le coeur lourd »
« Au cours des dernières semaines, au fur et à mesure que l'environnement politique a sévèrement changé, j'ai profondément réfléchi à ce que les changements de la structure de l'entreprise vont exiger. […] Le rôle pour lequel j'ai signé - qui comprenait la direction de TikTok au niveau mondial - sera très différent car l'administration américaine pousse à vendre les opérations américaines », écrit Kevin Mayer dans une lettre aux employés pour justifier son départ « le coeur lourd ».
Selon le « Financial Times », il aurait décidé de jeter l'éponge après que Donald Trump a adopté un décret il y a trois semaines qui bannira l'application sur le territoire si ByteDance ne vend pas ses opérations américaines d'ici au 15 septembre.
Poursuite en justice
Lundi, le groupe chinois a poursuivi l'administration américaine en justice, l'accusant de violer la Constitution en ne lui donnant pas une chance de répondre avec un délai suffisant et en limitant la liberté d'expression. Une tactique qui pourrait lui
permettre d'obtenir un délai au-delà de l'élection présidentielle du 3 novembre, et ainsi de voir le décret tomber en cas d'élection du démocrate Joe Biden, qui n'a pas la même conception des relations avec la Chine.
L'administration républicaine estime que l'application, premier réseau social à avoir décollé aux Etats-Unis et en Europe, communique les données personnelles de ses concitoyens à Pékin. Elle l'accuse aussi de censurer certains contenus en fonction des consignes du Parti communiste, notamment sur la révolte pro-démocratie à Hong Kong ou l'oppression des musulmans Ouïghours dans la région du Xinjiang.
Donald Trump mène une croisade similaire contre l'équipementier télécoms chinois Huawei, qui souffre depuis la décision des Etats-Unis de le bannir des équipements 5G et de l'empêcher de se fournir en composants auprès de fabricants américains.
Microsoft et Oracle
TikTok assure n'avoir aucun lien avec le gouvernement chinois et stocker les données de ses utilisateurs américains et européens aux Etats-Unis et à Singapour. Le groupe estime que les Etats-Unis refusent que les champions technologiques chinois entrent sur le marché américain afin de protéger ses champions nationaux comme Facebook - l'inverse étant aussi souvent le cas en Chine, où les applications américaines sont régulièrement inaccessibles pour les utilisateurs chinois.
Les géants des logiciels Microsoft et Oracle ont chacun soumis des offres de rachat au cours de l'été et les négociations allaient bon train jusqu'à ce que Donald Trump impose cette deadline de mi-septembre, qui pénalise TikTok dans ses négociations. Le président a aussi exigé que le département du Trésor récupère « beaucoup d'argent » de la vente. Une requête qui pourrait compliquer la conclusion d'un accord.
Anaïs Moutot ( Correspondante à San Francisco)
Publié le 27 août 2020 à 8:51Mis à jour le 27 août 2020 à 13:58
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