Au terme de 12 années de recherche, des scientifiques de l’Université de Harvard (Cambridge, États-Unis) sont parvenus à concevoir un robot insecte miniaturisé appelé RoboBee, capable de réaliser des vols contrôlés. Une première, publiée le 3 mai 2013 dans la revue Science sous le titre « Controlled Flight of a Biologically Inspired, Insect-Scale Robot ».
D’un poids de 80 mg seulement, muni de deux ailes très minces battant de façon presque invisible à une fréquence de quelque 120 battements par seconde, l’anatomie de RoboBee est directement inspirée de la biologie de la mouche.
Pour concevoir RoboBee, Robert Wood et son équipe ont eu à lever de nombreux obstacles. Parmi ces derniers, il y avait la question du moteur. En effet, s’il est possible d’équiper des robots de taille normale avec des moteurs électromagnétiques, une telle stratégie n’est en revanche pas possible dans le cadre de la conception d’un robot miniaturisé de la taille de RoboBee.
Pour résoudre ce problème du moteur, les scientifiques de l’université de Harvard ont conçu de minuscules « muscles » piézo-électriques, se présentant sous la forme de bande de céramiques se dilatant et se contractant après application d’un champ électrique. Un choix technologique gagnant, puisque c’est ce dispositif qui permet à RoboBee de se déplacer dans les airs, en battant ses ailes à grande vitesse.
En guise d’articulation, les scientifiques américains ont fabriqué de minuscules charnières en plastique, qu’ils ont incorporées dans le corps de carbone de RoboBee. Au bout de chaque articulation, une aile, commandée de façon autonome.
Quelles applications pourraient découler de la conception de RoboBee ? A vrai dire, elles sont nombreuses. Les créateurs de RoboBee suggèrent que le robot insecte pourrait permettre de réaliser des opérations de surveillance des environnements à risque (tels que des lieux contenant des substances chimiques instables, situés dans des usines) : un système de surveillance distribué, c’est-à-dire reposant non pas sur un seul robot insecte, mais sur toute une flotte de ces derniers, pourrait par exemple se révéler extrêmement efficace. D’autres applications ont été imaginées, comme le recours à RoboBee pour des opérations de recherche et de sauvetage, ou pour les activités agricoles (par la mise au point de techniques d’assistance à la pollinisation des cultures, par exemple).
En attendant l’avènement de ces applications, des obstacles techniques restent encore toutefois à lever. A commencer par le système d’alimentation de RoboBee, qui est actuellement pour le moins rustique. Et pour cause, puisqu’à l’heure actuelle le prototype créé par les scientifiques de l’université d’Harvard reçoit son énergie… d’un câble d’alimentation très mince auxquel il est relié. En effet, aucune solution de stockage d’énergie suffisamment petite pour être embarquée sur le corps du robot n’a pour l’instant été trouvée.
Autre amélioration que les scientifiques Harvard souhaitent apporter prochainement : doter RoboBee d’un cerveau informatique miniaturisé, lui permettant de s’affranchir de l’ordinateur qui contrôle actuellement son vol.
De précédents insectes volants ont bien évidemment déjà été conçus dans le passé par d’autres laboratoires, comme l’AirBurr par exemple, créé par l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne. Mais ces prototypes sont généralement beaucoup plus gros que RoboBee (AirBurr pèse 300 g, alors que RoboBee pèse seulement 80 mg). Sans compter que leur vol est bien souvent aléatoire, au lieu d’être contrôlé par une instance tierce comme c’est le cas de RoboBee.
Références de l’étude :
Kevin Y. Ma, Pakpong Chirarattananon, Sawyer B. Fuller, and Robert J. Wood. Controlled Flight of a Biologically Inspired, Insect-Scale Robot. Science, 3 May 2013: 603-607 DOI: 10.1126/science.1231806
Science & Vie publié le 27/05/2013