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Légende photo: Pour Markus Kummer, le Forum est un lieu où l'on peut parler 'à haute voix'. (swissinfo)
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Qui se souvient du Sommet mondial de la société de l'information (SMSI)? Peut-être Samuel Schmid. Alors président de la Confédération, l'actuel ministre suisse de la Défense démissionnaire avait connu son heure de gloire internationale en dénonçant les entraves à la liberté posées par le régime tunisien à coté du principal intéressé, le toujours président Zine Ben Ali. Et ce en ouverture à Tunis de la 2ème phase du SMSI.
Pour le reste, la grand messe onusienne organisée par la Suisse et la Tunisie censée poser les jalons d'une société de l'information équitable n'a pas de retombée très visibles, à part peut-être le Forum pour la gouvernance de l'Internet, qui tient cette semaine sa 3ème réunion en Inde, à Hyderabad.
Délibératif et ouvert, ce forum ne prend pas de décision. Mais cette plateforme de discussion permet en amont d'élaborer les mesures que prendront les décideurs. Le forum traite de questions comme l'accès de tous à l'Internet, le respect de la diversité culturelle ou la cybersécurité.
Raison originelle de sa création par le SMSI, le forum débat aussi de l'architecture de l'internet. Cette question hautement politique concerne l'ICANN, une organisation privée basée en Californie ayant la charge de gérer les noms de domaine et les adresses IP, un système traité par 13 serveurs racine basés la plupart aux Etats-Unis. C'est le cœur de l'Internet.
Or, nombre d'Etats aimeraient prendre le contrôle de cette gestion. Ce que refusent les Etats-Unis. Le point sur ce dossier épineux avec le Suisse Markus Kummer, coordinateur exécutif du Forum pour la gouvernance de l'Internet (IGF)
swissinfo: Le gros enjeu de votre forum, c'est l'architecture de l'Internet et le rôle centrale joué par l'ICANN. Une position contestée par certains Etats. Où en est-on ?
M.K.: Tout d'abord, notre forum a su élargir le champ des questions posées par la gouvernance de l'Internet. Les ressources critiques (l'ICANN) ne sont qu'un aspect du problème.
Cela dit, les Etats-Unis n'ont montré aucune intention de changer l'architecture de base. Mais il faut souligner qu'ils n'ont jamais abusé de leurs prérogatives et ont garanti l'ouverture du système. Leur soi-disant contrôle n'est pas aussi direct que certain le croient. C'est une autorité de surveillance.
Mais il est vrai qu'un bon nombre de pays ne voient pas d'un bon œil le rôle de « primus inter pares » joué par les Etats-Unis. Tout le monde attend donc la nouvelle administration pour voir si des changements peuvent advenir. Je rappelle toutefois que l'architecture de l'Internet telle que nous la connaissons a été mise en place par l'administration Clinton. Et beaucoup de personnes de cette administration vont se retrouver dans la nouvelle administration.
Il ne faut pas non plus oublier que l'ICANN fait preuve d'innovation en matière de coopération internationale. A travers une participation de toutes les parties prenantes. Les Etats ont un rôle consultatif mais pas décisionnel.
Selon les Etats-Unis, cette prédominance du secteur privé permet une plus grande réactivité par rapport aux évolutions technologiques. Une intervention accrue des Etats, elle, risquerait de freiner les progrès technologiques.
Le protocole Internet existe depuis 35 ans. Et comme le disent les spécialistes, nous n'en sommes qu'au début et de grands développements nous attendent. Faut-il laisser l'industrie avoir le leadership ou faut-il assurer un contrôle étatique ? La question reste posée.
swissinfo: Qu'en pense la Chine, un Etat connu pour sa volonté de surveiller l'Internet?
M.K.: La Chine a toujours voulu que l'ICANN soit dirigée par les gouvernements. La Chine ne participe pas au «government advisory commitee » de l'ICANN. Mais au niveau technique, elle participe à toutes les enceintes de l'organisme
Il faut d'ailleurs rappeler que la Chine est déjà le premier pays en terme d'utilisateurs et des centaines de millions d'autres Chinois vont le devenir.
swissinfo: Votre forum se situe en amont des instances de décision. Avez-vous des exemples où votre forum a influencé les décideurs?
M.K.: Nous n'avons pas un impact direct sur les dossiers. Mais notre influence est réelle. Je viens de rentrer de Nairobi ou s'est tenu une réunion sur la gouvernance de l'internet pour l'Afrique de l'Est. C'est la première fois pour ces pays que des représentants gouvernementaux se sont réunis avec des partenaires privés et la société civile. Cette réunion régionale, comme d'autre organisée par notre forum marque donc le début d'un dialogue multi-partenaires (ONG, entreprises, universités, gouvernements) dans plusieurs régions du monde.
Sur certain thèmes, notre forum a permis de former des coalitions dynamiques, comme dans le cas de la protection de l'enfance. Une récente réunion de l'IGF a permis aux divers groupes actifs contre la pornographie enfantine de se retrouver et de coordonner leurs initiatives. A cette occasion, ces ONG ont également pu rencontrer et inclure des ONG actives dans d'autres domaines, comme Amnesty International. L'ONG a ainsi pu les rendre attentif au fait qu'on peut aussi profiter de ce combat contre la pornographie enfantine pour étouffer la liberté d'expression.
Le point fort de l'IGF est de réunir des gens qui ne se rencontreraient pas autrement. On peut également y penser à haute voix, contrairement aux cénacles diplomatiques.
Interview swissinfo, Frédéric Burnand à Genève
Légende photo: Pour Markus Kummer, le Forum est un lieu où l'on peut parler 'à haute voix'. (swissinfo)
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Pour le reste, la grand messe onusienne organisée par la Suisse et la Tunisie censée poser les jalons d'une société de l'information équitable n'a pas de retombée très visibles, à part peut-être le Forum pour la gouvernance de l'Internet, qui tient cette semaine sa 3ème réunion en Inde, à Hyderabad.
Délibératif et ouvert, ce forum ne prend pas de décision. Mais cette plateforme de discussion permet en amont d'élaborer les mesures que prendront les décideurs. Le forum traite de questions comme l'accès de tous à l'Internet, le respect de la diversité culturelle ou la cybersécurité.
Raison originelle de sa création par le SMSI, le forum débat aussi de l'architecture de l'internet. Cette question hautement politique concerne l'ICANN, une organisation privée basée en Californie ayant la charge de gérer les noms de domaine et les adresses IP, un système traité par 13 serveurs racine basés la plupart aux Etats-Unis. C'est le cœur de l'Internet.
Or, nombre d'Etats aimeraient prendre le contrôle de cette gestion. Ce que refusent les Etats-Unis. Le point sur ce dossier épineux avec le Suisse Markus Kummer, coordinateur exécutif du Forum pour la gouvernance de l'Internet (IGF)
swissinfo: Le gros enjeu de votre forum, c'est l'architecture de l'Internet et le rôle centrale joué par l'ICANN. Une position contestée par certains Etats. Où en est-on ?
M.K.: Tout d'abord, notre forum a su élargir le champ des questions posées par la gouvernance de l'Internet. Les ressources critiques (l'ICANN) ne sont qu'un aspect du problème.
Cela dit, les Etats-Unis n'ont montré aucune intention de changer l'architecture de base. Mais il faut souligner qu'ils n'ont jamais abusé de leurs prérogatives et ont garanti l'ouverture du système. Leur soi-disant contrôle n'est pas aussi direct que certain le croient. C'est une autorité de surveillance.
Mais il est vrai qu'un bon nombre de pays ne voient pas d'un bon œil le rôle de « primus inter pares » joué par les Etats-Unis. Tout le monde attend donc la nouvelle administration pour voir si des changements peuvent advenir. Je rappelle toutefois que l'architecture de l'Internet telle que nous la connaissons a été mise en place par l'administration Clinton. Et beaucoup de personnes de cette administration vont se retrouver dans la nouvelle administration.
Il ne faut pas non plus oublier que l'ICANN fait preuve d'innovation en matière de coopération internationale. A travers une participation de toutes les parties prenantes. Les Etats ont un rôle consultatif mais pas décisionnel.
Selon les Etats-Unis, cette prédominance du secteur privé permet une plus grande réactivité par rapport aux évolutions technologiques. Une intervention accrue des Etats, elle, risquerait de freiner les progrès technologiques.
Le protocole Internet existe depuis 35 ans. Et comme le disent les spécialistes, nous n'en sommes qu'au début et de grands développements nous attendent. Faut-il laisser l'industrie avoir le leadership ou faut-il assurer un contrôle étatique ? La question reste posée.
swissinfo: Qu'en pense la Chine, un Etat connu pour sa volonté de surveiller l'Internet?
M.K.: La Chine a toujours voulu que l'ICANN soit dirigée par les gouvernements. La Chine ne participe pas au «government advisory commitee » de l'ICANN. Mais au niveau technique, elle participe à toutes les enceintes de l'organisme
Il faut d'ailleurs rappeler que la Chine est déjà le premier pays en terme d'utilisateurs et des centaines de millions d'autres Chinois vont le devenir.
swissinfo: Votre forum se situe en amont des instances de décision. Avez-vous des exemples où votre forum a influencé les décideurs?
M.K.: Nous n'avons pas un impact direct sur les dossiers. Mais notre influence est réelle. Je viens de rentrer de Nairobi ou s'est tenu une réunion sur la gouvernance de l'internet pour l'Afrique de l'Est. C'est la première fois pour ces pays que des représentants gouvernementaux se sont réunis avec des partenaires privés et la société civile. Cette réunion régionale, comme d'autre organisée par notre forum marque donc le début d'un dialogue multi-partenaires (ONG, entreprises, universités, gouvernements) dans plusieurs régions du monde.
Sur certain thèmes, notre forum a permis de former des coalitions dynamiques, comme dans le cas de la protection de l'enfance. Une récente réunion de l'IGF a permis aux divers groupes actifs contre la pornographie enfantine de se retrouver et de coordonner leurs initiatives. A cette occasion, ces ONG ont également pu rencontrer et inclure des ONG actives dans d'autres domaines, comme Amnesty International. L'ONG a ainsi pu les rendre attentif au fait qu'on peut aussi profiter de ce combat contre la pornographie enfantine pour étouffer la liberté d'expression.
Le point fort de l'IGF est de réunir des gens qui ne se rencontreraient pas autrement. On peut également y penser à haute voix, contrairement aux cénacles diplomatiques.
Interview swissinfo, Frédéric Burnand à Genève