En 1213, le roi Jean d’Angleterre envoya une délégation diplomatique dans ce qui est actuellement le Maroc, pour conclure un accord avec le sultan almohade Mohamed Ennassir. L’offre prévoyait une conversion à l’islam, ainsi que le rattachement du royaume aux Almohades.
Cette année 2024 marque le 811e anniversaire des liens diplomatiques entre le Maroc et la Grande-Bretagne. En 1213, le roi Jean d’Angleterre envoya la première délégation au royaume nord-africain. La mission fut la première de l’ambassade d’Angleterre, marquant le début de relations qui durèrent des siècles.
Quelques centaines d’années plus tard, le Maroc et le Royaume-Uni signaient leur premier accord bilatéral, dit le traité anglo-marocain de 1721, relatif à la circulation des personnes et des biens.
Mais les débuts étaient difficiles. L’ambassade du roi Jean auprès du sultan de la dynastie almohade Mohamed Ennassir était essentiellement un appel de détresse. Jean espérait pouvoir obtenir le soutien des Almohades dans sa lutte contre ses ennemis.
En effet, les barons d’Angleterre avaient juré de destituer le roi Jean, après lui avoir reproché de ne pas avoir honoré l’accord précédemment conclu avec eux. Ils offrirent le trône au fils du roi de France, en échange du soutien à leur rébellion.
L’ambassade du roi Jean auprès du sultan almohade fut documentée dans les chroniques de Matthew Paris, membre de la communauté bénédictine anglaise de St Albans et historien de longue date. Dans le tome II de sa Chronica Majora, Paris évoqua l’ambassade.
Mettre l’Angleterre sous la tutelle du Maroc
Selon l’orientaliste britannique Edward Denison Ross, le roi était tellement désespéré qu’il aurait même proposé de se convertir à l’islam, en échange du soutien des Almohades qui contrôlaient alors Al-Andalus (Espagne). Citant Chronica Majora, le chercheur expliqua que le roi Jean avait mobilisé «en toute hâte les envoyés les plus secrets», Thomas de Herdington, Radulfus, fils de l’écuyer Nicolas et Robert de Londres, un clerc.
Les trois hommes annoncèrent au sultan marocain, Amir al-muminin, que le roi Jean «était tout à fait prêt à se livrer et à se faire retirer le trône de son royaume, si [le sultan Mohamed Ennassir] acceptait d’en devenir le tributaire».
De plus, l’histoire retint que le roi Jean «non seulement renoncerait à la foi chrétienne, qu’il considérait comme vaine, mais adhérerait fidèlement aux préceptes du prophète Mohammed».
L’ambassade anglaise obtint une audience avec le sultan et la lettre du roi Jean au sultan a été traduite. Cependant, cette offre inhabituelle ne fut jamais acceptée par Ennassir. Il fit même la leçon aux ambassadeurs du roi Jean sur «la honte de la conversion religieuse».
Paris affirme avoir entendu lui-même l’histoire de la mission, alors qu’il fréquentait Robert de Londres, l’un des envoyés auprès de la cour marocaine, décoré par le roi Jean pour son rôle diplomatique.
Perdu dans la traduction ?
L’histoire de l’ambassade anglaise auprès des Almohades fut discréditée depuis l’époque victorienne par les historiens britanniques. Ces derniers avancèrent que l’offre du roi Jean serait loin des faits réels.
Bien que certains d’entre eux reconnaissaient l’ambassade anglaise, ils estimèrent qu’il s’agissait d’une simple offre de soutien face aux ennemis du roi Jean, rejetant les détails du renoncement au christianisme et de la cession de l’Angleterre aux Almohades.
Compte tenu de l’animosité bien connue de Paris envers Jean et de sa connaissance des traités antérieurs entre les monarques chrétiens et les Almohades», le récit de Paris «suggèra l’existence d’une mission diplomatique visant à proposer une offre assez standard d’alliance défensive entre John et Ennassir, dans le cadre de la grande campagne de John pour affronter Philippe Auguste», expliqua l’historien médiéval méditerranéen Joel Pattison.
Citant la Délégation du roi Jean à la cour almohade de l’historien Ilan Shoval (1212), Pattison expliqua en outre que «Jean n’avait jamais eu l’intention de soumettre l’Angleterre elle-même à l’autorité almohade, mais il pensait à ses fiefs de Gascogne et d’Aquitaine, dont les butins pourraient lui être utiles. Il fut proposé de mettre à la disposition des Almohades la même chose que les Almohades avaient fait pour leur allié Sancho VII de Navarre (1194-1234), une décennie plus tôt».
Malgré le non-aboutissement d’un accord entre les Almohades et le roi Jean, l’ambassade anglaise resta l’une des premières missions diplomatiques et mentions des relations entre le Maroc et l’Angleterre.
Ya bil
Cette année 2024 marque le 811e anniversaire des liens diplomatiques entre le Maroc et la Grande-Bretagne. En 1213, le roi Jean d’Angleterre envoya la première délégation au royaume nord-africain. La mission fut la première de l’ambassade d’Angleterre, marquant le début de relations qui durèrent des siècles.
Quelques centaines d’années plus tard, le Maroc et le Royaume-Uni signaient leur premier accord bilatéral, dit le traité anglo-marocain de 1721, relatif à la circulation des personnes et des biens.
Mais les débuts étaient difficiles. L’ambassade du roi Jean auprès du sultan de la dynastie almohade Mohamed Ennassir était essentiellement un appel de détresse. Jean espérait pouvoir obtenir le soutien des Almohades dans sa lutte contre ses ennemis.
En effet, les barons d’Angleterre avaient juré de destituer le roi Jean, après lui avoir reproché de ne pas avoir honoré l’accord précédemment conclu avec eux. Ils offrirent le trône au fils du roi de France, en échange du soutien à leur rébellion.
L’ambassade du roi Jean auprès du sultan almohade fut documentée dans les chroniques de Matthew Paris, membre de la communauté bénédictine anglaise de St Albans et historien de longue date. Dans le tome II de sa Chronica Majora, Paris évoqua l’ambassade.
Mettre l’Angleterre sous la tutelle du Maroc
Selon l’orientaliste britannique Edward Denison Ross, le roi était tellement désespéré qu’il aurait même proposé de se convertir à l’islam, en échange du soutien des Almohades qui contrôlaient alors Al-Andalus (Espagne). Citant Chronica Majora, le chercheur expliqua que le roi Jean avait mobilisé «en toute hâte les envoyés les plus secrets», Thomas de Herdington, Radulfus, fils de l’écuyer Nicolas et Robert de Londres, un clerc.
Les trois hommes annoncèrent au sultan marocain, Amir al-muminin, que le roi Jean «était tout à fait prêt à se livrer et à se faire retirer le trône de son royaume, si [le sultan Mohamed Ennassir] acceptait d’en devenir le tributaire».
De plus, l’histoire retint que le roi Jean «non seulement renoncerait à la foi chrétienne, qu’il considérait comme vaine, mais adhérerait fidèlement aux préceptes du prophète Mohammed».
L’ambassade anglaise obtint une audience avec le sultan et la lettre du roi Jean au sultan a été traduite. Cependant, cette offre inhabituelle ne fut jamais acceptée par Ennassir. Il fit même la leçon aux ambassadeurs du roi Jean sur «la honte de la conversion religieuse».
Paris affirme avoir entendu lui-même l’histoire de la mission, alors qu’il fréquentait Robert de Londres, l’un des envoyés auprès de la cour marocaine, décoré par le roi Jean pour son rôle diplomatique.
Perdu dans la traduction ?
L’histoire de l’ambassade anglaise auprès des Almohades fut discréditée depuis l’époque victorienne par les historiens britanniques. Ces derniers avancèrent que l’offre du roi Jean serait loin des faits réels.
Bien que certains d’entre eux reconnaissaient l’ambassade anglaise, ils estimèrent qu’il s’agissait d’une simple offre de soutien face aux ennemis du roi Jean, rejetant les détails du renoncement au christianisme et de la cession de l’Angleterre aux Almohades.
Compte tenu de l’animosité bien connue de Paris envers Jean et de sa connaissance des traités antérieurs entre les monarques chrétiens et les Almohades», le récit de Paris «suggèra l’existence d’une mission diplomatique visant à proposer une offre assez standard d’alliance défensive entre John et Ennassir, dans le cadre de la grande campagne de John pour affronter Philippe Auguste», expliqua l’historien médiéval méditerranéen Joel Pattison.
Citant la Délégation du roi Jean à la cour almohade de l’historien Ilan Shoval (1212), Pattison expliqua en outre que «Jean n’avait jamais eu l’intention de soumettre l’Angleterre elle-même à l’autorité almohade, mais il pensait à ses fiefs de Gascogne et d’Aquitaine, dont les butins pourraient lui être utiles. Il fut proposé de mettre à la disposition des Almohades la même chose que les Almohades avaient fait pour leur allié Sancho VII de Navarre (1194-1234), une décennie plus tôt».
Malgré le non-aboutissement d’un accord entre les Almohades et le roi Jean, l’ambassade anglaise resta l’une des premières missions diplomatiques et mentions des relations entre le Maroc et l’Angleterre.
Ya bil
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