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Srebrenica : quelles leçons pour les musulmans d’Europe ?
20 ans après le carnage, cette question est toujours pertinente. Y a-t-il vraiment une place pour l'islam et les musulmans en Europe ? Il y a vingt ans, un peuple européen a été massacré parce qu’il croyait en l'islam !
En pleine frénésie de l’actualité internationale entre l’Iran et la Grèce, la presse française a largement oublié de couvrir les commémorations du dernier génocide européen du XXème siècle. C’est bien la singularité de ce génocide : il y a 20 ans, une tragédie s'est abattue sur Srebrenica et depuis, on enterre chaque année de nouvelles victimes. Au cœur de l'Europe, 8342 hommes ont été tués parce qu'ils étaient musulmans. Des Bosniaques fauchés par des Serbes. Avec les Croates, tout ce beau monde constitue pourtant le même peuple, des Slaves, mais le seul fait d'appartenir à des religions différentes (orthodoxie pour les Serbes, catholicisme pour les Croates et islam pour les Bosniaques) a embrasé la région dans les années 90.
Aujourd'hui même, l'architecture institutionnelle de la Bosnie repose encore sur cette différenciation religieuse. Tout le monde a souffert mais ce sont les musulmans qui ont payé le prix le plus fort : ils ont été tout bonnement la cible d'une politique d'annihilation. Et pour ne pas rejaillir à la surface du monde, leurs dépouilles ont été transférées de charniers en charniers ! C'est ce lourd travail de deuil que mènent chaque année les Bosniaques afin d'offrir à leurs morts, leurs quatre planches. Tout un rituel s'est mis en place : des gens déterminés recherchent, creusent, ramassent, identifient et tous les ans, on inhume les quelques corps retrouvés. Cette année, 132 dépouilles ont pu rejoindre leur demeure éternelle. Il en reste près de 1300, quelque part là-bas. Une tâche qui serait loin de se terminer de sitôt, selon les spécialistes. Les familles ont beau conjurer les bourreaux de bien daigner leur révéler l'endroit des fosses communes pour accélérer les enterrements, elles n'ont droit à qu'à la bassesse poussée jusqu'au bout : l'impitoyabilité. Avec ça, on forme un pays ! La réconciliation devient impossible mais on se trouve dans une situation baroque où ce sont les victimes qui la demandent !On a plus d'une fois été témoin de scènes «fantastiques» où l'on croise par exemple le tortionnaire habiter à quelques mètres de la victime, dans l'ancienne maison de celui-ci par-dessus le marché ! Comme le disait Pierre-Vidal Naquet, les «Assassins de la mémoire» vont jusqu'à organiser une célébration parallèle en hommage aux soldats serbes ! L'Union européenne tente de casser cette intransigeance en forçant la main au Premier ministre serbe (qui a essayé de se recueillir à Srebrenica avant d'être conspué par une foule en colère) mais ce n'est pas l'officiel qui réglera le problème. Les mères errantes recherchent les restes de leurs petits et certains savent où ils se trouvent mais se taisent. Là où l'inhumanité persiste, l'espoir s'évanouit.
Le pape François avait accusé le mois dernier les Alliés de ne pas avoir agi pour éviter le Shoah: «Les Alliés avaient les photos de lignes de chemin de fer qui menaient aux camps où étaient assassinés les Juifs. Pourquoi n’ont-ils pas bombardé ces lignes de chemins de fer ?». Alors, à peine quatre décennies après l'Holocauste, pourquoi la France, les Etats-Unis et l’Angleterre n’ont strictement rien fait pour éviter ce premier génocide à être diffusé en direct ? 20 ans après le carnage, cette question est toujours pertinente. Y a-t-il vraiment une place pour l'islam et les musulmans en Europe ? Il y a vingt ans, un peuple européen a été massacré parce qu’il croyait en l'islam ! Si un peuple autochtone pouvait être une cible à cause de sa religion, quel avenir doit-on envisager pour les immigrés musulmans ? Et aujourd'hui, malgré l’ascension des partis politiques comme Pegida, FN ou EDL, nous en sommes toujours à débattre sur la terminologie : "l’islamophobie" est-il le bon terme ou pas pour décrire le racisme anti-musulman... Or, il reste essentiel pour les musulmans d’Europe de connaître cette tragédie et de la faire vivre dans la mémoire collective de l’Islam en Europe.
zamanfrance
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