Un article qui date de 2008 mais qui reste d'actualité . Afin de prévenir toute attaque intempestive ou supputation quant à mes intentions, non, je ne le poste pas par dérision ni par moquerie.
Interdit à la femme de s’asseoir sur une chaise ou de surfer sur internet en l’absence d’un tuteur, interdit de jouer au football ou d’apprendre l’anglais: à en croire les prédicateurs, le champ du licite se réduit comme une peau de chagrin en Arabie saoudite, un souk juteux pour les marchands de fatwas. Investisseurs dans le marché lucratif de fatwas
«Il faudrait interdire ce marché de fatwas. Il est illicite d’utiliser la religion à des fins lucratives», a déclaré cheikh Abdel Mohsen Al-Oubikane, membre du Conseil consultatif et conseiller au ministère de la Justice.
Il a déploré «la grande pagaille créée par les fatwas anarchiques», particulièrement florissantes durant Ramadan, le mois de jeûne musulman, a rapporté le 25 septembre 2008 le quotidien al-Riyadh.
Des dizaines d’oulémas et de prédicateurs se sont relayés sur les chaînes de télévision satellitaires pour émettre des décrets religieux, le plus souvent saugrenus et parfois sanguinaires.
Fausses solutions à de faux problèmes
D’autres offrent leurs services «à la carte», en répondant à des questions ponctuelles et en fournissant de fausses solutions à de faux problèmes, via internet ou, encore mieux, par des SMS payants.
Selon al-Riyadh, un prédicateur saoudien a pu atteindre le chiffre record de 150.000 abonnés.
«Fatwas On-Live: Posez votre question et le cheikh répondra directement. Seuls les abonnés pourront y accéder. Inscrivez-vous en pressant ici. Et surtout, ne vous privez pas du bien !», dit l’une des nombreuses offres sur internet.
Marché de gros
Une autre propose «un programme de milliers de fatwas édictées au cours des cent dernières années par la Commission de Fatwa d’Al-Azhar» et recommande à «tous les musulmans de le décharger».
Récemment, le rédacteur-en-chef du quotidien saoudien al-Jazirah, Mohamed Abdellatif Al-Cheikh, écrivait que «l’investissement dans les fatwas est un pillage illégitime et honteux de l’argent» des autres et pressait les autorités à interdire «ce business facile».
Une tour de Babel
«Dans ce souk aux fatwas, il y a de tout: des fatwas politiques avec un habillage religieux, des fatwas religieuses avec des connotations politiques, des fatwas sur mesure, un mufti autorise ce qu’un autre interdit… c’est une tour de Babel ! », écrivait un internaute dans la foulée des commentaires suscitées par la fièvre de fatwas émises par de grands dignitaires religieux saoudiens ou officiant dans le royaume.
Les plus controversées étaient un appel au meurtre de propriétaires de chaînes de télévision dépravées et un autre, d’origine syrienne, à en découdre avec Mickey Mouse et ses congénères sataniques.
Ces fatwas en série, qui n’ont pas échappé aux medias occidentaux, ont également été tournées en dérision par de nombreux éditorialistes de journaux saoudiens et ridiculisées par d’innombrables lecteurs.
Des fatwas-anecdotes
Certains se sont même amusés à faire des inventaires des «insanités» proférées par des «vedettes des satellitaires» et des «fatwas online».
Ainsi, la chaise est une invention occidentale. Le prophète s’asseyait à même le sol. Et cela rapproche du créateur. Une femme ne doit pas s’asseoir sur une chaise parce qu’ainsi, elle étale ses charmes … Et puis, la chaise est (un mot) «masculin», en arabe !!
La nature «perfide» de la femme ne doit pas lui permettre de surfer toute seule sur la Toile. Elle ne doit l’ouvrir qu’en présence d’un tuteur mâle, ont décrété deux prédicateurs éminents.
Un autre cheikh a démontré, en 36 pages, que la pratique du football est illicite si elle ne remplissait pas «quinze conditions», la première étant que ce jeu ait pour objectif de «fortifier le corps pour … se consacrer au jihad ! ».
Quant à l’apprentissage de la langue anglaise, il détourne l’enfant de la langue arabe et lui apprend en même temps à aimer les natifs de cette langue étrangère.
Même verdict pour la chimie, «une forme de magie», les chaussures à talons hauts, «mensongères, parce qu’elles montrent la femme plus grande que nature», sans compter l’interdiction pour la femme voilée de porter des vêtements de couleurs, à l’exclusion du noir, pour un homme de se couper les cheveux un vendredi ou de porter la cravate et pour un fidèle d’applaudir, de rire …
Des Saoudiens excédés: l’Arabie dans la ligne de mire …
«Décidément, nos oulémas ne nous laissent rien de licite», constate un internaute.«Nous en avons assez de ces fatwas ridicules qui suscitent le mépris du monde pour notre pays et pour notre religion», renchérit un deuxième.
«Nous devons être prudents... D’aucuns nous attendent au tournant et sont à l’affut du moindre lapsus pour l’exploiter à leur guise», écrivait récemment le bloggeur Mohamed Al-Maghlouth .
«L’Arabie saoudite est sous les projecteurs. Chaque mot proféré par un dignitaire religieux est automatiquement repris par les journaux et les sites internet internationaux, pour faire l’objet de raillerie », renchérit son concitoyen Thamar Al-Marzouki .
Une «ligue mondiale de jurisprudence»
Cette boulimie de fatwas, souvent malheureuses, a amené cheikh Oubikane à appeler, le 25 septembre, à la mise en place d’une «ligue mondiale de jurisprudence» qui serait «ouverte à toutes les confessions musulmanes, et ne groupant pas moins de cent oulémas, pour promulguer les fatwas après les avoir vérifiées et passées au crible. La ligue sera ainsi l’unique référence pour tous les musulmans».
Mais son appel, publié par le quotidien al-Riyadh, a aussitôt provoqué une levée de boulier…Plusieurs lecteurs ont rejeté avec force l’idée d’associer les «rafidha» (terme péjoratif utilisé par les sunnites pour désigner les chiites) à un tel projet.
«Avons-nous oublié que les rafidha insultent Abou Bakr et Omar (les compagnons du prophète Mahomet) et Aïcha (la femme préférée du prophète) ? Avons-nous oublié que les rafidha sont en train d’exterminer les sunnites en Irak ? «Comment ose-t-on nous dire ensuite: unissons nos fatwas avec eux ?!», s’est indigné un lecteur.
«Cela revient à réunir le jour et la nuit», a répondu un autre.
Habib TRABELSI
Interdit à la femme de s’asseoir sur une chaise ou de surfer sur internet en l’absence d’un tuteur, interdit de jouer au football ou d’apprendre l’anglais: à en croire les prédicateurs, le champ du licite se réduit comme une peau de chagrin en Arabie saoudite, un souk juteux pour les marchands de fatwas. Investisseurs dans le marché lucratif de fatwas
«Il faudrait interdire ce marché de fatwas. Il est illicite d’utiliser la religion à des fins lucratives», a déclaré cheikh Abdel Mohsen Al-Oubikane, membre du Conseil consultatif et conseiller au ministère de la Justice.
Il a déploré «la grande pagaille créée par les fatwas anarchiques», particulièrement florissantes durant Ramadan, le mois de jeûne musulman, a rapporté le 25 septembre 2008 le quotidien al-Riyadh.
Des dizaines d’oulémas et de prédicateurs se sont relayés sur les chaînes de télévision satellitaires pour émettre des décrets religieux, le plus souvent saugrenus et parfois sanguinaires.
Fausses solutions à de faux problèmes
D’autres offrent leurs services «à la carte», en répondant à des questions ponctuelles et en fournissant de fausses solutions à de faux problèmes, via internet ou, encore mieux, par des SMS payants.
Selon al-Riyadh, un prédicateur saoudien a pu atteindre le chiffre record de 150.000 abonnés.
«Fatwas On-Live: Posez votre question et le cheikh répondra directement. Seuls les abonnés pourront y accéder. Inscrivez-vous en pressant ici. Et surtout, ne vous privez pas du bien !», dit l’une des nombreuses offres sur internet.
Marché de gros
Une autre propose «un programme de milliers de fatwas édictées au cours des cent dernières années par la Commission de Fatwa d’Al-Azhar» et recommande à «tous les musulmans de le décharger».
Récemment, le rédacteur-en-chef du quotidien saoudien al-Jazirah, Mohamed Abdellatif Al-Cheikh, écrivait que «l’investissement dans les fatwas est un pillage illégitime et honteux de l’argent» des autres et pressait les autorités à interdire «ce business facile».
Une tour de Babel
«Dans ce souk aux fatwas, il y a de tout: des fatwas politiques avec un habillage religieux, des fatwas religieuses avec des connotations politiques, des fatwas sur mesure, un mufti autorise ce qu’un autre interdit… c’est une tour de Babel ! », écrivait un internaute dans la foulée des commentaires suscitées par la fièvre de fatwas émises par de grands dignitaires religieux saoudiens ou officiant dans le royaume.
Les plus controversées étaient un appel au meurtre de propriétaires de chaînes de télévision dépravées et un autre, d’origine syrienne, à en découdre avec Mickey Mouse et ses congénères sataniques.
Ces fatwas en série, qui n’ont pas échappé aux medias occidentaux, ont également été tournées en dérision par de nombreux éditorialistes de journaux saoudiens et ridiculisées par d’innombrables lecteurs.
Des fatwas-anecdotes
Certains se sont même amusés à faire des inventaires des «insanités» proférées par des «vedettes des satellitaires» et des «fatwas online».
Ainsi, la chaise est une invention occidentale. Le prophète s’asseyait à même le sol. Et cela rapproche du créateur. Une femme ne doit pas s’asseoir sur une chaise parce qu’ainsi, elle étale ses charmes … Et puis, la chaise est (un mot) «masculin», en arabe !!
La nature «perfide» de la femme ne doit pas lui permettre de surfer toute seule sur la Toile. Elle ne doit l’ouvrir qu’en présence d’un tuteur mâle, ont décrété deux prédicateurs éminents.
Un autre cheikh a démontré, en 36 pages, que la pratique du football est illicite si elle ne remplissait pas «quinze conditions», la première étant que ce jeu ait pour objectif de «fortifier le corps pour … se consacrer au jihad ! ».
Quant à l’apprentissage de la langue anglaise, il détourne l’enfant de la langue arabe et lui apprend en même temps à aimer les natifs de cette langue étrangère.
Même verdict pour la chimie, «une forme de magie», les chaussures à talons hauts, «mensongères, parce qu’elles montrent la femme plus grande que nature», sans compter l’interdiction pour la femme voilée de porter des vêtements de couleurs, à l’exclusion du noir, pour un homme de se couper les cheveux un vendredi ou de porter la cravate et pour un fidèle d’applaudir, de rire …
Des Saoudiens excédés: l’Arabie dans la ligne de mire …
«Décidément, nos oulémas ne nous laissent rien de licite», constate un internaute.«Nous en avons assez de ces fatwas ridicules qui suscitent le mépris du monde pour notre pays et pour notre religion», renchérit un deuxième.
«Nous devons être prudents... D’aucuns nous attendent au tournant et sont à l’affut du moindre lapsus pour l’exploiter à leur guise», écrivait récemment le bloggeur Mohamed Al-Maghlouth .
«L’Arabie saoudite est sous les projecteurs. Chaque mot proféré par un dignitaire religieux est automatiquement repris par les journaux et les sites internet internationaux, pour faire l’objet de raillerie », renchérit son concitoyen Thamar Al-Marzouki .
Une «ligue mondiale de jurisprudence»
Cette boulimie de fatwas, souvent malheureuses, a amené cheikh Oubikane à appeler, le 25 septembre, à la mise en place d’une «ligue mondiale de jurisprudence» qui serait «ouverte à toutes les confessions musulmanes, et ne groupant pas moins de cent oulémas, pour promulguer les fatwas après les avoir vérifiées et passées au crible. La ligue sera ainsi l’unique référence pour tous les musulmans».
Mais son appel, publié par le quotidien al-Riyadh, a aussitôt provoqué une levée de boulier…Plusieurs lecteurs ont rejeté avec force l’idée d’associer les «rafidha» (terme péjoratif utilisé par les sunnites pour désigner les chiites) à un tel projet.
«Avons-nous oublié que les rafidha insultent Abou Bakr et Omar (les compagnons du prophète Mahomet) et Aïcha (la femme préférée du prophète) ? Avons-nous oublié que les rafidha sont en train d’exterminer les sunnites en Irak ? «Comment ose-t-on nous dire ensuite: unissons nos fatwas avec eux ?!», s’est indigné un lecteur.
«Cela revient à réunir le jour et la nuit», a répondu un autre.
Habib TRABELSI
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