lundi 25 mai 2009 - par Jean-Michel Cros
Ce n’est pas de la conversion réelle, effective, d’une personne à l’islam dont je vais vous parler aujourd’hui. La conversion à partir de quelque religion que ce soit vers quelque religion que ce soit est – devrait être – un acte privé, librement consenti, n’engageant que celui qui le fait dans une relation verticale avec son Dieu.
J’ai envie de vous parler ici d’une autre forme de conversion, d’une conversion forcée en quelques sortes : celle de la conversion « imaginaire », supposée, des chercheurs et autres agents ou acteurs publics qui travaillent sur l’islam, gèrent des dossiers concernant l’islam, sont en rapports professionnels avec des musulmans.
Pour de nombreux d’entre nous, chercheurs, praticiens, nous développons sur la question de l’islam en général non pas des « points de vues », des « opinions », mais un discours fondé sur l’étude et la connaissance du milieu sur lequel nous travaillons ; certains – au demeurant assez rares - portent en outre une parole politique fondée – par exemple - sur le concept de citoyenneté de résidence, qui s’ajoute à l’égalité de traitement et de neutralité dans la gestion des dossiers que beaucoup d’entre nous réclament et pratiquent au quotidien.
Il semble que ces discours et ces pratiques, un peu à contre-courant il est vrai, soient particulièrement dérangeants puisque, tout au moins dans la mesure où l’on ne développe pas un discours « a priori » négatif sur l’islam, l’on cherche à les expliquer nos analyses, nos propositions, par des motifs tirés de la vie privée, bien souvent imaginaire, de ceux dont on parle.
Quelques exemples vont éclairer mon propos.
Je reviendrai tout d’abord ici brièvement sur une légende qui me paraît véritablement archétypique : celle de « l’amant turc » prêté à une ancienne ministre, liaison qui aurait expliqué (« mais oui mais c’est bien sûr ! ») ses prises de positions politiques sur l’immigration, la construction de lieux de cultes musulmans, la participation des étrangers à la vie politique de la cité.
Cette histoire, dégradante pour ceux qui l’ont colportée dans ce qu’elle révèle de leur mentalité et de leurs méthodes, me paraît véritablement emblématique en ce qu’elle en dit plus sur les porteurs de ragots que sur celle qui en était l’objet : incapables d’imaginer un horizon politique différent de celui qu’ils voient de leurs fenêtres, sans projet, sans idéal, ils discourent sur la liberté, l’égalité et la fraternité à perte de vue… tant que la seule idée d’un minaret ne vient pas faire d’ombre à leurs pots de géraniums sagement rangés devant la fenêtre depuis laquelle ils contemplent le monde.
Apparemment incapables d’imaginer que l’on puisse agir par conviction, par idéal politique ou social, que l’on puisse s’intéresser à autre chose que ce que l’on est soi-même, que l’on puisse prendre de la distance par rapport à soi et à ses valeurs d’origine, ils ne voient pas autre chose qu’un intérêt purement personnel, et si possible d’ordre privé, qui puisse animer une conscience, ce type de discours leur permettant de plus de broder avec facilité sur l’imaginaire de la sexualité coloniale – la sexualité débridée de l’indigène à laquelle certaines (voire certains) succomberaient au prix de leur raison et de leur autonomie de jugement. Etroitesse et petitesse semblent être les deux mamelles taries de cette politique.
Il en est de même de la « conversion à l’islam » de nombreux chercheurs et « praticiens » du fait musulman.
Je tiens à préciser une chose afin que mon point de vue soit bien clair : une conversion à l’islam n’est pas en soi problématique ; ce qui l’est, c’est que l’argument d’une conversion réelle ou supposée soit utilisé pour discréditer les travaux (universitaires ou autres) de celui qui les produit, ou pour « expliquer » et surtout condamner les propositions qu’il peut faire dans le domaine qui est le sien.
Ce n’est pas de la conversion réelle, effective, d’une personne à l’islam dont je vais vous parler aujourd’hui. La conversion à partir de quelque religion que ce soit vers quelque religion que ce soit est – devrait être – un acte privé, librement consenti, n’engageant que celui qui le fait dans une relation verticale avec son Dieu.
J’ai envie de vous parler ici d’une autre forme de conversion, d’une conversion forcée en quelques sortes : celle de la conversion « imaginaire », supposée, des chercheurs et autres agents ou acteurs publics qui travaillent sur l’islam, gèrent des dossiers concernant l’islam, sont en rapports professionnels avec des musulmans.
Pour de nombreux d’entre nous, chercheurs, praticiens, nous développons sur la question de l’islam en général non pas des « points de vues », des « opinions », mais un discours fondé sur l’étude et la connaissance du milieu sur lequel nous travaillons ; certains – au demeurant assez rares - portent en outre une parole politique fondée – par exemple - sur le concept de citoyenneté de résidence, qui s’ajoute à l’égalité de traitement et de neutralité dans la gestion des dossiers que beaucoup d’entre nous réclament et pratiquent au quotidien.
Il semble que ces discours et ces pratiques, un peu à contre-courant il est vrai, soient particulièrement dérangeants puisque, tout au moins dans la mesure où l’on ne développe pas un discours « a priori » négatif sur l’islam, l’on cherche à les expliquer nos analyses, nos propositions, par des motifs tirés de la vie privée, bien souvent imaginaire, de ceux dont on parle.
Quelques exemples vont éclairer mon propos.
Je reviendrai tout d’abord ici brièvement sur une légende qui me paraît véritablement archétypique : celle de « l’amant turc » prêté à une ancienne ministre, liaison qui aurait expliqué (« mais oui mais c’est bien sûr ! ») ses prises de positions politiques sur l’immigration, la construction de lieux de cultes musulmans, la participation des étrangers à la vie politique de la cité.
Cette histoire, dégradante pour ceux qui l’ont colportée dans ce qu’elle révèle de leur mentalité et de leurs méthodes, me paraît véritablement emblématique en ce qu’elle en dit plus sur les porteurs de ragots que sur celle qui en était l’objet : incapables d’imaginer un horizon politique différent de celui qu’ils voient de leurs fenêtres, sans projet, sans idéal, ils discourent sur la liberté, l’égalité et la fraternité à perte de vue… tant que la seule idée d’un minaret ne vient pas faire d’ombre à leurs pots de géraniums sagement rangés devant la fenêtre depuis laquelle ils contemplent le monde.
Apparemment incapables d’imaginer que l’on puisse agir par conviction, par idéal politique ou social, que l’on puisse s’intéresser à autre chose que ce que l’on est soi-même, que l’on puisse prendre de la distance par rapport à soi et à ses valeurs d’origine, ils ne voient pas autre chose qu’un intérêt purement personnel, et si possible d’ordre privé, qui puisse animer une conscience, ce type de discours leur permettant de plus de broder avec facilité sur l’imaginaire de la sexualité coloniale – la sexualité débridée de l’indigène à laquelle certaines (voire certains) succomberaient au prix de leur raison et de leur autonomie de jugement. Etroitesse et petitesse semblent être les deux mamelles taries de cette politique.
Il en est de même de la « conversion à l’islam » de nombreux chercheurs et « praticiens » du fait musulman.
Je tiens à préciser une chose afin que mon point de vue soit bien clair : une conversion à l’islam n’est pas en soi problématique ; ce qui l’est, c’est que l’argument d’une conversion réelle ou supposée soit utilisé pour discréditer les travaux (universitaires ou autres) de celui qui les produit, ou pour « expliquer » et surtout condamner les propositions qu’il peut faire dans le domaine qui est le sien.
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