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    INTERNET • Les terroristes ont raté le train du Web 2.0
    A travers des attentats meurtriers et une présence forte dans les médias électroniques, Al-Qaida s’est forgé un nom dans le sang et les pixels. Des articles l’ont même décrite comme un Béhémoth terroriste en ligne, qui aurait résisté à tous les efforts du gouvernement américain pour lui faire échec. Si ces textes rappellent l’art consommé avec lequel Al-Qaida a su exploiter les médias, ils ne sont pas tout à fait justes. Car l’organisation terroriste est à la traîne par rapport aux évolutions de la Toile. Et les Etats-Unis peuvent contribuer à augmenter ce retard, en encourageant le développement de communautés d’internautes plus libres et plus puissantes, notamment dans le monde arabe.
    Le génie d’Al-Qaida a été de savoir associer des destructions dans le monde réel à un marketing virtuel. La nébuleuse s’est dotée d’un réseau médiatique de guérillas regroupant toute une gamme de marques de fabrique, depuis ses antennes dans le Maghreb musulman (en Algérie et au Maroc) jusqu’à la république islamique d’Iran, à travers un déluge quotidien de produits médias à faire pâlir d’envie n’importe quelle multinationale. A titre d’exemple, en juillet 2007, Al-Qaida a publié plus de 450 déclarations, livres, articles, magazines, enregistrements audio, vidéoclips d’attentats et autres séquences filmées plus longues. Ces produits sont diffusés dans le monde entier par le biais d’institutions quasi officielles de pro­duction et de diffusion en ligne, comme Al-Sahab, qui publie les communiqués d’Oussama Ben Laden. Mais le circuit médiatique d’Al-Qaida, si perfectionné soit-il, est déjà périmé. Si le Web 1.0 permettait de créer des ressources Internet officielles de grande qualité, le Web 2.0 donne aux utilisateurs toute latitude pour créer des contenus originaux en toute interactivité ; or Al-Qaida et ses membres en sont restés au Web 1.0. A la fin 2006, au moment où YouTube et FaceBook prenaient leur essor, un document d’orientation d’un groupe affilié à Al-Qaida invitait les djihadistes à ne pas déployer d’efforts trop “exubérants” au nom du groupe, de peur de délayer son message.

    Attention, Ben Laden n’a pas dit son dernier mot

    C’était probablement là un sage conseil, au vu des performances d’Al-Qaida sur YouTube. Sur une liste récente des vidéos YouTube sur Al-Qaida en arabe les plus consultées, on trouve par exemple un remix d’un clip de la “république islamique d’Irak” auquel a été superposé un commentaire caustique et des vers satiriques sur Al-Qaida écrits par un poète irakien. Les déclarations de Ben Laden et de son numéro deux, Ayman Al-Zawahiri, lancées sur YouTube font l’objet d’un nombre faramineux de commentaires. Mais ces commentaires, qui vont de l’éloge à la condamnation en bloc, sont à des années-lumière des réactions positives qu’Al-Qaida recueille systématiquement sur les forums djihadistes contrôlés par des modérateurs. Et, dans le meilleur des cas, même le plus grand succès YouTube d’Al-Qaida n’attire qu’un public infime par rapport aux millions de consultations des clips des pop stars arabes.
    Le phénomène indique également qu’une communauté d’internautes plus interactive et plus puissante, notamment dans le monde arabo-islamique, pourrait très bien s’avérer être le talon d’Achille d’Al-Qaida. Le Web 1.0, essentiellement caractérisé par l’anonymat et l’accessibilité, constituait une plate-forme idéale pour la démagogie extrémiste d’Al-Qaida. Le Web 2.0, en revanche, plus résolument articulé sur la notion de réseau social, risque fort de fédérer une majorité silencieuse éclatée et de l’aider à trouver sa voix face à des adversaires voyous, qu’il s’agisse de dirigeants répressifs ou de mouvements islamistes extrémistes.
    Les Etats autoritaires du Moyen-Orient font malheureusement tout ce qu’ils peuvent pour empêcher le Web 2.0 de s’enraciner chez eux. Or, en bloquant Internet, ils laissent la voie libre à Al-Qaida et à ses recruteurs. Les statistiques de l’armée américaine et les contributions en ligne des djihadistes eux-mêmes montrent que, parmi les principaux pays dont sont originaires les combattants étrangers en Irak, il y a l’Egypte, la Libye, l’Arabie Saoudite, la Syrie et le Yémen. Ce n’est pas par hasard que Reporters sans frontières a qualifié l’Egypte, l’Arabie Saoudite et la Syrie d’“ennemis d’Internet”, et a classé la Libye et le Yémen parmi les pays où le web est “étroitement surveillé”. Cela signifie que l’accès sans entrave à un Internet libre n’est pas simplement un objectif auquel nous devrions aspirer par principe, mais aussi un moyen très efficace de lutter contre Al-Qaida.
    Il serait prématuré d’affirmer que la stratégie marketing d’Al-Qaida est absolument anachronique. Le groupe a déjà fait la preuve de sa remarquable résilience, et il trouvera des moyens de s’adapter aux nouvelles tendances. Mais le réseau médiatique d’Al-Qaida sur le Net est également vulnérable aux perturbations. Les services de renseignements spécialisés en technologie qui connaissent le fonctionnement du circuit médiatique d’Al-Qaida pourront se charger d’une partie du travail. Mais ce sont les millions d’utilisateurs ordinaires des communautés, principale cible de la propagande d’Al-Qaida, qui seront le plus à même de déstabiliser son réseau. Nous devrions tout faire pour les encourager afin de leur permettre d’affirmer leur présence sur le Net.
    Daniel Kimmage
    The New York Times
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