L’ancienne sénatrice communiste de Seine-Saint-Denis déplore le niveau des débats français sur la guerre au Proche-Orient. Si la gauche s’est divisée, il convient selon elle de dépasser « les petites phrases » pour reconstruire l’union.
Mathieu Dejean
Figure du Parti communiste français (PCF), Éliane Assassi a été sénatrice de Seine-Saint-Denis de 2004 à 2023, et présidente du groupe communiste de 2012 à 2023. Connue pour son rôle moteur dans la commission d’enquête sur les cabinets de conseil privés, elle est aussi engagée de longue date dans le soutien au peuple palestinien.
Au vingtième jour de la guerre au Proche-Orient après l’offensive meurtrière du Hamas le 7 octobre, la militante communiste se dit très inquiète de la situation à Gaza. Tout en condamnant « l’abominable attentat terroriste du 7 octobre contre le peuple israélien », elle redoute que celui-ci ne soit utilisé par le premier ministre israélien pour arriver à ses fins : « En finir avec la Palestine et son peuple. »
Après l’éclatement de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) sur ce sujet – le Parti socialiste a adopté un « moratoire » et le PCF l’a qualifiée d’« impasse » –, elle lance un appel à « reconstruire » l’union de la gauche. Tout en défendant La France insoumise (LFI) contre le procès en antisémitisme qui lui est fait, elle encourage une refonte du fonctionnement du mouvement pour permettre des relations plus simples entre partenaires : « Au sein de LFI, il y a des gens raisonnables qui contestent le comportement et les paroles de Jean-Luc Mélenchon. Il y a encore des possibles. » Entretien.
Agrandir l’image : Illustration 1Éliane Assassi à l'hôtel Matignon à Paris le 3 juillet 2023. © Photo Geoffroy van der Hasselt / AFP
Mediapart : À Jérusalem, Emmanuel Macron a déclaré que la France était « prête à ce que la coalition internationale contre Daech puisse lutter aussi contre le Hamas ». Que pensez-vous de cette proposition ?
Éliane Assassi : Je pense sincèrement que cette proposition est d’une grande confusion. Le Hamas est une organisation terroriste, mais le Hamas n’est pas Daech, qui est une organisation tentaculaire qui touche bon nombre de pays sur la planète. Cette comparaison reviendrait à nier la réalité de ce qui se passe à Gaza, et plus largement sur le territoire palestinien et en Israël. C’est une très mauvaise idée.
Reprend-il une lecture des événements qui correspond au « choc des civilisations » ?
Exactement, or il faut bien nommer les choses. Ce n’est ni un choc des civilisations ni une guerre de religion. La problématique qui est posée dans le conflit israélo-palestinien est démocratique. La démocratie, c’est le respect des peuples, et le respect des peuples, c’est la solution à deux États. C’est le seul chemin possible pour sortir de ce conflit.
Le débat en France à gauche s’est cristallisé sur la qualification des actes du Hamas le 7 octobre. Les dirigeantes et dirigeants insoumis ont refusé de parler de « terrorisme », en disant que c’était nier la dimension coloniale du conflit. Est-ce un argument défendable ?
Non, ce n’est pas défendable. Le Hamas est une organisation terroriste qui s’est construite avec la complicité d’autres pays, le Qatar notamment, qui finance à hauteur de 30 millions de dollars par mois les prétendus agents publics du Hamas dans la bande de Gaza. Le 7 octobre était donc une offensive terroriste qui s’est faite en premier lieu au détriment des Israéliens, mais aussi du peuple palestinien et particulièrement du peuple gazaoui. Ce n’est pas un crime de guerre, car il n’y a pas deux armées qui s’affrontent, mais un groupe armé qui s’attaque à un pays et à sa population.
Comment qualifier le bombardement systématique et indiscriminé de Gaza, où la situation humanitaire est préoccupante ? La riposte israélienne ne devient-elle pas une guerre contre la Palestine ?
Nétanyahou est un dirigeant d’extrême droite dont la boussole est l’anéantissement du peuple palestinien – aussi bien dans les territoires occupés que dans Gaza. Il veut en finir avec la Palestine. On ne peut pas tolérer le massacre d’Israéliens innocents, mais on ne peut pas tolérer non plus que cela donne lieu au massacre de Palestiniens innocents. C’est pourtant la logique de Nétanyahou. Il utilise l’abominable attentat terroriste du 7 octobre contre le peuple israélien pour en finir avec la Palestine et son peuple. La situation à Gaza me préoccupe énormément. Nétanyahou emmène son peuple dans un mur.
La gauche a l’air d’être unanime dans son appel au cessez-le-feu. Mais est-ce crédible ?
Bien sûr. Quel autre chemin voulez-vous prendre ? Des pays occidentaux revendiquent l’idée d’une trêve pour ravitailler les Gazaouis, mais ce n’est pas d’une trêve qu’on a besoin, c’est d’un cessez-le-feu pour reprendre des négociations et le chemin d’accords pour la paix qui sont malheureusement tombés en désuétude. Plus personne ne s’est préoccupé du sort de la Palestine depuis des décennies. Il faut remettre l’ouvrage sur le métier. C’est un dénominateur commun aux forces de gauche d’exiger un cessez-le-feu. La riposte d’Israël ne peut pas être une déclaration de guerre à toute une population. Depuis la signature des accords d’Oslo il y a trente ans, les pays occidentaux ont malheureusement délaissé cette question, et en particulier l’Europe.
Les dirigeants européens débattent justement d’un appel à une « pause humanitaire » afin d’acheminer de l’aide dans la bande de Gaza...
L’Union européenne n’est pas à la hauteur des enjeux sur l’ensemble de la région. Seul un cessez-le-feu peut régler la question des otages retenus par le Hamas, mais aussi celle des prisonniers politiques palestiniens retenus en Israël. Beaucoup utilisent l’argument selon lequel Mahmoud Abbas [le président de l’Autorité palestinienne – ndlr] serait devenu illégitime. Or, parmi les prisonniers palestiniens retenus en Israël, il y a un homme d’une grande sagesse qui pourrait renouer le dialogue : Marwan Barghouti [dirigeant historique du Fatah en Cisjordanie, prisonnier depuis 2002 – ndlr]. Je pense qu’un cessez-le-feu pourrait permettre de discuter du sort des otages mais aussi des prisonniers palestiniens, parmi lesquels il y a de possibles dirigeants d’une Autorité palestinienne, voire d’un État palestinien – ce qu’on revendique sur le fond.
Depuis le 7 octobre, Israël réprime les voix dissidentes de ses propres citoyens. Comment les soutenir ? Les liens entre les organisations de gauche en France et les organisationspacifistes israéliennes sont-ils suffisamment étroits ?
Le PCF est toujours en lien avec les organisations pacifistes israéliennes, comme avec les représentants de l’Autorité palestinienne. Aujourd’hui, il est vrai que les millions d’Israéliens favorables à trouver une solution pacifique sont bâillonnés par Nétanyahou, qui est un dirigeant d’extrême droite. Des députés de gauche à la Knesset, que j’avais rencontrés lors d’un déplacement en Israël, sont méprisés par le pouvoir. Leur espace se rétrécit. Les grandes manifestations contre la « révolution » institutionnelle voulue par Nétanyahou, en début d’année, ont été étouffées. La voie pour que leurs voix portent est complexe.
Mais il se pourrait que Nétanyahou soit en train de s’isoler. Le peuple israélien est en grande souffrance lui aussi. Nétanyahou ne veut pas trouver des solutions pacifistes, et cela heurte les millions d’Israéliens qui veulent vivre en paix. Le sort de Nétanyahou a peut-être été scellé avec ce qui se passe malheureusement en Israël et Palestine. Le droit à la légitime défense n’est pas un droit à la violence, et le peuple israélien le ressent. J’y suis allée à deux reprises, j’ai rencontré des organisations pacifistes, je sais que c’est une volonté qui monte dans le pays.
Le PCF a décidé de tourner la page de la Nupes. Est-ce qu’il faudra reconstruire l’union de la gauche ?
Il faut la reconstruire. Je condamne les propos de Jean-Luc Mélenchon à l’égard des communistes en général, et de Fabien Roussel en particulier. Ils ne devraient pas être portés dans la bouche d’un homme de gauche. Mais si la gauche veut conquérir le pouvoir, elle ne pourra le faire que rassemblée. La Nupes en était-elle le meilleur vecteur ? Je ne sais pas. Mais il faut une union des gauches. C’est ce à quoi aspirent une majorité des gens dans notre pays, qui ne veulent ni de Macron et ses avatars, ni de Marine Le Pen. Dans cet espace, il faut construire un rassemblement des forces de gauche qui porte un projet politique clair. Il peut changer de nom. Au sein de LFI, il y a des gens raisonnables qui contestent le comportement et les paroles de Jean-Luc Mélenchon. Il y a encore des possibles.
La démocratisation de LFI est un préalable à l’union ?
Oui. Je n’ai pas de leçons à leur donner, mais je les connais bien : ils n’ont pas d’organisation ni de débat démocratique. Ils sont mis devant le fait accompli de la parole de Jean-Luc Mélenchon sans décider de leur ligne en amont. Les militants insoumis, que je crois sincères, devraient pouvoir exprimer leurs désaccords, comme les communistes peuvent le faire face à des propos que peut tenir Fabien Roussel ou n’importe quel dirigeant du PCF. LFI, au-delà du cas Mélenchon, devrait trouver une forme d’organisation démocratique.
Un « cordon sanitaire » est mis autour de LFI aujourd’hui. Ses dirigeants sont accusés d’antisémitisme, comme vous avez pu l’être en défendant l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri ou la résolution sur la reconnaissance de l’apartheid israélien. Comment expliquer cela ?
C’est nauséabond. On ne peut plus critiquer la gouvernance de l’État d’Israël par Nétanyahou sans être taxé d’antisémitisme. C’est ridicule, et notre histoire le montre. Je suis attristée, le mot est faible, face au débat « politique » dans notre pays. Il n’est fait que d’invectives, d’insultes, le débat des idées est appauvri, déserté. C’est vrai aussi au Parlement. J’ai regardé le débat sur la situation en Israël et en Palestine à l’Assemblée nationale, il était lamentable. Chacun reste dans son couloir, personne n’entend ce que peuvent dire les autres, c’est affligeant.
Il faut pourtant débattre sur le fond. On pourrait pointer, par exemple, le rôle du Qatar et d’autres pays du Moyen-Orient qui ont favorisé la naissance et la pérennité du Hamas jusqu’à ce qu’il provoque des actes aussi horribles que ceux du 7 octobre. Ou de la légitimité du Hamas, qui a été élu par le peuple gazaoui en 2006, sans qu’il y ait eu d’autre élection depuis. Mais on n’en parle pas, comme si c’était impudique de mettre en cause certains pays qui, bien évidemment, investissent beaucoup dans le nôtre.
Mathieu Dejean
Figure du Parti communiste français (PCF), Éliane Assassi a été sénatrice de Seine-Saint-Denis de 2004 à 2023, et présidente du groupe communiste de 2012 à 2023. Connue pour son rôle moteur dans la commission d’enquête sur les cabinets de conseil privés, elle est aussi engagée de longue date dans le soutien au peuple palestinien.
Au vingtième jour de la guerre au Proche-Orient après l’offensive meurtrière du Hamas le 7 octobre, la militante communiste se dit très inquiète de la situation à Gaza. Tout en condamnant « l’abominable attentat terroriste du 7 octobre contre le peuple israélien », elle redoute que celui-ci ne soit utilisé par le premier ministre israélien pour arriver à ses fins : « En finir avec la Palestine et son peuple. »
Après l’éclatement de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) sur ce sujet – le Parti socialiste a adopté un « moratoire » et le PCF l’a qualifiée d’« impasse » –, elle lance un appel à « reconstruire » l’union de la gauche. Tout en défendant La France insoumise (LFI) contre le procès en antisémitisme qui lui est fait, elle encourage une refonte du fonctionnement du mouvement pour permettre des relations plus simples entre partenaires : « Au sein de LFI, il y a des gens raisonnables qui contestent le comportement et les paroles de Jean-Luc Mélenchon. Il y a encore des possibles. » Entretien.

Mediapart : À Jérusalem, Emmanuel Macron a déclaré que la France était « prête à ce que la coalition internationale contre Daech puisse lutter aussi contre le Hamas ». Que pensez-vous de cette proposition ?
Éliane Assassi : Je pense sincèrement que cette proposition est d’une grande confusion. Le Hamas est une organisation terroriste, mais le Hamas n’est pas Daech, qui est une organisation tentaculaire qui touche bon nombre de pays sur la planète. Cette comparaison reviendrait à nier la réalité de ce qui se passe à Gaza, et plus largement sur le territoire palestinien et en Israël. C’est une très mauvaise idée.
Reprend-il une lecture des événements qui correspond au « choc des civilisations » ?
Exactement, or il faut bien nommer les choses. Ce n’est ni un choc des civilisations ni une guerre de religion. La problématique qui est posée dans le conflit israélo-palestinien est démocratique. La démocratie, c’est le respect des peuples, et le respect des peuples, c’est la solution à deux États. C’est le seul chemin possible pour sortir de ce conflit.
Le débat en France à gauche s’est cristallisé sur la qualification des actes du Hamas le 7 octobre. Les dirigeantes et dirigeants insoumis ont refusé de parler de « terrorisme », en disant que c’était nier la dimension coloniale du conflit. Est-ce un argument défendable ?
Non, ce n’est pas défendable. Le Hamas est une organisation terroriste qui s’est construite avec la complicité d’autres pays, le Qatar notamment, qui finance à hauteur de 30 millions de dollars par mois les prétendus agents publics du Hamas dans la bande de Gaza. Le 7 octobre était donc une offensive terroriste qui s’est faite en premier lieu au détriment des Israéliens, mais aussi du peuple palestinien et particulièrement du peuple gazaoui. Ce n’est pas un crime de guerre, car il n’y a pas deux armées qui s’affrontent, mais un groupe armé qui s’attaque à un pays et à sa population.
Comment qualifier le bombardement systématique et indiscriminé de Gaza, où la situation humanitaire est préoccupante ? La riposte israélienne ne devient-elle pas une guerre contre la Palestine ?
Nétanyahou est un dirigeant d’extrême droite dont la boussole est l’anéantissement du peuple palestinien – aussi bien dans les territoires occupés que dans Gaza. Il veut en finir avec la Palestine. On ne peut pas tolérer le massacre d’Israéliens innocents, mais on ne peut pas tolérer non plus que cela donne lieu au massacre de Palestiniens innocents. C’est pourtant la logique de Nétanyahou. Il utilise l’abominable attentat terroriste du 7 octobre contre le peuple israélien pour en finir avec la Palestine et son peuple. La situation à Gaza me préoccupe énormément. Nétanyahou emmène son peuple dans un mur.
La gauche a l’air d’être unanime dans son appel au cessez-le-feu. Mais est-ce crédible ?
Bien sûr. Quel autre chemin voulez-vous prendre ? Des pays occidentaux revendiquent l’idée d’une trêve pour ravitailler les Gazaouis, mais ce n’est pas d’une trêve qu’on a besoin, c’est d’un cessez-le-feu pour reprendre des négociations et le chemin d’accords pour la paix qui sont malheureusement tombés en désuétude. Plus personne ne s’est préoccupé du sort de la Palestine depuis des décennies. Il faut remettre l’ouvrage sur le métier. C’est un dénominateur commun aux forces de gauche d’exiger un cessez-le-feu. La riposte d’Israël ne peut pas être une déclaration de guerre à toute une population. Depuis la signature des accords d’Oslo il y a trente ans, les pays occidentaux ont malheureusement délaissé cette question, et en particulier l’Europe.
Parmi les prisonniers palestiniens retenus en Israël, il y a un homme d’une grande sagesse qui pourrait renouer le dialogue : Marwan Barghouti.
L’Union européenne n’est pas à la hauteur des enjeux sur l’ensemble de la région. Seul un cessez-le-feu peut régler la question des otages retenus par le Hamas, mais aussi celle des prisonniers politiques palestiniens retenus en Israël. Beaucoup utilisent l’argument selon lequel Mahmoud Abbas [le président de l’Autorité palestinienne – ndlr] serait devenu illégitime. Or, parmi les prisonniers palestiniens retenus en Israël, il y a un homme d’une grande sagesse qui pourrait renouer le dialogue : Marwan Barghouti [dirigeant historique du Fatah en Cisjordanie, prisonnier depuis 2002 – ndlr]. Je pense qu’un cessez-le-feu pourrait permettre de discuter du sort des otages mais aussi des prisonniers palestiniens, parmi lesquels il y a de possibles dirigeants d’une Autorité palestinienne, voire d’un État palestinien – ce qu’on revendique sur le fond.
Depuis le 7 octobre, Israël réprime les voix dissidentes de ses propres citoyens. Comment les soutenir ? Les liens entre les organisations de gauche en France et les organisationspacifistes israéliennes sont-ils suffisamment étroits ?
Le PCF est toujours en lien avec les organisations pacifistes israéliennes, comme avec les représentants de l’Autorité palestinienne. Aujourd’hui, il est vrai que les millions d’Israéliens favorables à trouver une solution pacifique sont bâillonnés par Nétanyahou, qui est un dirigeant d’extrême droite. Des députés de gauche à la Knesset, que j’avais rencontrés lors d’un déplacement en Israël, sont méprisés par le pouvoir. Leur espace se rétrécit. Les grandes manifestations contre la « révolution » institutionnelle voulue par Nétanyahou, en début d’année, ont été étouffées. La voie pour que leurs voix portent est complexe.
Mais il se pourrait que Nétanyahou soit en train de s’isoler. Le peuple israélien est en grande souffrance lui aussi. Nétanyahou ne veut pas trouver des solutions pacifistes, et cela heurte les millions d’Israéliens qui veulent vivre en paix. Le sort de Nétanyahou a peut-être été scellé avec ce qui se passe malheureusement en Israël et Palestine. Le droit à la légitime défense n’est pas un droit à la violence, et le peuple israélien le ressent. J’y suis allée à deux reprises, j’ai rencontré des organisations pacifistes, je sais que c’est une volonté qui monte dans le pays.
Le PCF a décidé de tourner la page de la Nupes. Est-ce qu’il faudra reconstruire l’union de la gauche ?
Il faut la reconstruire. Je condamne les propos de Jean-Luc Mélenchon à l’égard des communistes en général, et de Fabien Roussel en particulier. Ils ne devraient pas être portés dans la bouche d’un homme de gauche. Mais si la gauche veut conquérir le pouvoir, elle ne pourra le faire que rassemblée. La Nupes en était-elle le meilleur vecteur ? Je ne sais pas. Mais il faut une union des gauches. C’est ce à quoi aspirent une majorité des gens dans notre pays, qui ne veulent ni de Macron et ses avatars, ni de Marine Le Pen. Dans cet espace, il faut construire un rassemblement des forces de gauche qui porte un projet politique clair. Il peut changer de nom. Au sein de LFI, il y a des gens raisonnables qui contestent le comportement et les paroles de Jean-Luc Mélenchon. Il y a encore des possibles.
Il faut acter les désaccords avec les propos de Jean-Luc Mélenchon, mais aussi les dépasser.
Oui. Je n’ai pas de leçons à leur donner, mais je les connais bien : ils n’ont pas d’organisation ni de débat démocratique. Ils sont mis devant le fait accompli de la parole de Jean-Luc Mélenchon sans décider de leur ligne en amont. Les militants insoumis, que je crois sincères, devraient pouvoir exprimer leurs désaccords, comme les communistes peuvent le faire face à des propos que peut tenir Fabien Roussel ou n’importe quel dirigeant du PCF. LFI, au-delà du cas Mélenchon, devrait trouver une forme d’organisation démocratique.
Un « cordon sanitaire » est mis autour de LFI aujourd’hui. Ses dirigeants sont accusés d’antisémitisme, comme vous avez pu l’être en défendant l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri ou la résolution sur la reconnaissance de l’apartheid israélien. Comment expliquer cela ?
C’est nauséabond. On ne peut plus critiquer la gouvernance de l’État d’Israël par Nétanyahou sans être taxé d’antisémitisme. C’est ridicule, et notre histoire le montre. Je suis attristée, le mot est faible, face au débat « politique » dans notre pays. Il n’est fait que d’invectives, d’insultes, le débat des idées est appauvri, déserté. C’est vrai aussi au Parlement. J’ai regardé le débat sur la situation en Israël et en Palestine à l’Assemblée nationale, il était lamentable. Chacun reste dans son couloir, personne n’entend ce que peuvent dire les autres, c’est affligeant.
Il faut pourtant débattre sur le fond. On pourrait pointer, par exemple, le rôle du Qatar et d’autres pays du Moyen-Orient qui ont favorisé la naissance et la pérennité du Hamas jusqu’à ce qu’il provoque des actes aussi horribles que ceux du 7 octobre. Ou de la légitimité du Hamas, qui a été élu par le peuple gazaoui en 2006, sans qu’il y ait eu d’autre élection depuis. Mais on n’en parle pas, comme si c’était impudique de mettre en cause certains pays qui, bien évidemment, investissent beaucoup dans le nôtre.
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