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Cessez-le-feu immédiat ! » : des centaines de juifs propalestiniens manifestent à Washington

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  • Cessez-le-feu immédiat ! » : des centaines de juifs propalestiniens manifestent à Washington


    Le mouvement Jewish Voice for Peace rend Israël responsable du conflit avec le Hamas et réclame un cessez-le-feu. Ses partisans protestaient mercredi dans une annexe du Capitole.

    De notre correspondante aux États-Unis, Claire Meynial



    Les policiers leur tapent sur l'épaule, leur demandent de partir et les préviennent qu'à défaut, ils seront arrêtés. Une file d'attente finit par se former à la sortie du bâtiment, sur New Jersey Avenue, à mesure que les manifestants sont menottés, escortés et poussés dans des bus. Et la manifestation, dans la rotonde du Cannon Building, annexe du Capitole à Washington, s'éclaircit.

    Mercredi après-midi, alors que la Chambre des représentants venait pour la deuxième fois d'échouer à élire un président, des centaines de manifestants du mouvement Jewish Voice for Peace (JVP, Voix juive pour la paix) sont entrés dans le Cannon Building. Dehors, sur le Mall, avenue herbeuse qui descend du Capitole, ils étaient des milliers à scander « Pas en notre nom ! ». À l'intérieur, ils sont 400, avec 25 rabbins, assis sur le marbre. Ils chantent « Cessez-le-feu immédiat ! » et « Libérez la Palestine ! ».

    Un « génocide » à Gaza

    Contrairement au Capitole, où se trouvent les hémicycles du Congrès, le bâtiment abrite des bureaux et il est public. Les manifestants n'ont eu qu'à entrer en passant la sécurité. Ils portent des tee-shirts noirs, siglés des slogans « Pas en notre nom » devant et « Les juifs demandent un cessez-le-feu immédiat » derrière. Sur un avant-bras, ils ont écrit, au marqueur noir, un numéro d'avocat en prévision de leur arrestation. Scout Bratt est venue de Chicago. « Nous sommes des Juifs américains qui pensent que ce pays a contribué au génocide à Gaza et nous ne voulons pas que les tueries et l'oppression se fassent en notre nom, dit-elle. Il y a une résolution sur la table pour un cessez-le-feu, nous exigeons un cessez-le-feu immédiat. »



    Les militants ont été menottés et escortés jusqu'à la sortie du batiment. © DR


    Lundi, Cori Bush, démocrate du Missouri, a soumis une résolution, aujourd'hui appuyée par une quinzaine d'élus progressistes. Elle presse le gouvernement Biden « de demander immédiatement et d'aider à un apaisement et un cessez-le-feu pour mettre un terme d'urgence à la violence actuelle ». Elle demande aussi « d'envoyer rapidement et d'aider à l'entrée d'aide humanitaire dans Gaza ». Parmi les cosignataires, figure Rashida Tlaib, représentante du Michigan, qui s'est adressée aux manifestants dehors. Mardi, elle avait posté sur X (ex-Twitter) : « Israël vient de bombarder l'hôpital baptiste et de tuer 500 Palestiniens (selon le Hamas, NDLR), juste comme ça. » Une thèse qu'elle a à nouveau soutenue devant les manifestants.

    Ces derniers la partagent. Jay Saper, porte-parole du mouvement, se dit « très troublé que Joe Biden ait rencontré Netanyahou et lui ait promis de continuer à soutenir la violence, pile le lendemain du jour où Israël a bombardé un hôpital ». Or Biden a assuré que le département de la Défense lui avait montré des éléments prouvant que l'explosion avait été causée par une roquette hors de contrôle tirée par un « groupe terroriste ».


    Adrienne Watson, porte-parole du Conseil national de sécurité, a déclaré : « Nous estimons, à partir de l'analyse d'images, d'interceptions et d'informations en source ouverte, qu'Israël n'est pas responsable de l'explosion de l'hôpital de Gaza hier. » Il s'agirait d'une roquette du Jihad islamique palestinien. Cela n'ébranle pas Jay Saper. « Ce qu'on sait, c'est que vendredi, Israël a demandé à 1,1 million de personnes d'évacuer et ils ont coupé l'eau et l'électricité. Donc même les hôpitaux qui restent ne peuvent pas procurer de soins qui sauvent des vies. On sait aussi que des milliers de Palestiniens ont été tués dans les bombardements israéliens et que le bilan va s'aggraver à moins d'un cessez-le-feu. »

    La JVP revendique 440 000 membres

    Fondée en septembre 1996 à San Francisco, la JVP compte, dans son conseil consultatif, des grands noms de la pensée progressiste comme Noam Chomsky, Judith Butler ou Naomi Klein. Elle soutient et milite pour le mouvement Boycott, désinvestissement et sanctions pour Israël, lancé par 171 ONG palestiniennes. Sur son site Internet, la JVP, basée à Berkeley, en Californie, revendique 443 421 membres et sympathisants, et 70 branches locales. Parmi ses sources de financement, on trouve les fonds des Rockefeller Brothers ou de Charles Schwab. En 2017, un article du journal israélien Haaretz notait : « Pour beaucoup de groupes neutres, modérés ou même de gauche – et certainement pour le gouvernement israélien –, JVP dépasse les bornes et aide ceux qui pourraient faire du tort à ou même éliminer Israël si possible. »

    La Ligue anti-diffamation (ADL), qui traque les incidents antisémites, décrit le groupe ainsi : « La JVP utilise son identité juive pour protéger le mouvement anti-israélien de toute accusation d'antisémitisme et pour donner au mouvement le vernis de la légitimité. » Juste après les attaques du Hamas, le groupe a posté sur les réseaux sociaux : « La violence est le résultat direct de décennies d'occupation sur la terre palestinienne… et du colonialisme mortel qui expulse les Palestiniens de leur terre. »

    C'est mot pour mot ce que développe Jay Saper : « Un cessez-le-feu stopperait le bombardement de Gaza, prison à ciel ouvert qui abrite 2,2 millions de personnes dans un espace plus petit que celui de Détroit. Ensuite, il faut s'attaquer aux causes de la violence, c'est-à-dire 75 ans d'occupation et d'apartheid. Tout cela a été soutenu par le gouvernement des États-Unis, qui a été complice et a donné une caution morale à tout cela. »

    Fracture au sein du Parti démocrate

    Ce n'est pas tout. Dans la rotonde, les manifestants chantent : « La Palestine sera libre, du fleuve à la mer » (du Jourdain à la Méditerranée, ce qui implique la disparition d'Israël). Quand on demande à Jay Saper ce qu'il adviendrait d'Israël, il esquive : « Les Palestiniens ont le droit de vivre librement, et d'avoir le droit au retour chez eux. Aucun d'entre nous n'est libre tant que nous ne sommes pas tous libres. Plus de justice pour les Palestiniens, c'est aussi plus de justice pour tout le monde, sur terre. » Pareil pour Kara, qui vient de scander ce slogan, à l'étage de la rotonde : « Nous croyons à la liberté et qu'il faut un cessez-le-feu immédiat, pour mettre fin à l'occupation par Israël et à l'apartheid. Israël occupe Gaza et la Cisjordanie, et ce n'est pas acceptable que des gens vivent dans une prison à ciel ouvert, point final. Il n'y a aucune excuse pour prendre les terres des autres. »

    Cette journée illustre aussi la fracture au sein du Parti démocrate, dont la frange progressiste, propalestinienne, séduit les jeunes, qui se retrouvent de moins en moins dans les positions de Biden. Juste après les attaques du Hamas, le 7 octobre, qui ont causé la mort de plus de 1 300 Israéliens et au terme desquelles le Hamas a emmené plus de 200 otages dans la bande de Gaza, le président a exprimé le soutien des États-Unis à Israël. Depuis, les frappes aériennes israéliennes sur la bande de Gaza ont tué plus de 3 400 personnes et en ont blessé plus de 12 500, selon les autorités palestiniennes.

    Biden, en visite en Israël, s'est engagé auprès du Premier ministre Benyamin Netanyahou à « continuer à soutenir Israël à mesure (qu'il défend son) peuple ». Rashida Tlaib, durant la manifestation, s'en est prise à lui : « À notre président… Je veux qu'il sache qu'en tant qu'Américaine palestinienne et musulmane, je n'oublierai pas ça. Et je pense que beaucoup de gens n'oublieront pas. » Les manifestants ne disent pas autre chose. Liv Kunins-Berkowitz, 24 ans, l'une des organisatrices, demande : « Biden sera-t-il le président américain qui donne des fonds pour faciliter le génocide des Gazaouis ? Ou sera-t-il le président qui s'y opposera et arrêtera tout ça ? S'il a un soupçon d'humanité, il dira à Netanyahou qu'il n'approuve pas ça. Que c'est contre les lois internationales, que c'est une crise humanitaire et que c'est une catastrophe morale. » Elle et son entourage ne voteront pas pour Biden : « Comment voter pour quelqu'un qui finance et aide un génocide ? »

    À quelques centaines de mètres, par le labyrinthe de couloirs souterrains qui relient le Cannon Building au Capitole, le Parti républicain aussi se déchirait. Mercredi soir, les États-Unis n'avaient toujours pas de Congrès. Pour l'instant, il n'est pas question de fournir de l'aide ni à Israël ni à l'Ukraine. Le vote devrait reprendre jeudi.
    وألعن من لم يماشي الزمان ،و يقنع بالعيش عيش الحجر
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