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A Madagascar, la controverse sur la nationalité française du président Andry Rajoelina vire à la crise de défiance

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  • A Madagascar, la controverse sur la nationalité française du président Andry Rajoelina vire à la crise de défiance





    L’opposition dénonce une trahison du chef de l’Etat et envisage une procédure pour demander sa destitution à quatre mois du scrutin présidentiel.



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    https://www.lemonde.fr/afrique/artic...8406_3212.html


    Andry Rajoelina peut-il encore être considéré comme le chef de l’Etat malgache au regard de la loi ? Peut-il être le « président français de la république de Madagascar », comme s’interrogeait La Tribune de Madagascar dans son édition du samedi 17 juin ? La question se pose depuis la divulgation, le 15 juin, de sa naturalisation française par un décret signé par le premier ministre Manuel Valls et le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve le 19 novembre 2014. Selon plusieurs témoignages, cette nationalité lui avait été accordée en échange de son retrait – qui ne fut que temporaire – de la scène politique un an plus tôt, en 2013. Quatre ans après le coup d’Etat qui lui avait permis d’accéder à la tête de Madagascar, cela devait permettre au pays de tourner la page du régime de la transition.

    Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Madagascar : le président Rajoelina est bien français




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    Dès lors, Andry Rajoelina n’aurait pas dû être autorisé à se présenter à l’élection présidentielle de 2018 puisque tout prétendant doit justifier de la nationalité malgache, comme l’exige l’article 46 de la Constitution. Ce n’est pas le fait que le président puisse bénéficier d’une double nationalité – ce qui est le cas de milliers de Malgaches compte tenu du passé commun entre les deux pays – qui pose ici problème, mais qu’il ne soit plus malgache. Le code de la nationalité est clair sur ce point : « Perd la nationalité malgache, le Malgache majeur qui acquiert volontairement une nationalité étrangère », selon l’article 42. Catégorie dans laquelle entre le président, qui avait 40 ans au moment de sa naturalisation.





    Passé le moment de stupéfaction face à la possible portée de l’information, les proches du président ont multiplié ces derniers jours les contre-feux pour déminer la bombe lâchée par des sources anonymes à plusieurs journaux, dont Le Monde, à quelques mois du prochain scrutin présidentiel, prévu en novembre.




    Arès une première réaction de la directrice de cabinet d’Andry Rajoelina dans Le Monde, affirmant que la nationalité française lui a été octroyée par filiation, la porte-parole du gouvernement et ministre de la communication, Lalatiana Rakotondrazafy, a déclaré à la télévision nationale que le chef de l’Etat « n’a pas encore perdu sa nationalité malgache », car il n’en a pas demandé l’autorisation au gouvernement comme le prévoit le code de la nationalité, sous certaines conditions. Dimanche soir, Andry Rajoelina a, de son côté, profité de la réouverture au public du Rova, cet ensemble de demeures royales qui domine Antananarivo, pour tenter de minimiser : « Personne ne pourra effacer le fait qu’on soit malgache et nul ne peut changer le sang malgache qui coule dans nos veines. »
    « Faute morale »


    Des justifications jugées ni convaincantes ni suffisantes. Le parti d’opposition MMM (Malagasy Miara-Miainga), dont le président, Hajo Andrianainarivelo, a quitté le gouvernement début 2022 pour dénoncer l’impasse dans laquelle s’enfonce selon lui le pays, a réclamé des explications sur « ce sujet qui offense la souveraineté des Malagasy qui ont été trahis ».





    Rivo Rakotovao, à la tête du parti HVM, dénonce également une « trahison » et une « faute morale ». « Il existe un problème juridique criant, mais, ce qui me gêne surtout, c’est qu’il ait menti. Il est devenu français et, ce faisant, il a fait allégeance à un autre pays. Quelle crédibilité a-t-il pour défendre Madagascar ? », condamne l’ancien président du Sénat en faisant notamment référence à un des points de mésentente entre Paris et Antananarivo, la demande de restitution des îles Eparses.


    Ce chapelet de terres situées dans le canal du Mozambique a été soustrait par la France à son ancienne colonie au moment de l’indépendance en 1960. Andry Rajoelina avait promis la résolution de ce contentieux territorial, mais les négociations se sont enlisées ; les dessinateurs de presse malgaches ont eu vite fait ces derniers jours d’en trouver l’explication en caricaturant le président embarrassé de deux drapeaux : celui de la Grande Ile brandi bien haut et celui de la France dans le dos.

    Alors que les discussions se poursuivent au sein des états-majors politiques de l’opposition, la désignation d’une commission d’enquête parlementaire qui pourrait aboutir à une procédure de destitution est évoquée par le HVM. En France, l’opposante en exil Fanirisoa Ernaivo a annoncé lundi 19 juin qu’une plainte serait déposée auprès du tribunal de première instance d’Antananarivo pour statuer sur le cas inédit d’extranéité du chef de l’Etat. L’ancienne dirigeante du Syndicat de la magistrature de Madagascar, aujourd’hui à la tête de l’Association pour le développement et la démocratie à Madagascar, demande aux gouvernements étrangers et aux institutions financières internationales de suspendre « tout nouvel engagement tant que le statut de M. Rajoelina n’aura pas été tranché ». Une lettre a été adressée aux parlementaires français pour les alerter.


    Refonte inachevée de la liste électorale


    Les représentations diplomatiques sont jusqu’à présent restées silencieuses, mais une nouvelle réunion était prévue lundi entre plusieurs d’entre elles. « Pour l’instant on observe seulement, mais il est clair que, si la loi devait être appliquée, il reviendrait à la Haute Cour constitutionnelle de constater que M. Rajoelina n’est plus malgache et de le destituer », lâche toutefois l’un d’eux.


    Une nouvelle fois, l’attitude des partenaires étrangers pourrait être déterminante. Leur participation au financement du processus électoral de la présidentielle du 9 novembre a été sollicitée et un accord de principe a été consenti du bout des lèvres. L’organisation des élections fait l’objet de vives critiques de la part de l’opposition, qui voit notamment dans la refonte inachevée de la liste électorale des risques importants de fraude.


    L’interdiction de réunions publiques en plein air imposée début avril alors que le président sillonne le pays pour défendre son bilan a fait monter d’un cran la tension dans un pays exténué par les difficultés économiques et la restriction des libertés. Des affrontements se sont produits à Antsirabe (Centre), samedi 17 juin, entre les partisans de l’ancien président Marc Ravalomanana et les forces de l’ordre, qui tentaient de l’empêcher d’accéder au lieu de son meeting. Quatre personnes ont été blessées.
    Laurence Caramel


    Le Monde

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