Indépendance du Kosovo : la boîte de Pandore des séparatismes ethniques ?
Dans une tribune publiée sur son blog lundi, le géopolitologue Alexandre del Valle craint que la proclamation de l'indépendance du Kosovo résonne comme un syndrome de la "balkanisation" qui menace toute l'Europe continentale. Avec l'appui des Etats-Unis et la servilité de l'Union européenne, "le sécessionnisme, les rebellions indépendantistes et le micro-nationalisme ethnique et religieux" ont de beaux jours devant eux. Le "virus des partitions ethno-nationalistes" est ainsi inoculé avec des conséquences en chaine qui pourraient être redoutables. Selon Del Valle, les conséquences géopolitiques de l’indépendance unilatérale du Kosovo sont considérables tant en terme d'implosion d'Etats fragiles et multiculturels partout dans le monde que de retour des guerres ethniques.
par Alexandre del Valle
Face aux réserves des « frères orthodoxes » et au véto russe que Moscou menace de brandir à l'ONU pour empêcher toute indépendance du Kosovo, le "premier ministre" kosovar et ex-combattant de l'UCK albanaise (mouvement terroriste lié à la Mafia albanaise qui avait réclamé la sécession et déclenché les représailles serbes puis l'intervention américaine en 19898-99), Hachim Taçi, avait voulu rassurer en déclarant à Bruxelles qu'il ne « ferait rien en ce qui concerne l'indépendance du Kosovo sans l'accord de l'UE et des Etats-Unis »... Mais chacun sait que la majorité des Etats de l'UE et les Etats-Unis ont d'ores et déjà assuré qu'ils ne s'opposeraient pas à la sécession du Kosovo.
C'est ainsi que le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki Moon s'est rendu dans les Balkans pour faire pression sur les pays européens hésitant encore à reconnaitre l'indépendance de la province serbe. Quant à la secrétaire d'état américain Condolezza Rice, plus directe encore, elle a appelé les Européens à ne pas attendre pour entériner l'indépendance future de la province serbe peuplée majoritairement d'Albanais et qui a été vidée de ses minorités serbes depuis la guerre de 1998-99. Washington s'emploie ainsi à convaincre des pays aussi différents que le Japon, les Etats islamiques du Golfe ou la Turquie, avertissant même que l'indépendance pourrait se faire en l'absence d'unanimité européenne, 15 pays favorables sur 27 étant jugés « suffisants »...
Or les conséquences géopolitiques de l'indépendance unilatérale du Kosovo sont nombreuses :
1/ elle inciterait nombre d'Etats dans le Monde à défier le droit international et le statu quo des frontières reconnues, faisant imploser pléthore d'Etat fragiles et multiculturels, pas uniquement en Afrique ou en Asie ou en Amérique latine, mais jusqu'à nos démocraties pacifiques : Belgique, menacé de partition entre Flamands et Wallons ; Italie du Nord avec le sécessionnisme de la Ligue du Nord, voire avec la Sicile et la Sardaigne; Espagne avec le terrorisme basque et l'autonomisme catalan, sans oublier leurs émules récentes l'Andalousie et la Galicie ; Grande Bretagne, avec l'Ecosse, notamment; France, avec la Corse, mais aussi la Nouvelle Calédonie et les Antilles françaises, etc; et bien sûr la République de Chypre, menacée par les intentions sécessionnistes désormais officielles de la République turque du Nord illégale, qui occupe pour le compte de la Turquie et en présence de 40 000 sodats turcs, le Nord de l'île de Chypre, etc.
2/ Elle pourrait provoquer le retour des guerres ethniques dans les Balkans et rompre le fragile équilibre instauré depuis la guerre du Kosovo: le nord de la province du Kosovo peuplé de Serbes, de plus en plus inquiets pour leur survie, face à la majorité hostile albanophone, pourrait lui aussi faire sécession du Kosovo indépendant, pour se joindre à la Serbie, ce qui pourrait provoquer une nouvelle crise grave entre Albanais et Serbes. Le fait que les Albanais du Kosovo s'unissent progressivement à l'Albanie voisine inciterait également les Serbes de Bosnie à remettre en question les accords de Dayton et à rejoindre la Serbie, puis les Croates de Bosnie-Herzégovine de faire de même et rejoindre la Croatie mère. Les Magyares (Hongrois) de Roumanie et de Serbie pourraient être tentés de reconstituer eux aussi la grande Hongrie et feraient imploser plusieurs Etats, etc… Sans oublier les sécessionnistes-indépendantistes albanais de Macédoine et du Monténégro, et même du Sud de la Serbie et de l'Epire du Nord (Grêce), qui, galvanisés par le dangereux précédent kosovar, pourraient franchir le rubicon et faire imploser plusieurs Etats, donnant à tant de rebelles du monde entier l'idée de remettre en questions "l'intangibilité des frontières", l'un des fondements du droit international et des Nations Unies...
Bref la boîte de Pandore du sécessionnisme, des rebellions indépendantistes et du micro-nationalisme ethnique et religieux risque de se rouvrir et de faire voler en éclat les mêmes postulats « multiculturalistes » et tolérants qui avaient présidé aux « guerres justes » anti-serbes des années 90 qui firent imploser l'ex-Yougoslavie, désormais remplacée par le virus des partitions ethno-nationalistes. Le syndrome de la "balkanisation" a de l'avenir et l'on comprend pourquoi l'Espagne et tous les Etats de la planète menacés par des rebellions sécessionnistes craignent tant l'indépendance annoncée du Kosovo...
Alexandre del Valle est géopolitologue, auteur de nombreux articles et ouvrages dont "Le Totalitarisme Islamiste" et "Le Dilemme Turc" parus aux éditions des Syrtes.
Source : http://www.alexandredelvalle.com/
Mardi 19 Février 2008
Dans une tribune publiée sur son blog lundi, le géopolitologue Alexandre del Valle craint que la proclamation de l'indépendance du Kosovo résonne comme un syndrome de la "balkanisation" qui menace toute l'Europe continentale. Avec l'appui des Etats-Unis et la servilité de l'Union européenne, "le sécessionnisme, les rebellions indépendantistes et le micro-nationalisme ethnique et religieux" ont de beaux jours devant eux. Le "virus des partitions ethno-nationalistes" est ainsi inoculé avec des conséquences en chaine qui pourraient être redoutables. Selon Del Valle, les conséquences géopolitiques de l’indépendance unilatérale du Kosovo sont considérables tant en terme d'implosion d'Etats fragiles et multiculturels partout dans le monde que de retour des guerres ethniques.
par Alexandre del Valle
Face aux réserves des « frères orthodoxes » et au véto russe que Moscou menace de brandir à l'ONU pour empêcher toute indépendance du Kosovo, le "premier ministre" kosovar et ex-combattant de l'UCK albanaise (mouvement terroriste lié à la Mafia albanaise qui avait réclamé la sécession et déclenché les représailles serbes puis l'intervention américaine en 19898-99), Hachim Taçi, avait voulu rassurer en déclarant à Bruxelles qu'il ne « ferait rien en ce qui concerne l'indépendance du Kosovo sans l'accord de l'UE et des Etats-Unis »... Mais chacun sait que la majorité des Etats de l'UE et les Etats-Unis ont d'ores et déjà assuré qu'ils ne s'opposeraient pas à la sécession du Kosovo.
C'est ainsi que le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki Moon s'est rendu dans les Balkans pour faire pression sur les pays européens hésitant encore à reconnaitre l'indépendance de la province serbe. Quant à la secrétaire d'état américain Condolezza Rice, plus directe encore, elle a appelé les Européens à ne pas attendre pour entériner l'indépendance future de la province serbe peuplée majoritairement d'Albanais et qui a été vidée de ses minorités serbes depuis la guerre de 1998-99. Washington s'emploie ainsi à convaincre des pays aussi différents que le Japon, les Etats islamiques du Golfe ou la Turquie, avertissant même que l'indépendance pourrait se faire en l'absence d'unanimité européenne, 15 pays favorables sur 27 étant jugés « suffisants »...
Or les conséquences géopolitiques de l'indépendance unilatérale du Kosovo sont nombreuses :
1/ elle inciterait nombre d'Etats dans le Monde à défier le droit international et le statu quo des frontières reconnues, faisant imploser pléthore d'Etat fragiles et multiculturels, pas uniquement en Afrique ou en Asie ou en Amérique latine, mais jusqu'à nos démocraties pacifiques : Belgique, menacé de partition entre Flamands et Wallons ; Italie du Nord avec le sécessionnisme de la Ligue du Nord, voire avec la Sicile et la Sardaigne; Espagne avec le terrorisme basque et l'autonomisme catalan, sans oublier leurs émules récentes l'Andalousie et la Galicie ; Grande Bretagne, avec l'Ecosse, notamment; France, avec la Corse, mais aussi la Nouvelle Calédonie et les Antilles françaises, etc; et bien sûr la République de Chypre, menacée par les intentions sécessionnistes désormais officielles de la République turque du Nord illégale, qui occupe pour le compte de la Turquie et en présence de 40 000 sodats turcs, le Nord de l'île de Chypre, etc.
2/ Elle pourrait provoquer le retour des guerres ethniques dans les Balkans et rompre le fragile équilibre instauré depuis la guerre du Kosovo: le nord de la province du Kosovo peuplé de Serbes, de plus en plus inquiets pour leur survie, face à la majorité hostile albanophone, pourrait lui aussi faire sécession du Kosovo indépendant, pour se joindre à la Serbie, ce qui pourrait provoquer une nouvelle crise grave entre Albanais et Serbes. Le fait que les Albanais du Kosovo s'unissent progressivement à l'Albanie voisine inciterait également les Serbes de Bosnie à remettre en question les accords de Dayton et à rejoindre la Serbie, puis les Croates de Bosnie-Herzégovine de faire de même et rejoindre la Croatie mère. Les Magyares (Hongrois) de Roumanie et de Serbie pourraient être tentés de reconstituer eux aussi la grande Hongrie et feraient imploser plusieurs Etats, etc… Sans oublier les sécessionnistes-indépendantistes albanais de Macédoine et du Monténégro, et même du Sud de la Serbie et de l'Epire du Nord (Grêce), qui, galvanisés par le dangereux précédent kosovar, pourraient franchir le rubicon et faire imploser plusieurs Etats, donnant à tant de rebelles du monde entier l'idée de remettre en questions "l'intangibilité des frontières", l'un des fondements du droit international et des Nations Unies...
Bref la boîte de Pandore du sécessionnisme, des rebellions indépendantistes et du micro-nationalisme ethnique et religieux risque de se rouvrir et de faire voler en éclat les mêmes postulats « multiculturalistes » et tolérants qui avaient présidé aux « guerres justes » anti-serbes des années 90 qui firent imploser l'ex-Yougoslavie, désormais remplacée par le virus des partitions ethno-nationalistes. Le syndrome de la "balkanisation" a de l'avenir et l'on comprend pourquoi l'Espagne et tous les Etats de la planète menacés par des rebellions sécessionnistes craignent tant l'indépendance annoncée du Kosovo...
Alexandre del Valle est géopolitologue, auteur de nombreux articles et ouvrages dont "Le Totalitarisme Islamiste" et "Le Dilemme Turc" parus aux éditions des Syrtes.
Source : http://www.alexandredelvalle.com/
Mardi 19 Février 2008
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