Rachid Nini, le directeur du quotidien Al Massae, a encore frappé. Lundi 3 décembre, dans sa chronique quotidienne, il a vomi sa haine sur TelQuel, Nichane, le Journal hebdomadaire, et tous ceux qui ont attiré l'attention sur le rôle dangereux qu'avait joué son journal dans l'affaire dite du “mariage homosexuel” de Ksar El Kébir - pour rappel, une sordide manipulation intégriste de l'opinion publique, qui a abouti à des émeutes, des pillages et un quasi-lynchage…
Ce n'est pas la première fois que M. Nini, aveuglé par la haine qu'il porte à tout ce qui ne lui ressemble pas, a recours à l'outrance et à l'amalgame. Nous ne réfuterons pas ses arguments un par un, aujourd'hui pas plus qu'hier. Il nous suffit d'affirmer que cet homme ment, manipule et tord les faits avec la plus évidente des mauvaises fois, puis de faire confiance à la sagesse des lecteurs (les nôtres comme les siens) pour se faire une opinion juste et raisonnable.
Si pourtant, cette semaine, nous avons décidé de prendre le cas Nini de front (par “nous”, j'entends toute l'équipe du groupe TelQuel, au nom de laquelle j'ai l'honneur de m'exprimer), c'est que cet homme est en train de devenir, en tant que porte-parole des intégristes et des populistes de tout poil, un danger pour la paix sociale et la (très fragile) ouverture démocratique du Maroc. C'est paradoxalement au nom de la démocratie et de la liberté d'expression, son indispensable corollaire, que M. Nini, dans son journal, s'arroge le droit de détruire des gens dont le seul crime est de lui déplaire. Régulièrement, il sonne la charge contre les musiciens, les créateurs, les féministes, les écrivains et les libres-penseurs de toute sorte, sans recul ni nuance et, bien entendu, sans une once d'autocritique, jamais. Qu'il exprime son désaccord avec tous ces gens est son droit, mais qu'il les calomnie outrageusement, à tel point qu'on les regarde de travers dans la rue, qu'on les agresse verbalement, voire physiquement, c'est intolérable et inacceptable.
Si cet homme a autant d'influence, c'est évidemment parce qu'Al Massae est un énorme succès. On aimerait penser que c'est grâce à sa très grande réactivité à l'actualité, comme à ses choix accrocheurs de sujets de Une. Rien à dire, Al Massae sait “vendre”, et ce n'est pas nous qui lui en ferions le reproche. Mais il est aussi permis de penser (et de s'alarmer du fait) que le succès de ce journal est dû aux orientations populistes et ultraconservatrices que lui imprime son directeur. Chaque jour, en effet, et avec un talent rhétorique certain, M. Nini distribue dans sa chronique des anathèmes simplistes et sans nuances, excitant les frustrations et attisant la peur. La peur qu'à cause des francophones, du “complot étranger”, des féministes, des homosexuels, des juifs (on en passe et des plus ignobles), notre pays n'en vienne à exploser en mille morceaux. Dans la confusion idéologique qui caractérise le Maroc, déchiré entre des référentiels traditionnel et moderne manifestement contradictoires, le discours de M. Nini trouve beaucoup d'écho. Parce qu'il rassure, assène des solutions simples à des problèmes complexes, trace des cadres clairs autour de situations confuses. Et surtout, parce qu'il pointe du doigt les coupables de tous nos maux : les “autres”…
Non seulement M. Nini diabolise tous ceux avec lesquels il n'est pas d'accord, mais il les désigne quasiment à la lapidation publique, sachant pertinemment que, vu le contexte religieux très tendu qui caractérise le Maroc d'aujourd'hui, les fanatiques rôdent, attendant qu'on leur désigne des cibles. C'est ainsi que, lundi 3 décembre, M. Nini m'a accusé de me “moquer de Dieu et de son prophète”. Qu'il n'ait pas apprécié le dossier de Nichane sur l'humour populaire marocain (rappelons encore une fois que nous n'avions inventé aucune des blagues publiées), c'est son droit. Mais qu'il appelle à la “pire des punitions” contre Nichane et son équipe - ce qui avait largement contribué à la cinquantaine de menaces de mort que nous avions reçues à cette époque - et que, un an après les faits et alors que l'agitation est retombée, il y revienne par une accusation aussi franche, directe et personnalisée, cela relève tout simplement du “takfir” (excommunication). Quand on a l'audience de M. Nini, c'est plus dangereux encore qu'une fatwa délivrée par on ne sait quel imam extrémiste. Cinéastes, artistes, intellectuels… ils sont des dizaines, comme moi, dont la sécurité a délibérément été mise en danger par cet homme. La plupart de ceux-là hésitent mille fois avant de lui répondre. Le plus souvent, ils finissent par y renoncer, de peur que M. Nini ne fasse sur eux une fixation quotidienne, jusqu'à ce qu'un exalté finisse par écouter son message.
Non, la liberté d'expression ne consiste pas à exploiter son audience pour exciter la haine et la violence contre des minorités sans défense, ou contre ceux qu'on considère ses “ennemis”. Oui, la liberté implique des responsabilités, et pas forcément celles dont le Makhzen parle. Le Maroc d'aujourd'hui est une poudrière, et Rachid Nini y jette une allumette enflammée par jour. Jusqu'à ce que le brasier s'allume…
Ce n'est pas la première fois que M. Nini, aveuglé par la haine qu'il porte à tout ce qui ne lui ressemble pas, a recours à l'outrance et à l'amalgame. Nous ne réfuterons pas ses arguments un par un, aujourd'hui pas plus qu'hier. Il nous suffit d'affirmer que cet homme ment, manipule et tord les faits avec la plus évidente des mauvaises fois, puis de faire confiance à la sagesse des lecteurs (les nôtres comme les siens) pour se faire une opinion juste et raisonnable.
Si pourtant, cette semaine, nous avons décidé de prendre le cas Nini de front (par “nous”, j'entends toute l'équipe du groupe TelQuel, au nom de laquelle j'ai l'honneur de m'exprimer), c'est que cet homme est en train de devenir, en tant que porte-parole des intégristes et des populistes de tout poil, un danger pour la paix sociale et la (très fragile) ouverture démocratique du Maroc. C'est paradoxalement au nom de la démocratie et de la liberté d'expression, son indispensable corollaire, que M. Nini, dans son journal, s'arroge le droit de détruire des gens dont le seul crime est de lui déplaire. Régulièrement, il sonne la charge contre les musiciens, les créateurs, les féministes, les écrivains et les libres-penseurs de toute sorte, sans recul ni nuance et, bien entendu, sans une once d'autocritique, jamais. Qu'il exprime son désaccord avec tous ces gens est son droit, mais qu'il les calomnie outrageusement, à tel point qu'on les regarde de travers dans la rue, qu'on les agresse verbalement, voire physiquement, c'est intolérable et inacceptable.
Si cet homme a autant d'influence, c'est évidemment parce qu'Al Massae est un énorme succès. On aimerait penser que c'est grâce à sa très grande réactivité à l'actualité, comme à ses choix accrocheurs de sujets de Une. Rien à dire, Al Massae sait “vendre”, et ce n'est pas nous qui lui en ferions le reproche. Mais il est aussi permis de penser (et de s'alarmer du fait) que le succès de ce journal est dû aux orientations populistes et ultraconservatrices que lui imprime son directeur. Chaque jour, en effet, et avec un talent rhétorique certain, M. Nini distribue dans sa chronique des anathèmes simplistes et sans nuances, excitant les frustrations et attisant la peur. La peur qu'à cause des francophones, du “complot étranger”, des féministes, des homosexuels, des juifs (on en passe et des plus ignobles), notre pays n'en vienne à exploser en mille morceaux. Dans la confusion idéologique qui caractérise le Maroc, déchiré entre des référentiels traditionnel et moderne manifestement contradictoires, le discours de M. Nini trouve beaucoup d'écho. Parce qu'il rassure, assène des solutions simples à des problèmes complexes, trace des cadres clairs autour de situations confuses. Et surtout, parce qu'il pointe du doigt les coupables de tous nos maux : les “autres”…
Non seulement M. Nini diabolise tous ceux avec lesquels il n'est pas d'accord, mais il les désigne quasiment à la lapidation publique, sachant pertinemment que, vu le contexte religieux très tendu qui caractérise le Maroc d'aujourd'hui, les fanatiques rôdent, attendant qu'on leur désigne des cibles. C'est ainsi que, lundi 3 décembre, M. Nini m'a accusé de me “moquer de Dieu et de son prophète”. Qu'il n'ait pas apprécié le dossier de Nichane sur l'humour populaire marocain (rappelons encore une fois que nous n'avions inventé aucune des blagues publiées), c'est son droit. Mais qu'il appelle à la “pire des punitions” contre Nichane et son équipe - ce qui avait largement contribué à la cinquantaine de menaces de mort que nous avions reçues à cette époque - et que, un an après les faits et alors que l'agitation est retombée, il y revienne par une accusation aussi franche, directe et personnalisée, cela relève tout simplement du “takfir” (excommunication). Quand on a l'audience de M. Nini, c'est plus dangereux encore qu'une fatwa délivrée par on ne sait quel imam extrémiste. Cinéastes, artistes, intellectuels… ils sont des dizaines, comme moi, dont la sécurité a délibérément été mise en danger par cet homme. La plupart de ceux-là hésitent mille fois avant de lui répondre. Le plus souvent, ils finissent par y renoncer, de peur que M. Nini ne fasse sur eux une fixation quotidienne, jusqu'à ce qu'un exalté finisse par écouter son message.
Non, la liberté d'expression ne consiste pas à exploiter son audience pour exciter la haine et la violence contre des minorités sans défense, ou contre ceux qu'on considère ses “ennemis”. Oui, la liberté implique des responsabilités, et pas forcément celles dont le Makhzen parle. Le Maroc d'aujourd'hui est une poudrière, et Rachid Nini y jette une allumette enflammée par jour. Jusqu'à ce que le brasier s'allume…
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