Sous l’impulsion d’une volonté politique manifeste, les entreprises marocaines se ruent sur l’Afrique noire. Le continent regorge d’opportunités d’affaires, mais également d’obstacles. Tour d’horizon. Le Sénégal, accueille Mohammed VI dans le cadre de sa troisième tournée africaine. La journée est alors déclarée fériée dans le pays et la population est venue par milliers acclamer le souverain sur la passerelle d’un aéroport qui ressemble plutôt à un terrain vague.
L’image en dit long sur la popularité et la respectabilité dont jouit le Maroc dans ce pays, voire dans toute la région d’Afrique de l’Ouest. Une respectabilité que le royaume doit d’abord à une implication personnelle du roi. Dès 2000, un an seulement après son accession au pouvoir, Mohammed VI envoie un message d’envergure au continent. Lors du sommet Europe - Afrique tenu au Caire, il annonce l’annulation de la dette des pays africains les moins avancés et l’exonération totale des droits de douane sur leurs marchandises. Plus qu’un signal, c’est une véritable rupture pour le royaume dans sa politique africaine, mise en “stand by” depuis que le Maroc s’est retiré de l’Organisation de l’Unité Africaine (aujourd’hui Union Africaine), suite à la reconnaissance par cette dernière de la RASD en 1984.
Ces retrouvailles avec le continent ne sont que le premier pas d’une stratégie d’expansion économique en Afrique voulue par le souverain. Au cours de ses périples africains, le roi signe des conventions à tour de bras avec différents pays de la région. Des accords qui balisent le terrain pour une véritable ruée des entreprises marocaines sur le continent. “Ces conventions, sur la protection des investissements ou de la non-double imposition, que le Maroc a signées avec différents pays d’Afrique de l’Ouest, sont primordiales pour encourager les échanges commerciaux et les investissements”, explique Mehdi Mimoun de la Direction des études et de la coopération sectorielle au ministère des Affaires étrangères.
“Saga Africa”
Le but est sans doute l’accroissement des échanges avec cette zone, dont le niveau actuel est loin de refléter les relations singulières entretenues avec ces pays. Estimés en moyenne à 360 millions de dollars, les échanges commerciaux entre le Maroc et l’Afrique subsaharienne représentent 2% à peine de la valeur globale des échanges extérieurs du royaume. Une situation appelée à évoluer, surtout que, depuis quelques années, le secteur privé met le paquet sur cette région pour mener une stratégie de croissance externe.
En effet, dès 2000, un grand nombre d’entreprises marocaines sont allées s’installer en Afrique. Managem a signé des partenariats pour la production d’or et de cobalt, respectivement au Congo et au Gabon, via un investissement de plus de 300 millions de dirhams. La filiale minière de l’ONA est également présente en Guinée, au Mali, au Burkina Faso et au Niger. BMCE Bank, de son côté, a été aussi l’une des premières entreprises à se tourner vers le continent africain. En s’implantant en mars 2003 au Sénégal, BMCE Capital s’est imposée parmi les banques d’affaires sur lesquelles le gouvernement sénégalais s’appuie pour ses montages financiers. En quatre ans d’activité, son palmarès est édifiant : emprunt de 50 millions d’euros pour le compte du port autonome de Dakar, privatisation du distributeur d’électricité Senelec (dans lequel l’ONE a pris une participation), financement pour la construction de l’aéroport international de Dakar et, tout récemment, l’accompagnement pour l’attribution d’une troisième licence de téléphonie. Une licence qui intéresse au plus haut point une autre entreprise marocaine, devenue particulièrement active sur le continent africain. En effet, après avoir pris la majorité des opérateurs historiques en Mauritanie puis au Burkina Faso, Maroc Telecom suit de près la troisième licence sénégalaise.
Néanmoins, les investissements marocains en Afrique sont loin de se limiter aux opérations réalisées par les grands groupes. L’un des opérateurs les plus connus en Afrique est sans doute l’homme d’affaires Youssef Tazi. Son groupe, CCGT, est très actif en Guinée où il a décroché un projet d’aménagement d’un périmètre agricole pour une enveloppe de 70 millions de dirhams. Il a aussi remporté au Sénégal l’un des plus grands chantiers publics, avec une route de 230 kilomètres. Autre succès en Afrique subsaharienne : celui du laboratoire casablancais Sothema, qui a investi 7,5 millions d’euros pour la construction d’une unité de fabrication de médicaments, “West Afric Pharma”. Le déplacement d’une délégation d’hommes d’affaires conduite par Driss Jettou, prévu pour cette semaine, devrait apporter son lot de nouveautés. Il est en effet question de nombreux partenariats avec les investisseurs des pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA).
Les entreprises publiques ne sont pas en reste. La Comanav comme la RAM sont également parties à la conquête de l’eldorado africain. Pour des raisons souvent politiques. Ainsi, c’est le souverain lui-même qui a ordonné à la compagnie maritime de trouver une solution pour le désenclavement de la région de la Casamance, restée isolée du monde entre 2002 et 2004 après le naufrage du navire qui reliait Dakar à Zinguichor. La RAM, de son côté, est intervenue au Sénégal après la faillite de la compagnie aérienne du pays. Avec la création d’Air Sénégal International, en partenariat avec l’Etat sénégalais, la RAM a pu non seulement sauver la centaine d’emplois de la société défunte, mais aussi en créer plusieurs dizaines.
Jalousies et oppositions
Bien évidemment, cette présence de plus en plus marquée des entreprises marocaines en Afrique - et particulièrement au Sénégal - ne fait pas que des contents. Les entreprises françaises, qui ont vu leurs homologues marocaines leur damer le pion sur différents marchés, ne cachent plus leur mécontentement. Le club des investisseurs français au Sénégal, une association qui regroupe une centaine d’entreprises, avait même déclaré dans la presse française son inquiétude quant à la déferlante marocaine. Même certains Sénégalais ne voient pas d’un bon œil le renforcement des intérêts marocains dans le pays. À titre d’exemple, le parti socialiste sénégalais n’hésite pas à reproduire sur son blog les déclarations d’un opposant au régime, qui critique fortement les accointances entre les deux chefs d’Etat. Ce dernier évoque l’éventualité de l’octroi de la 3ème licence de téléphonie à Maroc Telecom comme “un pas de géant de plus des sujets de Mohammed VI dans la cour, déjà remplie, d’Abdoulaye Wade”. Il met également en exergue l’amitié intime qui lie les représentants de BMCE Capital et le fils du président Wade. Autre exemple : les déboires du groupe Chaâbi, qui s’est vu retirer un gigantesque projet de logement social au Sénégal, alors que l’accord de la présidence lui était déjà acquis.
Pourtant, la proximité entre le Maroc et le Sénégal est loin de reposer sur de simples relations d’amitié entre chefs d’Etat. Bien que l’amitié entre Karim Wade, le fils du président, et Mohammed VI soit un secret de polichinelle, le Maroc a d’autres tours dans son chapeau. À leur tête, les liens religieux qui unissent les deux pays. Les fameuses confréries religieuses, Tijania et Kadiriya, vouent un respect particulier à la Commanderie des croyants. Il y a aussi la forte présence de la diaspora marocaine en Afrique noire. Rien qu’au Sénégal, la communauté marocaine compte près de 2 000 personnes. Et encore, il ne s’agirait là que de chiffres approximatifs. “Plusieurs de nos compatriotes appartenant aux deuxième et troisième générations jouissent déjà de la nationalité sénégalaise. Et d’autres ne sont pas répertoriés par nos représentations diplomatiques, pour la simple raison qu’ils n’ont pas besoin de cartes de séjour pour résider au Sénégal”, indique-t-on auprès du ministère des Affaires étrangères. Last but not least, le Maroc peut aussi compter sur les nombreux décideurs africains qui ont été formés au Maroc ou par des Marocains. En effet, depuis 1987, le royaume accorde chaque année quelque 6000 bourses gouvernementales aux étudiants africains.
Ceci dit, les obstacles à l’investissement dans les pays africains restent assez importants. Malgré un dynamisme diplomatique incontestable, des efforts restent à faire dans le domaine. “Les équipes en place sont focalisées essentiellement sur l’affaire du Sahara et n’accordent que peu d’intérêt aux questions économiques”, confie une entrepreneur marocain. S’ajoute à cela la corruption endémique qui rend difficile l’accès à certains marchés. D’autre part, les entrepreneurs marocains associent souvent Afrique, “sinistrose économique” et “instabilité politique”. Il faut dire que certains événements, comme la guerre civile en Côte d’Ivoire ou la dévaluation du franc guinéen, réduisant à néant le pouvoir d’achat de la population, leur donnent souvent raison. Néanmoins, des succès sont aussi là pour rassurer quant au gisement de croissance que représente le continent.
Entreprises publiques : Une orientation politique
Il n’y a pas de secret. Que ce soit pour la Comanav ou pour la RAM, la décision d’investir en Afrique est “venue d’en haut”. Pour commencer, Air Sénégal International est venue remplacer la défunte Air Sénégal (tout court). La quasi-totalité des salariés a été reprise par cette nouvelle compagnie que la RAM contrôle à 51%. Et l’actionnaire principal ne lésine pas sur les moyens pour moderniser au mieux sa filiale africaine. Exemple : en juillet 2005, la compagnie recevait - pratiquement au même moment que sa maison-mère - un Boeing 767-700. Une livraison qui a pris des allures de fête au Sénégal : le président Abdoulaye Wade, accompagné d’une armée de ministres, avait assisté à la réception officielle du gros porteur. Aujourd’hui, Air Sénégal International (ASI) déploie ses ailes sur tout le continent africain. Mais l’investissement de la RAM s’est révélé plus rentable que prévu. À fin 2005, ASI a transporté quelque 400 000 passagers, réalisant un chiffre d’affaires avoisinant le milliard de dirhams et dégageant un bénéfice d’une dizaine de millions. “Le plan d’affaires initial prévoyait un trafic de près de 150 000 passagers seulement”, précise-t-on du côté de la RAM.
La Comanav n’a pas eu autant de “chance”. C’est en 2004, alors qu’elle poursuivait toujours un plan de redressement draconien, que la compagnie maritime mouille au Sénégal. Dictée au cours d’un voyage officiel du roi en Afrique, son intervention devait répondre à un besoin humanitaire. Depuis 2002, la Casamance, région au sud du Sénégal, s’est retrouvée enclavée après que le Joola (bateau assurant alors la navette entre Dakar et Ziguinchor) eut chaviré au large des côtes gambiennes. Une catastrophe maritime considérée comme la plus importante de tous les temps (1800 disparus, plus que les 1500 du Titanic).
L’image en dit long sur la popularité et la respectabilité dont jouit le Maroc dans ce pays, voire dans toute la région d’Afrique de l’Ouest. Une respectabilité que le royaume doit d’abord à une implication personnelle du roi. Dès 2000, un an seulement après son accession au pouvoir, Mohammed VI envoie un message d’envergure au continent. Lors du sommet Europe - Afrique tenu au Caire, il annonce l’annulation de la dette des pays africains les moins avancés et l’exonération totale des droits de douane sur leurs marchandises. Plus qu’un signal, c’est une véritable rupture pour le royaume dans sa politique africaine, mise en “stand by” depuis que le Maroc s’est retiré de l’Organisation de l’Unité Africaine (aujourd’hui Union Africaine), suite à la reconnaissance par cette dernière de la RASD en 1984.
Ces retrouvailles avec le continent ne sont que le premier pas d’une stratégie d’expansion économique en Afrique voulue par le souverain. Au cours de ses périples africains, le roi signe des conventions à tour de bras avec différents pays de la région. Des accords qui balisent le terrain pour une véritable ruée des entreprises marocaines sur le continent. “Ces conventions, sur la protection des investissements ou de la non-double imposition, que le Maroc a signées avec différents pays d’Afrique de l’Ouest, sont primordiales pour encourager les échanges commerciaux et les investissements”, explique Mehdi Mimoun de la Direction des études et de la coopération sectorielle au ministère des Affaires étrangères.
“Saga Africa”
Le but est sans doute l’accroissement des échanges avec cette zone, dont le niveau actuel est loin de refléter les relations singulières entretenues avec ces pays. Estimés en moyenne à 360 millions de dollars, les échanges commerciaux entre le Maroc et l’Afrique subsaharienne représentent 2% à peine de la valeur globale des échanges extérieurs du royaume. Une situation appelée à évoluer, surtout que, depuis quelques années, le secteur privé met le paquet sur cette région pour mener une stratégie de croissance externe.
En effet, dès 2000, un grand nombre d’entreprises marocaines sont allées s’installer en Afrique. Managem a signé des partenariats pour la production d’or et de cobalt, respectivement au Congo et au Gabon, via un investissement de plus de 300 millions de dirhams. La filiale minière de l’ONA est également présente en Guinée, au Mali, au Burkina Faso et au Niger. BMCE Bank, de son côté, a été aussi l’une des premières entreprises à se tourner vers le continent africain. En s’implantant en mars 2003 au Sénégal, BMCE Capital s’est imposée parmi les banques d’affaires sur lesquelles le gouvernement sénégalais s’appuie pour ses montages financiers. En quatre ans d’activité, son palmarès est édifiant : emprunt de 50 millions d’euros pour le compte du port autonome de Dakar, privatisation du distributeur d’électricité Senelec (dans lequel l’ONE a pris une participation), financement pour la construction de l’aéroport international de Dakar et, tout récemment, l’accompagnement pour l’attribution d’une troisième licence de téléphonie. Une licence qui intéresse au plus haut point une autre entreprise marocaine, devenue particulièrement active sur le continent africain. En effet, après avoir pris la majorité des opérateurs historiques en Mauritanie puis au Burkina Faso, Maroc Telecom suit de près la troisième licence sénégalaise.
Néanmoins, les investissements marocains en Afrique sont loin de se limiter aux opérations réalisées par les grands groupes. L’un des opérateurs les plus connus en Afrique est sans doute l’homme d’affaires Youssef Tazi. Son groupe, CCGT, est très actif en Guinée où il a décroché un projet d’aménagement d’un périmètre agricole pour une enveloppe de 70 millions de dirhams. Il a aussi remporté au Sénégal l’un des plus grands chantiers publics, avec une route de 230 kilomètres. Autre succès en Afrique subsaharienne : celui du laboratoire casablancais Sothema, qui a investi 7,5 millions d’euros pour la construction d’une unité de fabrication de médicaments, “West Afric Pharma”. Le déplacement d’une délégation d’hommes d’affaires conduite par Driss Jettou, prévu pour cette semaine, devrait apporter son lot de nouveautés. Il est en effet question de nombreux partenariats avec les investisseurs des pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA).
Les entreprises publiques ne sont pas en reste. La Comanav comme la RAM sont également parties à la conquête de l’eldorado africain. Pour des raisons souvent politiques. Ainsi, c’est le souverain lui-même qui a ordonné à la compagnie maritime de trouver une solution pour le désenclavement de la région de la Casamance, restée isolée du monde entre 2002 et 2004 après le naufrage du navire qui reliait Dakar à Zinguichor. La RAM, de son côté, est intervenue au Sénégal après la faillite de la compagnie aérienne du pays. Avec la création d’Air Sénégal International, en partenariat avec l’Etat sénégalais, la RAM a pu non seulement sauver la centaine d’emplois de la société défunte, mais aussi en créer plusieurs dizaines.
Jalousies et oppositions
Bien évidemment, cette présence de plus en plus marquée des entreprises marocaines en Afrique - et particulièrement au Sénégal - ne fait pas que des contents. Les entreprises françaises, qui ont vu leurs homologues marocaines leur damer le pion sur différents marchés, ne cachent plus leur mécontentement. Le club des investisseurs français au Sénégal, une association qui regroupe une centaine d’entreprises, avait même déclaré dans la presse française son inquiétude quant à la déferlante marocaine. Même certains Sénégalais ne voient pas d’un bon œil le renforcement des intérêts marocains dans le pays. À titre d’exemple, le parti socialiste sénégalais n’hésite pas à reproduire sur son blog les déclarations d’un opposant au régime, qui critique fortement les accointances entre les deux chefs d’Etat. Ce dernier évoque l’éventualité de l’octroi de la 3ème licence de téléphonie à Maroc Telecom comme “un pas de géant de plus des sujets de Mohammed VI dans la cour, déjà remplie, d’Abdoulaye Wade”. Il met également en exergue l’amitié intime qui lie les représentants de BMCE Capital et le fils du président Wade. Autre exemple : les déboires du groupe Chaâbi, qui s’est vu retirer un gigantesque projet de logement social au Sénégal, alors que l’accord de la présidence lui était déjà acquis.
Pourtant, la proximité entre le Maroc et le Sénégal est loin de reposer sur de simples relations d’amitié entre chefs d’Etat. Bien que l’amitié entre Karim Wade, le fils du président, et Mohammed VI soit un secret de polichinelle, le Maroc a d’autres tours dans son chapeau. À leur tête, les liens religieux qui unissent les deux pays. Les fameuses confréries religieuses, Tijania et Kadiriya, vouent un respect particulier à la Commanderie des croyants. Il y a aussi la forte présence de la diaspora marocaine en Afrique noire. Rien qu’au Sénégal, la communauté marocaine compte près de 2 000 personnes. Et encore, il ne s’agirait là que de chiffres approximatifs. “Plusieurs de nos compatriotes appartenant aux deuxième et troisième générations jouissent déjà de la nationalité sénégalaise. Et d’autres ne sont pas répertoriés par nos représentations diplomatiques, pour la simple raison qu’ils n’ont pas besoin de cartes de séjour pour résider au Sénégal”, indique-t-on auprès du ministère des Affaires étrangères. Last but not least, le Maroc peut aussi compter sur les nombreux décideurs africains qui ont été formés au Maroc ou par des Marocains. En effet, depuis 1987, le royaume accorde chaque année quelque 6000 bourses gouvernementales aux étudiants africains.
Ceci dit, les obstacles à l’investissement dans les pays africains restent assez importants. Malgré un dynamisme diplomatique incontestable, des efforts restent à faire dans le domaine. “Les équipes en place sont focalisées essentiellement sur l’affaire du Sahara et n’accordent que peu d’intérêt aux questions économiques”, confie une entrepreneur marocain. S’ajoute à cela la corruption endémique qui rend difficile l’accès à certains marchés. D’autre part, les entrepreneurs marocains associent souvent Afrique, “sinistrose économique” et “instabilité politique”. Il faut dire que certains événements, comme la guerre civile en Côte d’Ivoire ou la dévaluation du franc guinéen, réduisant à néant le pouvoir d’achat de la population, leur donnent souvent raison. Néanmoins, des succès sont aussi là pour rassurer quant au gisement de croissance que représente le continent.
Entreprises publiques : Une orientation politique
Il n’y a pas de secret. Que ce soit pour la Comanav ou pour la RAM, la décision d’investir en Afrique est “venue d’en haut”. Pour commencer, Air Sénégal International est venue remplacer la défunte Air Sénégal (tout court). La quasi-totalité des salariés a été reprise par cette nouvelle compagnie que la RAM contrôle à 51%. Et l’actionnaire principal ne lésine pas sur les moyens pour moderniser au mieux sa filiale africaine. Exemple : en juillet 2005, la compagnie recevait - pratiquement au même moment que sa maison-mère - un Boeing 767-700. Une livraison qui a pris des allures de fête au Sénégal : le président Abdoulaye Wade, accompagné d’une armée de ministres, avait assisté à la réception officielle du gros porteur. Aujourd’hui, Air Sénégal International (ASI) déploie ses ailes sur tout le continent africain. Mais l’investissement de la RAM s’est révélé plus rentable que prévu. À fin 2005, ASI a transporté quelque 400 000 passagers, réalisant un chiffre d’affaires avoisinant le milliard de dirhams et dégageant un bénéfice d’une dizaine de millions. “Le plan d’affaires initial prévoyait un trafic de près de 150 000 passagers seulement”, précise-t-on du côté de la RAM.
La Comanav n’a pas eu autant de “chance”. C’est en 2004, alors qu’elle poursuivait toujours un plan de redressement draconien, que la compagnie maritime mouille au Sénégal. Dictée au cours d’un voyage officiel du roi en Afrique, son intervention devait répondre à un besoin humanitaire. Depuis 2002, la Casamance, région au sud du Sénégal, s’est retrouvée enclavée après que le Joola (bateau assurant alors la navette entre Dakar et Ziguinchor) eut chaviré au large des côtes gambiennes. Une catastrophe maritime considérée comme la plus importante de tous les temps (1800 disparus, plus que les 1500 du Titanic).
Commentaire