6 mars 2014 – Le 5 mars 2014, nous donnions une Brèves de crise sur une conversation de plus de dix minutes, parfaitement audible et compréhensible, entre le ministre des affaires étrangères estonien Urmas Paet et la Haute Représentante de l’UE Lady Ashton. (L’Estonie est l’un des pays les plus antirusses de l’UE. A cet égard, son ministre est au-dessus de tout soupçon.) On connaît la partie qui a été la plus mise en évidence dans cette conversation, présentée comme ayant été interceptée par les services de renseignement ukrainiens, le SUB, – qui, soit dit en passant, sont décrits en l’occurrence comme fidèles à Ianoukovitch. Il s’agit de la responsabilité des tirs de snipers sur la foule d’Euromaidan à Kiev, ces incidents qui ont constitué une partie essentielle des événements ayant conduit directement à la chute de Ianoukovitch.
L’importance de la révélation est très justement appréciée par MK Bhadrakumar, sur son site IndianPunchLine), le 6 mars 2014 :
De l’immédiateté à la profondeur
Instruits par l’expérience et considérant l’importance de la chose, nous envisagions, dans une première réaction qui montre combien les événements vont plus vite que notre jugement, que l’effet de communication serait au moins aussi considérable que la conversation entre Victoria Nuland et l’ambassadeur US en Ukraine Pyat (voir le 7 février 2014 et le 10 février 2014). Cette prévision se justifiait, nous semblait-il, tant le sujet, et les affirmations du ministre estonien, étaient d’une très grande importance politique. Il n’en est rien (pour l’instant), – l’effet (de communication, insistons là-dessus) est faible, diffus et amoindri, voire quasiment nul, ou déformé selon les techniques employées.
Nous avons donc fait preuve de naïveté, ou bien est-ce qu’il y a eu un changement considérable entre la vérité de la situation de la communication entre le “moment-Nuland” et le “moment-Paet”. La première explication n’est pas fausse, mais nous nuancerions le mot de “naïveté” de celui d’“inattention”, et inattention due à la rapidité des événements depuis une grosse décade (depuis le 21 février) qui nous emporte et mobilise notre attention sur l’immédiateté des choses aux dépens de leur profondeur. La seconde explication, de loin la plus puissante et la plus intéressante, est certainement juste et mérite des commentaires spécifiques que nous nous promettons de donner, assez rapidement, dans un contexte plus large que le seul cas Paet-Ashton.
En attendant la promesse ci-dessus, nous donnons quelques éléments pour présenter cette affaire. Quelques-uns de ces éléments concernent le fond, largement évident à l’audition du message que tout le monde peut entendre, mais encore plus intéressant lorsqu’on s’attarde aux détails. Les autres éléments, plus nombreux, concerne la forme qu’a prise cette affaire dans les effets qu'elle a déclenchés, ou n'a pas déclenchés, cette forme constituant l’essentiel de notre propos et ce qui nous paraît le plus intéressant.
10 minutes 49 secondes de franc-parler
Sur le fond d’abord, quelques précisions parce qu’il n’est pas seulement question, dans ce coup de téléphone, de la question des snipers. Le site Moon of Alabama a fait un excellent travail : il a résumé en quelques citations (la conversation est extrêmement audible et compréhensible) les principaux points de cette conversation, essentiellement de la part du ministre Paet qui, en quelque sorte, rendait compte à Ashton. (Voir MoA, le 5 février 2014). Les formules résumant tel ou tel passage sont suivies, entre parenthèses et exprimées en minutage sur la conversation qui fait 10 minutes 49 secondes, du moment chronologique de la conversation où se situe ce passage...
Tout cela est vrai, mais bon...
Un deuxième point important est que Paet a complètement confirmé l’authenticité de la conversation enregistrée. Il a diffusé cette confirmation dans un message tweeté et il a donné une conférence de presse à ce propos. Russia Today (le 5 mars 2014) donne un rapport de la chose, incluant des conversations entre Novosti et Paet. On notera que RT va un peu loin et un peu vite lorsqu’il écrit, en tête de l’article, que
»RT has contacted Ashton’s spokesperson, Maja Kocijancic, who said “we don’t comment on leaked phone conversations.”»
L’importance de la révélation est très justement appréciée par MK Bhadrakumar, sur son site IndianPunchLine), le 6 mars 2014 :
«Diplomats may say one thing while facing the camera while knowing fully well that facts do not bear out what they say. Call it propaganda and posturing – or, ‘public diplomacy’ – but at the end of the day, the sensational disclosure to the effect that the violence and bloodshed that Kiev witnessed in the crucial run-up to the fall of President Viktor Yanukovich was not due to ‘repression’ ordered by him but was perpetrated by the ultra-nationalist elements and their hit men completely demolishes the narrative propounded by the United States.
»In sum, the Russian stance is vindicated – there has indeed been a coup and the usurpers in charge of the governmental machinery in Kiev today lack legitimacy. The big question is whether this ‘revelation’ would make a substantial difference at this late stage. After all, President Barack Obama and Secretary of State John Kerry did have the benefit of intelligence inputs and knew precisely what was going on, and yet, they went ahead with their fictional narrative.»
»In sum, the Russian stance is vindicated – there has indeed been a coup and the usurpers in charge of the governmental machinery in Kiev today lack legitimacy. The big question is whether this ‘revelation’ would make a substantial difference at this late stage. After all, President Barack Obama and Secretary of State John Kerry did have the benefit of intelligence inputs and knew precisely what was going on, and yet, they went ahead with their fictional narrative.»
Instruits par l’expérience et considérant l’importance de la chose, nous envisagions, dans une première réaction qui montre combien les événements vont plus vite que notre jugement, que l’effet de communication serait au moins aussi considérable que la conversation entre Victoria Nuland et l’ambassadeur US en Ukraine Pyat (voir le 7 février 2014 et le 10 février 2014). Cette prévision se justifiait, nous semblait-il, tant le sujet, et les affirmations du ministre estonien, étaient d’une très grande importance politique. Il n’en est rien (pour l’instant), – l’effet (de communication, insistons là-dessus) est faible, diffus et amoindri, voire quasiment nul, ou déformé selon les techniques employées.
Nous avons donc fait preuve de naïveté, ou bien est-ce qu’il y a eu un changement considérable entre la vérité de la situation de la communication entre le “moment-Nuland” et le “moment-Paet”. La première explication n’est pas fausse, mais nous nuancerions le mot de “naïveté” de celui d’“inattention”, et inattention due à la rapidité des événements depuis une grosse décade (depuis le 21 février) qui nous emporte et mobilise notre attention sur l’immédiateté des choses aux dépens de leur profondeur. La seconde explication, de loin la plus puissante et la plus intéressante, est certainement juste et mérite des commentaires spécifiques que nous nous promettons de donner, assez rapidement, dans un contexte plus large que le seul cas Paet-Ashton.
En attendant la promesse ci-dessus, nous donnons quelques éléments pour présenter cette affaire. Quelques-uns de ces éléments concernent le fond, largement évident à l’audition du message que tout le monde peut entendre, mais encore plus intéressant lorsqu’on s’attarde aux détails. Les autres éléments, plus nombreux, concerne la forme qu’a prise cette affaire dans les effets qu'elle a déclenchés, ou n'a pas déclenchés, cette forme constituant l’essentiel de notre propos et ce qui nous paraît le plus intéressant.
10 minutes 49 secondes de franc-parler
Sur le fond d’abord, quelques précisions parce qu’il n’est pas seulement question, dans ce coup de téléphone, de la question des snipers. Le site Moon of Alabama a fait un excellent travail : il a résumé en quelques citations (la conversation est extrêmement audible et compréhensible) les principaux points de cette conversation, essentiellement de la part du ministre Paet qui, en quelque sorte, rendait compte à Ashton. (Voir MoA, le 5 février 2014). Les formules résumant tel ou tel passage sont suivies, entre parenthèses et exprimées en minutage sur la conversation qui fait 10 minutes 49 secondes, du moment chronologique de la conversation où se situe ce passage...
«Paet reports from his talks with somewhat neutral people on the Maidan, including some Olga that Ashton also knows, during a recent visit in Kiev:
» • there is no trust of the people in the new government (2:35) ;
» • all of them in the new government have a dirty past (2:50) ;
» • the trust level (towards the new government) is absolutely low (3:20) ;
» • enormous pressure against (party of the region) members of parliament (3:40) ;
» • “uninvited visitors” enter in the night on party members (3:50) ;
» • journalists who were with me saw during the day that one member of parliament was just beaten in front of the parliament (4:00) ;
» • people will not leave the street before real reforms start, it is not enough that there is just change of government (4:20) ;
» • the same Olga (from a civil society group) told me that people killed by snipers on both sides, among policemen and people on the street, that they were the same snipers killing people from both sides, she showed me some photos and said she has a medical doctor and that it is the same handwriting and the same type of bullets and it is disturbing that the new coalition now don't want to investigate (8:25) ;
» • There is now stronger and stronger understanding that behind snipers it was not Yanukovich but it was somebody from the new coalition. (8:55) ;
» • it discredited itself from the very beginning this new coalition (9:20)...»
» • there is no trust of the people in the new government (2:35) ;
» • all of them in the new government have a dirty past (2:50) ;
» • the trust level (towards the new government) is absolutely low (3:20) ;
» • enormous pressure against (party of the region) members of parliament (3:40) ;
» • “uninvited visitors” enter in the night on party members (3:50) ;
» • journalists who were with me saw during the day that one member of parliament was just beaten in front of the parliament (4:00) ;
» • people will not leave the street before real reforms start, it is not enough that there is just change of government (4:20) ;
» • the same Olga (from a civil society group) told me that people killed by snipers on both sides, among policemen and people on the street, that they were the same snipers killing people from both sides, she showed me some photos and said she has a medical doctor and that it is the same handwriting and the same type of bullets and it is disturbing that the new coalition now don't want to investigate (8:25) ;
» • There is now stronger and stronger understanding that behind snipers it was not Yanukovich but it was somebody from the new coalition. (8:55) ;
» • it discredited itself from the very beginning this new coalition (9:20)...»
Un deuxième point important est que Paet a complètement confirmé l’authenticité de la conversation enregistrée. Il a diffusé cette confirmation dans un message tweeté et il a donné une conférence de presse à ce propos. Russia Today (le 5 mars 2014) donne un rapport de la chose, incluant des conversations entre Novosti et Paet. On notera que RT va un peu loin et un peu vite lorsqu’il écrit, en tête de l’article, que
«Urmas Paet said that snipers who shot at protesters and police in Kiev were hired by Maidan leaders» (en réalité, selon Paet : «There is now stronger and stronger understanding that behind the snipers, it was not Yanukovich, but it was somebody from the new coalition»).
«Estonian foreign ministry has confirmed the recording of his conversation with EU foreign policy chief is authentic. Urmas Paet said that snipers who shot at protesters and police in Kiev were hired by Maidan leaders. Paet told RIA-Novosti news agency that he talked to Catherine Ashton last week right after retiring from Kiev, but refrained from further comments, saying that he has to “listen to the tape first.” “It’s very disappointing that such surveillance took place altogether. It’s not a coincidence that this conversation was uploaded [to the web] today,” he stressed. “My conversation with Ashton took place last week right after I returned from Kiev. At that time I was already in Estonia,” Paet added.
»Paet also gave a press conference about the leaked tape on Wednesday, saying that the dramatic events in Kiev, which resulted in people being killed, must become the subject of an independent investigation. The Estonian Ministry of Foreign Affairs also issued a statement on its website, saying that the recording of the leaked telephone conversation between Paet and Ashton is “authentic.” [...] “We reject the claim that Paet was giving an assessment of the opposition’s involvement in the violence," the statement stressed, adding that the FM was only providing an overview of what he had heard during his Kiev visit.»
»Paet also gave a press conference about the leaked tape on Wednesday, saying that the dramatic events in Kiev, which resulted in people being killed, must become the subject of an independent investigation. The Estonian Ministry of Foreign Affairs also issued a statement on its website, saying that the recording of the leaked telephone conversation between Paet and Ashton is “authentic.” [...] “We reject the claim that Paet was giving an assessment of the opposition’s involvement in the violence," the statement stressed, adding that the FM was only providing an overview of what he had heard during his Kiev visit.»
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