Les 12 leçons de Mahathir Mohamed, ancien premier ministre malaisien.
Interrogé lors d’un colloque tenu à Riyadh, en janvier 2009, l’ancien premier ministre malaisien, le docteur Mahathir Ibn Mohamed, qui porte le titre honorifique de « Tun », livre les recettes de son succès.
1. Devise : contribuez à la prospérité de vos voisins, ce n’est pas de l’altruisme, mais du bon sens. Quand vos voisins sont stables et prospères, les échanges économiques n’en sont mutuellement que plus bénéfiques. Les échanges économiques entre les pays de l’ASEAN représentent 70% de leurs échanges globaux, là où les échanges interafricains sont en deçà de 10% du volume global.
2. Stratégie : Look East Policy, ni capitalisme ni communisme, mais pragmatisme. Envoi des délégations officielles à l’étranger pour attirer des capitaux, sans implication dans la politique intérieure.
3. Renforcement des capacités locales en management et en marketing.
4. Appropriation locale et investissement local dans de nouveaux secteurs...
5. Crédo : importer des matières premières, ajouter de la valeur et les réexporter.
6. Culture : notre démarche nous a conduit à vérifier que la culture était un levier de développement incontournable. D’où, la décision de s’imprégner du système de valeurs japonais et sud-coréen : ardeur au travail, discipline, sens prononcé de la honte. Nous avons essayé d’instiller ces nouvelles valeurs aux Malais et d’impliquer les femmes, qui représentent la moitié de la population. Nous avons également institué un mode de règlement des conflits équilibré, privilégiant l’arbitrage plutôt que la confrontation. Cela favorise un climat d’investissement apaisé et attractif pour les investisseurs.
7. Investissements colossaux dans les infrastructures : rôle capital des infrastructures dans le développement d’un pays. D’aucuns attendent le développement de la demande avant de se lancer dans les infrastructures. Ma conviction : la disponibilité des infrastructures crée la demande... Effets d’entraînement sur tout le reste de l’économie : création d’emplois, demande de ciment, d’acier, en plus de répondre aux besoins de mobilité des populations rurales...
8. Rôles du gouvernement : quand l’Etat investit, ça lui revient sous forme d’impôts. D’où les avantages dans la construction d’infrastructures, même subventionnées. Car, d’une part, il y a la création de richesses à travers le processus de construction et les facilités rendues aux populations et aux hommes d’affaires. D’autre part, il y a un retour sous forme d’impôts et taxes.
9. Réduction de la corruption : la corruption est le principal obstacle au développement. La corruption zéro est impossible. Mais, quand la corruption est partie prenante de la culture d’un pays, alors on ne peut rien faire pour l’endiguer. Une solution intermédiaire consiste à raccourcir les processus et délais de décision.
Pourtant, l’un de ses opposants les plus farouches loue, avec le recul, son patriotisme et cette interdiction faite à tous les membres de sa famille de faire de la politique ou des affaires. Une ligne de conduite qui ferait difficilement écho en Afrique...
Comment ? par l’introduction systématique de manuels de procédures pour tout type de tâche. Des diagrammes de GANTT pour tout fonctionnaire. Le résultat ne s’est pas fait attendre : investissements en hausse, transformation radicale, construction de nouvelles usines. Cela ne veut pas dire que la corruption a disparu, mais elle n’a pas compromis le développement du pays. Pour réussir à implémenter ces concepts, il est nécessaire de se doter d’une administration compétente, avec des formations pour tous les domaines intéressant les fonctionnaires.
10. Planification : à défaut d’une coordination des activités et d’une cible, tous les efforts seront vains... Adopter une planification sur cinq ans, durant la première étape, comme l’ont fait les pays communistes. Puis, passer à une planification sur une période de 10 à 30 ans. Les plans fixent les responsabilités. L’exécution des tâches et la mesure des résultats sont attendus de chaque département et de chaque fonctionnaire. Des évaluations à mi-parcours permettent de procéder à des réaménagements systématiques.
11. Nécessité d’information dans tous les secteurs économiques. Expérience du war room. Cela permet de mesurer nos forces et nos faiblesses dans un secteur donné, de déterminer, au niveau international, les fonds disponibles à l’investissement dans ce secteur, la disponibilité des infrastructures, de la main d’œuvre.
12. La Malaisie a pu réussir en s’appropriant les méthodes de travail et l’éthique du travail des pays les plus compétitifs. Le succès de la Malaisie c’est le travail !
Mahathir Mohamed, le parfait modèle de l’asiatisme
Que retenir du si autoritaire Premier ministre malaisien, qui reste, sept ans après son retrait de la vie politique, admiré par les Malaisiens de tous bords ? Les quelque 300 000 entreprises étrangères recensées aujourd’hui dans le pays ne seraient pas là, si une loi de 1986 n’avait pas fait voler en éclats les restrictions sur le contrôle des entreprises par des étrangers. Du pur pragmatisme de la part de ce grand nationaliste, qui a réussi à faire construire une voiture 100% intégrée dans un pays dont les imams hésitaient encore, il y a quelques années, à utiliser l’électricité dans les mosquées à cause de son origine non musulmane. Très attaché aux spécificités culturelles, Mahathir déclinera les recettes du FMI, y compris, en 1997, lors de la crise asiatique, quand l’économie malaisienne s’effondra lourdement. Le docteur sacrifiera son ministre des Finances, plus libéral, mettant le cap sur le « capitalisme asiatique », où l’Etat ne se cantonne pas seulement au rôle de gendarme, mais planifie, investit et contrôle l’industrie. L’Etat malaisien est, aujourd’hui encore, actionnaire dans les grands pôles industriels et immobiliers du pays.
Porte-drapeau de l’asiatisme, cette pensée non conceptualisée qui veut que l’Asiatique préfère l’ordre avant la liberté, l’ancien Premier ministre n’a jamais été un parangon de la démocratie. Pourtant, l’un de ses opposants les plus farouches loue, avec le recul, son patriotisme et cette interdiction faite à tous les membres de sa famille de faire de la politique ou des affaires. Une ligne de conduite qui ferait difficilement écho en Afrique...
Interrogé lors d’un colloque tenu à Riyadh, en janvier 2009, l’ancien premier ministre malaisien, le docteur Mahathir Ibn Mohamed, qui porte le titre honorifique de « Tun », livre les recettes de son succès.
1. Devise : contribuez à la prospérité de vos voisins, ce n’est pas de l’altruisme, mais du bon sens. Quand vos voisins sont stables et prospères, les échanges économiques n’en sont mutuellement que plus bénéfiques. Les échanges économiques entre les pays de l’ASEAN représentent 70% de leurs échanges globaux, là où les échanges interafricains sont en deçà de 10% du volume global.
2. Stratégie : Look East Policy, ni capitalisme ni communisme, mais pragmatisme. Envoi des délégations officielles à l’étranger pour attirer des capitaux, sans implication dans la politique intérieure.
3. Renforcement des capacités locales en management et en marketing.
4. Appropriation locale et investissement local dans de nouveaux secteurs...
5. Crédo : importer des matières premières, ajouter de la valeur et les réexporter.
6. Culture : notre démarche nous a conduit à vérifier que la culture était un levier de développement incontournable. D’où, la décision de s’imprégner du système de valeurs japonais et sud-coréen : ardeur au travail, discipline, sens prononcé de la honte. Nous avons essayé d’instiller ces nouvelles valeurs aux Malais et d’impliquer les femmes, qui représentent la moitié de la population. Nous avons également institué un mode de règlement des conflits équilibré, privilégiant l’arbitrage plutôt que la confrontation. Cela favorise un climat d’investissement apaisé et attractif pour les investisseurs.
7. Investissements colossaux dans les infrastructures : rôle capital des infrastructures dans le développement d’un pays. D’aucuns attendent le développement de la demande avant de se lancer dans les infrastructures. Ma conviction : la disponibilité des infrastructures crée la demande... Effets d’entraînement sur tout le reste de l’économie : création d’emplois, demande de ciment, d’acier, en plus de répondre aux besoins de mobilité des populations rurales...
8. Rôles du gouvernement : quand l’Etat investit, ça lui revient sous forme d’impôts. D’où les avantages dans la construction d’infrastructures, même subventionnées. Car, d’une part, il y a la création de richesses à travers le processus de construction et les facilités rendues aux populations et aux hommes d’affaires. D’autre part, il y a un retour sous forme d’impôts et taxes.
9. Réduction de la corruption : la corruption est le principal obstacle au développement. La corruption zéro est impossible. Mais, quand la corruption est partie prenante de la culture d’un pays, alors on ne peut rien faire pour l’endiguer. Une solution intermédiaire consiste à raccourcir les processus et délais de décision.
Pourtant, l’un de ses opposants les plus farouches loue, avec le recul, son patriotisme et cette interdiction faite à tous les membres de sa famille de faire de la politique ou des affaires. Une ligne de conduite qui ferait difficilement écho en Afrique...
Comment ? par l’introduction systématique de manuels de procédures pour tout type de tâche. Des diagrammes de GANTT pour tout fonctionnaire. Le résultat ne s’est pas fait attendre : investissements en hausse, transformation radicale, construction de nouvelles usines. Cela ne veut pas dire que la corruption a disparu, mais elle n’a pas compromis le développement du pays. Pour réussir à implémenter ces concepts, il est nécessaire de se doter d’une administration compétente, avec des formations pour tous les domaines intéressant les fonctionnaires.
10. Planification : à défaut d’une coordination des activités et d’une cible, tous les efforts seront vains... Adopter une planification sur cinq ans, durant la première étape, comme l’ont fait les pays communistes. Puis, passer à une planification sur une période de 10 à 30 ans. Les plans fixent les responsabilités. L’exécution des tâches et la mesure des résultats sont attendus de chaque département et de chaque fonctionnaire. Des évaluations à mi-parcours permettent de procéder à des réaménagements systématiques.
11. Nécessité d’information dans tous les secteurs économiques. Expérience du war room. Cela permet de mesurer nos forces et nos faiblesses dans un secteur donné, de déterminer, au niveau international, les fonds disponibles à l’investissement dans ce secteur, la disponibilité des infrastructures, de la main d’œuvre.
12. La Malaisie a pu réussir en s’appropriant les méthodes de travail et l’éthique du travail des pays les plus compétitifs. Le succès de la Malaisie c’est le travail !
Mahathir Mohamed, le parfait modèle de l’asiatisme
Que retenir du si autoritaire Premier ministre malaisien, qui reste, sept ans après son retrait de la vie politique, admiré par les Malaisiens de tous bords ? Les quelque 300 000 entreprises étrangères recensées aujourd’hui dans le pays ne seraient pas là, si une loi de 1986 n’avait pas fait voler en éclats les restrictions sur le contrôle des entreprises par des étrangers. Du pur pragmatisme de la part de ce grand nationaliste, qui a réussi à faire construire une voiture 100% intégrée dans un pays dont les imams hésitaient encore, il y a quelques années, à utiliser l’électricité dans les mosquées à cause de son origine non musulmane. Très attaché aux spécificités culturelles, Mahathir déclinera les recettes du FMI, y compris, en 1997, lors de la crise asiatique, quand l’économie malaisienne s’effondra lourdement. Le docteur sacrifiera son ministre des Finances, plus libéral, mettant le cap sur le « capitalisme asiatique », où l’Etat ne se cantonne pas seulement au rôle de gendarme, mais planifie, investit et contrôle l’industrie. L’Etat malaisien est, aujourd’hui encore, actionnaire dans les grands pôles industriels et immobiliers du pays.
Porte-drapeau de l’asiatisme, cette pensée non conceptualisée qui veut que l’Asiatique préfère l’ordre avant la liberté, l’ancien Premier ministre n’a jamais été un parangon de la démocratie. Pourtant, l’un de ses opposants les plus farouches loue, avec le recul, son patriotisme et cette interdiction faite à tous les membres de sa famille de faire de la politique ou des affaires. Une ligne de conduite qui ferait difficilement écho en Afrique...
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