"Votre voisin est votre ennemi naturel et le voisin de votre voisin est votre ami", dit le stratège indien Kautilya. Cette maxime semble s'appliquer particulièrement bien aux relations indo-japonaises qui prennent de plus en plus d'ampleur, notamment lorsqu'il s'agit de faire front à "l'ascension pacifique" (selon Pékin) de l'empire du milieu. Témoignent de ce partenariat stratégique, lui aussi ascendant, deux événements récents.
Le 29 janvier, un exercice naval commun mettant en action des vaisseaux et des hélicoptères des garde-côtes de l'Inde et du Japon (JCG, ou Japanese Coast Guard) au large des rives de la baie du Bengale, près de Chennai (ex-Madras), visait à démontrer et entraîner les capacités de lutte combinée de ces deux forces navales, notamment face à la piraterie maritime qui sévit dans l'océan Indien.
Ces manœuvres, dont le principe a été lancé en novembre 2006, et qui se déroulent une année sur deux au large d’un des deux pays, sont représentatives de la relation de coopération de plus en plus étroite entre Tokyo et New Delhi sur les questions stratégiques.
CONVERGENCE DE POINTS DE VUE ET D'INTÉRÊTS STRATÉGIQUES
Un autre événement récent, juste un mois auparavant, corrobore ce constat. Le premier ministre japonais Yoshihiko Noda rencontrait fin décembre son homologue Manmohan Singh dans la capitale indienne. Les deux hommes énonçaient dans une déclaration conjointe les domaines de coopération stratégique devant se développer, s’étendant des questions de sécurité aux relations économiques, financières et commerciales.
De tels liens ne sont pas le fruit du hasard, mais de la nécessité. La menace croissante que fait peser le développement militaire chinois sur l'Inde et le Japon, l’instabilité générée par la piraterie internationale – les deux pays dépendent respectivement à 97 % et à 100 % du commerce maritime –, les menaces nord-coréennes (essais nucléaires, tirs de missiles balistiques, transferts de technologies sensibles au Pakistan, ennemi de l’Inde) ont entraîné une convergence des points de vue et des intérêts stratégiques.
Mais cette relation s'explique aussi par l'histoire. Sans remonter au bouddhisme qui irrigue les deux cultures, les deux pays ont établi peu après la guerre de 1939-1945 des relations diplomatiques – c’était le 28 avril 1952. L'Inde fut un des premiers pays à signer un traité de paix avec le Japon vaincu.
COOPÉRATION SÉCURITAIRE ET RENCONTRES ENTRE MINISTRES
Certes, pendant la guerre froide, l'Inde a privilégié l’allié russe, alors que le Japon s’abritait sous le parapluie nucléaire américain. Cependant, la chute de l’URSS a ouvert une nouvelle ère dans les relations entre les deux géants, devenus les deuxième et troisième économies d'Asie. Après les essais nucléaires indiens de 1998, qui avaient conduit au gel de l’aide japonaise à l’Inde, la relation prend un très grand essor au début des années 2000. La visite du premier ministre japonais Mori, en août 2000, donne l'impulsion décisive pour la renforcer. Elle est axée notamment sur la coopération sécuritaire et est suivie de rencontres annuelles entre premiers ministres des deux Etats. Elles ont conduit à signer en octobre 2008 la Déclaration sur la coopération en matière de sécurité entre Inde et Japon. C'est seulement le troisième pays, après les Etats-Unis et l'Australie, avec lequel Tokyo développe une telle relation. Neuf domaines de coopération sécuritaire sont identifiés, que les deux pays doivent renforcer. Il s'agit notamment d'organiser des rencontres régulières entre ministres de la défense, d'accroître les exercices militaires communs, d'étendre la coopération entre garde-côtes, ou encore de mieux gérer en commun les catastrophes naturelles.
Cette coopération continuait ensuite de se renforcer malgré le changement de majorité à la Diète (parlement japonais) : le Parti démocrate du Japon (PDJ) remportait les législatives en août 2009 face au Parti libéral-démocrate (PLD), qui régnait depuis près de cinquante ans quasiment sans discontinuité sur le parlement nippon. En effet, pendant la visite du premier ministre japonais Hatoyama en Inde, en décembre 2009, les deux Etats publiaient une déclaration commune, "Nouvelle étape du partenariat stratégique et global Inde-Japon", qui donnait de nouveaux "outils" pour accroître ce partenariat, notamment l'accélération de la coopération sur les questions régionales et mondiales, comme le désarmement et la non-prolifération ou le contre-terrorisme.
Le 29 janvier, un exercice naval commun mettant en action des vaisseaux et des hélicoptères des garde-côtes de l'Inde et du Japon (JCG, ou Japanese Coast Guard) au large des rives de la baie du Bengale, près de Chennai (ex-Madras), visait à démontrer et entraîner les capacités de lutte combinée de ces deux forces navales, notamment face à la piraterie maritime qui sévit dans l'océan Indien.
Ces manœuvres, dont le principe a été lancé en novembre 2006, et qui se déroulent une année sur deux au large d’un des deux pays, sont représentatives de la relation de coopération de plus en plus étroite entre Tokyo et New Delhi sur les questions stratégiques.
CONVERGENCE DE POINTS DE VUE ET D'INTÉRÊTS STRATÉGIQUES
Un autre événement récent, juste un mois auparavant, corrobore ce constat. Le premier ministre japonais Yoshihiko Noda rencontrait fin décembre son homologue Manmohan Singh dans la capitale indienne. Les deux hommes énonçaient dans une déclaration conjointe les domaines de coopération stratégique devant se développer, s’étendant des questions de sécurité aux relations économiques, financières et commerciales.
De tels liens ne sont pas le fruit du hasard, mais de la nécessité. La menace croissante que fait peser le développement militaire chinois sur l'Inde et le Japon, l’instabilité générée par la piraterie internationale – les deux pays dépendent respectivement à 97 % et à 100 % du commerce maritime –, les menaces nord-coréennes (essais nucléaires, tirs de missiles balistiques, transferts de technologies sensibles au Pakistan, ennemi de l’Inde) ont entraîné une convergence des points de vue et des intérêts stratégiques.
Mais cette relation s'explique aussi par l'histoire. Sans remonter au bouddhisme qui irrigue les deux cultures, les deux pays ont établi peu après la guerre de 1939-1945 des relations diplomatiques – c’était le 28 avril 1952. L'Inde fut un des premiers pays à signer un traité de paix avec le Japon vaincu.
COOPÉRATION SÉCURITAIRE ET RENCONTRES ENTRE MINISTRES
Certes, pendant la guerre froide, l'Inde a privilégié l’allié russe, alors que le Japon s’abritait sous le parapluie nucléaire américain. Cependant, la chute de l’URSS a ouvert une nouvelle ère dans les relations entre les deux géants, devenus les deuxième et troisième économies d'Asie. Après les essais nucléaires indiens de 1998, qui avaient conduit au gel de l’aide japonaise à l’Inde, la relation prend un très grand essor au début des années 2000. La visite du premier ministre japonais Mori, en août 2000, donne l'impulsion décisive pour la renforcer. Elle est axée notamment sur la coopération sécuritaire et est suivie de rencontres annuelles entre premiers ministres des deux Etats. Elles ont conduit à signer en octobre 2008 la Déclaration sur la coopération en matière de sécurité entre Inde et Japon. C'est seulement le troisième pays, après les Etats-Unis et l'Australie, avec lequel Tokyo développe une telle relation. Neuf domaines de coopération sécuritaire sont identifiés, que les deux pays doivent renforcer. Il s'agit notamment d'organiser des rencontres régulières entre ministres de la défense, d'accroître les exercices militaires communs, d'étendre la coopération entre garde-côtes, ou encore de mieux gérer en commun les catastrophes naturelles.
Cette coopération continuait ensuite de se renforcer malgré le changement de majorité à la Diète (parlement japonais) : le Parti démocrate du Japon (PDJ) remportait les législatives en août 2009 face au Parti libéral-démocrate (PLD), qui régnait depuis près de cinquante ans quasiment sans discontinuité sur le parlement nippon. En effet, pendant la visite du premier ministre japonais Hatoyama en Inde, en décembre 2009, les deux Etats publiaient une déclaration commune, "Nouvelle étape du partenariat stratégique et global Inde-Japon", qui donnait de nouveaux "outils" pour accroître ce partenariat, notamment l'accélération de la coopération sur les questions régionales et mondiales, comme le désarmement et la non-prolifération ou le contre-terrorisme.
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