L'EXPRESS.FR
La révolte arabe et les intellectuels français
Par Catherine Gouëset, publié le 07/02/2011 à 17:10
Faut-il soutenir la soif de liberté et de changement des Tunisiens et des Egyptiens? Finkielkraut, Glucksman, Adler... une partie de l'intelligentsia tricolore ne cache pas sa gêne.
Faut-il soutenir la soif de liberté et de changement de la "rue arabe"? Cette question suscite le malaise d'une partie des intellectuels et chroniqueurs français, les "néoconservateurs à la française", comme les appelle Libération.
En interrogeant, le 3 février, Alain Finkielkraut sur son silence face aux événements en cours, c'est justement Libération qui a lancé le débat. Le quotidien rappelle que ces intellectuels médiatiques avaient refusé de condamner l'intervention américaine en Irak, "au nom de la démocratisation du monde arabe". Ils ont également été prompts à soutenir les manifestations contre les régimes prosoviétiques à l'Est dans les années 1990 ou, plus récemment, contre la réélection contestée, et contestable, de Mahmoud Ahmadinejad en Iran.
Mais pour l'Egypte et la Tunisie, c'est une autre histoire. "Dans les pays de l'Est, il y avait une tradition démocratique dont les intellectuels dissidents, notamment tchécoslovaques ou polonais, étaient les héritiers.
Une telle tradition existe-t-elle en Egypte? Je l'espère, mais je n'en suis pas sûr", assène Alain Finkielkraut.
Il rejette la comparaison, souvent citée, des mouvements islamistes de Tunisie ou d'Egypte avec le parti "islamo-conservateur" AKP en Turquie. "L'AKP doit composer avec les laïcs et ceux-ci ont, en Turquie, une force et une légitimité sans équivalent dans les pays arabes", explique-t-il.
Les risques des révolutions arabes...
André Glucksmann, dans une chronique confiée au même Libération ce lundi 7 février, nuance: "Pas question de déplorer la chute d'un tyran, explique-t-il. Saluons les révolutions arabes (...) mais de grâce ne les flattons pas. Les risques, tous, même les pires périls, sont devant elles" prévient-il.
Alexandre Adler , lui aussi, paraît plus inquiet que réjoui par les événements en cours.
"Vers une dictature intégriste au Caire?" interroge-t-il , dans Le Figaro du 29 janvier. Il exprime son mépris pour Mohamed El-Baradei, l'un des opposants à Moubarak, qu'il qualifie de "pervers polymorphe". Ce dernier a "tout fait à la tête de l'Agence internationale de l'énergie atomique à Vienne pour couvrir ses amis iraniens dans leurs menées prolifératrices" et est maintenant "le cheval de Troie intéressé" des Frères musulmans, peste le chroniqueur.
"Alain Finkielkraut est un culturaliste. Il est semble-t-il des aires culturelles sans tradition de démocratie et donc qui ne peuvent y prétendre", s'emportent Sophie Bessis et Ali Mezghani dans Libération, ce lundi.
"La solidité des traditions démocratiques en Europe de l'est se situe certainement, selon lui, dans l'ADN des peuples", moquent-ils, en rappelant que ces pays ont aussi connu des "absolutismes monarchiques ou religieux" et "des dictatures fascistes et communistes."
La révolte arabe et les intellectuels français
Par Catherine Gouëset, publié le 07/02/2011 à 17:10
Faut-il soutenir la soif de liberté et de changement des Tunisiens et des Egyptiens? Finkielkraut, Glucksman, Adler... une partie de l'intelligentsia tricolore ne cache pas sa gêne.
Faut-il soutenir la soif de liberté et de changement de la "rue arabe"? Cette question suscite le malaise d'une partie des intellectuels et chroniqueurs français, les "néoconservateurs à la française", comme les appelle Libération.
En interrogeant, le 3 février, Alain Finkielkraut sur son silence face aux événements en cours, c'est justement Libération qui a lancé le débat. Le quotidien rappelle que ces intellectuels médiatiques avaient refusé de condamner l'intervention américaine en Irak, "au nom de la démocratisation du monde arabe". Ils ont également été prompts à soutenir les manifestations contre les régimes prosoviétiques à l'Est dans les années 1990 ou, plus récemment, contre la réélection contestée, et contestable, de Mahmoud Ahmadinejad en Iran.
Mais pour l'Egypte et la Tunisie, c'est une autre histoire. "Dans les pays de l'Est, il y avait une tradition démocratique dont les intellectuels dissidents, notamment tchécoslovaques ou polonais, étaient les héritiers.
Une telle tradition existe-t-elle en Egypte? Je l'espère, mais je n'en suis pas sûr", assène Alain Finkielkraut.
Il rejette la comparaison, souvent citée, des mouvements islamistes de Tunisie ou d'Egypte avec le parti "islamo-conservateur" AKP en Turquie. "L'AKP doit composer avec les laïcs et ceux-ci ont, en Turquie, une force et une légitimité sans équivalent dans les pays arabes", explique-t-il.
Les risques des révolutions arabes...
André Glucksmann, dans une chronique confiée au même Libération ce lundi 7 février, nuance: "Pas question de déplorer la chute d'un tyran, explique-t-il. Saluons les révolutions arabes (...) mais de grâce ne les flattons pas. Les risques, tous, même les pires périls, sont devant elles" prévient-il.
Alexandre Adler , lui aussi, paraît plus inquiet que réjoui par les événements en cours.
"Vers une dictature intégriste au Caire?" interroge-t-il , dans Le Figaro du 29 janvier. Il exprime son mépris pour Mohamed El-Baradei, l'un des opposants à Moubarak, qu'il qualifie de "pervers polymorphe". Ce dernier a "tout fait à la tête de l'Agence internationale de l'énergie atomique à Vienne pour couvrir ses amis iraniens dans leurs menées prolifératrices" et est maintenant "le cheval de Troie intéressé" des Frères musulmans, peste le chroniqueur.
"Alain Finkielkraut est un culturaliste. Il est semble-t-il des aires culturelles sans tradition de démocratie et donc qui ne peuvent y prétendre", s'emportent Sophie Bessis et Ali Mezghani dans Libération, ce lundi.
"La solidité des traditions démocratiques en Europe de l'est se situe certainement, selon lui, dans l'ADN des peuples", moquent-ils, en rappelant que ces pays ont aussi connu des "absolutismes monarchiques ou religieux" et "des dictatures fascistes et communistes."
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