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Nvidia se heurte au stress des marchés

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  • Nvidia se heurte au stress des marchés

    Malgré des résultats financiers hors normes, qui ont écrasé les attentes, Nvidia n'a pas réussi à satisfaire Wall Street. Le cours de l'action baissait de plus de 7% dans les échanges électroniques d'après clôture, alors que le chiffre d'affaires de l'entreprise à plus que doublé en un an. Preuve que la santé financière de Nvidia, maillon incontournable de la chaîne de valeur de l'intelligence artificielle, génère désormais plus de stress que d'excitation pour les marchés.

    C'est devenu une rengaine. Depuis près d'un an, Wall Street retient sa respiration avant les résultats financiers trimestriels de Nvidia, hissé au rang de baromètre de l'intelligence artificielle. Le nouvel exercice fiscal, présenté mercredi soir à la fermeture des marchés (après 22 heures en France), n'a pas échappé à la règle : Dan Ives, analyste de Wedbush poussait cette fois l'hyperbole jusqu'à parler du « jour le plus important de la tech depuis des années. » Alors que l'euphorie caractérisait les précédentes échéances, la présentation d'hier s'annonçait plutôt sous le signe de l'inquiétude.

    Pourtant, il était couru d'avance que l'entreprise communiquerait des performances économiques hors du commun. D'ailleurs, elle s'est exécutée, avec un chiffre d'affaires de 30 milliards de dollars pour la période allant de fin avril à fin juillet, largement au-dessus des 28,7 milliards de dollars attendus par les analystes. Ce montant traduit une croissance de 122% par rapport à l'an dernier, accompagnée d'un bénéfice net de 16,6 milliards de dollars, en augmentation de 168%. Mais ce n'était pas suffisant pour satisfaire les investisseurs de Wall Street : le titre perdait jusqu'à 7,42% dans les échanges électroniques postérieurs à la clôture de la Bourse.

    L'exceptionnel ne suffit plus

    Cette réaction des marchés traduit le doute de plus en plus prégnant sur la capacité de Nvidia à poursuivre sa trajectoire exceptionnelle. « Il ne s'agit plus de dépasser les attentes, mais de les exploser » diagnostique Matt Britzman, analyste chez Hargreaves Lansdown, auprès de l'AFP. L'entreprise a plus que doublé son chiffre d'affaires trimestriel par rapport à 2023. Sauf qu'en 2023, elle l'avait triplé par rapport à 2022, ont souligné plusieurs experts. Un constat quelque peu injuste, puisqu'en valeur nominale, la croissance reste évidemment supérieure cette année. Mais aussi un symbole des attentes démesurées pour le vendeur de processeur, dont la croissance devra bien un jour se tasser.

    Depuis le début de l'année, les marchés sont à l'affût du moindre signe de faiblesse de la part de Nvidia, puisqu'il pourrait bousculer tout le marché de l'IA, voire même l'économie entière. À l'horizon, une menace pèse, celle d'un retournement de la bulle de l'IA, même si son existence fait débat chez les analystes. En conséquence, le cours en Bourse de Nvidia devient de plus en plus volatile, avec 300 milliards de dollars, soit 9,8% des actions, qui pourraient être échangés dès l'ouverture de la Bourse ce jeudi selon Reuters.
    « 40% de la croissance du Nasdaq est liée à Nvidia, alors forcément, les investisseurs sont à l'affût pour essayer de détecter quand le momentum va se retourner », évalue auprès de La Tribune Xiadong Bao, co-gérant du fonds Big Data chez Edmond de Rothschild.
    Nvidia en attente du succès de ses clients

    Comparé aux vendeurs de pioches de la ruée vers l'or, Nvidia a profité en premier et dans des proportions inégalées de l'engouement pour l'intelligence artificielle, grâce à ses processeurs incontournables pour la fabrication des modèles.

    Dans cette métaphore, les acheteurs de pioches sont avant tout les géants du cloud (Amazon, Microsoft, Google) et de la tech comme Meta, qui dépensent des dizaines de milliards de dollars en processeurs Nvidia. Problème : ces entreprises tardent à trouver l'or, c'est-à-dire à les cas d'usages révolutionnaires qui vont justifier leurs investissements colossaux. Les analystes s'en inquiètent : sans débouchés significatifs, les big tech continueront-ils à investir dans le développement de la technologie ?

    Pour l'instant, ces derniers se montrent patients. Lors de la dernière vague de résultats trimestriels, ils n'ont donné aucun signe de ralentissement de leurs investissements dans la technologie, bien au contraire.

    Mais les succès tardent à arriver. Microsoft se montre très discret sur les résultats financiers de Copilot, son assistant de nouvelle génération injecté sur toutes ses suites de logiciels. Meta a, de son côté, annoncé que la nouvelle génération d'IA lui a permis d'améliorer les rendements de ses outils publicitaires, sans pour autant chiffrer précisément les gains. Les géants du cloud concèdent quant à eux que l'IA générative ne contribue même pas au-delà de 1% de leur chiffre d'affaires. Bref : la technologie reste un pari.

    Si ne serait-ce qu'une de ces entreprises décidait de réduire significativement le robinet à milliards de dollars, c'est toute la chaîne de valeur de l'IA qui pourrait s'enrayer, jusqu'à Nvidia. Mais il n'y a pas le feu : les clients à l'achat de processeurs sont aussi les entreprises les plus puissantes au monde, dotés de capacités d'investissement hors du commun. Elles pourront continuer sans problème à verser des milliards de dollars pendant plusieurs trimestres. La question porte plutôt sur le niveau d'optimisme qu'elles mettent dans l'intelligence artificielle.

    Toujours plus, jusqu'à quand ?

    Lorsque la valorisation de l'entreprise a atteint le toit de Wall Street, début juin, à 3.335 milliards de dollars, le marché a commencé à se poser des questions. L'action prenait alors plus de 3% par jour, soit plus de 100 milliards de dollars de capitalisation... Pour la première fois, le comportement du titre faisait vraiment écho à celui d'une bulle. Comme l'expliquait alors à La Tribune l'analyste financier Xiadong Bao, Nvidia gagnait quotidiennement en valorisation presque autant que le montant du Capex annuel [les dépenses d'investissement, ndlr] de Microsoft, Apple et Google réunis. « Cette situation est le franchissement d'un nouveau pas dans la démesure », expliquait alors l'analyste.

    Puis les turbulences de l'été, liées à une panique généralisée découlant de l'augmentation du taux directeur de la banque centrale japonaise, ont perturbé son évolution avec une chute de plus de près de 30% du cours, soit l'évaporation de 800 milliards de dollars de valorisation, rattrapée depuis. Aujourd'hui, Nvidia flirte à nouveau avec son pic historique, neuf fois supérieur à sa valorisation fin 2022, avant la vague ChatGPT.

    Il faut dire que l'entreprise va bien, très bien même, comme le démontrent ses derniers résultats financiers. Le groupe réalise toujours près de 80% de marge sur ses processeurs d'IA, vendus plusieurs dizaines de milliers de dollars pièce. Ses concurrents, bien qu'ils se renforcent, restent loin derrière elle et ne sont toujours pas en mesure de défier son monopole sur l'entraînement des modèles d'IA. Une seule menace pourrait véritablement venir perturber la vie de rêve de Nvidia : un retournement brutal de l'engouement pour l'IA, qui serait moins révolutionnaire que prévu. « Le risque de bulle, s'il se concrétise, se trouve plutôt à trois ou quatre ans. Et le marché risque alors plus une déflation qu'une explosion », rassure Xiadong Bao.

    Entre la fin de l'année et le début d'année prochaine, Nvidia va sortir une nouvelle génération de processeurs, Blackwell. Ce nouveau produit pourrait permettre aux développeurs de construire des modèles d'IA encore plus puissants, et d'ainsi donner un nouveau coup d'accélérateur au carnet de commandes de l'entreprise. Mais est-ce que ce sera suffisant pour satisfaire les attentes hors normes de ses investisseurs ?

    François Manens
    وألعن من لم يماشي الزمان ،و يقنع بالعيش عيش الحجر
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