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Comment le Maroc veut s'imposer dans la sous-traitance aéronautique - Usine Nouvelle

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  • Comment le Maroc veut s'imposer dans la sous-traitance aéronautique - Usine Nouvelle

    Comment le Maroc veut s'imposer dans la sous-traitance aéronautique


    En concurrence avec d’autres zones de sous-traitance low cost pour fournir les donneurs d’ordres aéronautiques, le Maroc mise sur la formation de ses techniciens et ingénieurs à Casablanca.

    Usine Nouvelle
    10 Mai 2023 \ 08h00


    Safran s’est installé dès 1999 au Maroc et y emploie 3 400 personnes, dans huit filiales.


    L'usine de l’équipementier belge ­Sabca, à Casablanca, ne chôme pas. Ici des pièces de fuselage pour l’avion d’affaires du suisse Pilatus, là des éléments de fuselage d’un Airbus A 320, dans une autre travée, des sous-ensembles pour les jets Falcon de Dassault Aviation. Les ateliers sont dégagés, les outillages modernes, les consignes de sécurité bien en évidence. Sorti de terre en 2021, le site répond aux derniers critères de modernité de la production des pièces aéronautiques. «À la sortie de l’usine, l’ensemble du fuselage du Pilatus PC-12 réalisé ici sera envoyé en Europe. Ne manqueront que le moteur, le train d’atterrissage et l’avionique pour en faire un avion complet», explique Raphaël Samson, le directeur général.

    La nouvelle usine de 16 000 mètres carrés a succédé à une première de 7 500 mètres carrés et l’effectif est passé de 150 à 300 personnes. Une dynamique révélatrice de la montée en puissance de l’industrie aéronautique marocaine. Depuis la reprise post-Covid, la zone aéronautique de Casablanca vit au rythme des créations et extensions d’usines et des embauches. «Nous avons retrouvé une croissance de l’ordre de 20 % par an. Entre 2014 et 2022, l’effectif du secteur a doublé, pour atteindre 20 000 salariés», se réjouit Maria El Filali, la directrice générale du Groupement des industries marocaines aéronautiques et spatiales (Gimas).



    Sabca a ouvert une nouvelle usine de 16 000 m2, où il assemble notamment le Pilatus PC-12.


    Le royaume chérifien veut s’imposer comme un acteur de référence de la chaîne d’approvisionnement mondiale. Et n’hésite plus à l’afficher. Pour preuve, l’organisation du premier forum aéronautique africain, le 16 février, dans un hôtel de luxe à Casablanca. Inauguré par le ministre de l’Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour, l’événement a attiré des cadres dirigeants de l’industrie comme des agences de réglementation aérienne africaines et internationales.

    En vingt-cinq ans, ce secteur, qui compte 150 entreprises, a parcouru beaucoup de chemin depuis l’arrivée en 1999 de Safran – qui s’appelait alors Snecma – pour implanter à Casablanca une activité de réparation de moteurs d’A 320. Le français emploie 3 400 personnes à travers ses huit filiales marocaines. Et le Gimas recense dans ses troupes Thales, le spécialiste de la maintenance Aerotechnic Industries, des ETI et des PME (Daher, Figeac Aero, Latécoère, le Piston français…) et aussi des fournisseurs de Boeing et du motoriste Rolls-Royce comme Collins Aerospace, Spirit, Eaton… L’organisation s’enorgueillit de pouvoir proposer toutes les compétences liées à la fabrication des pièces (aérostructure, usinage, tôlerie, traitement de surface, ingénierie…).




    Aerotechnic Industries, spécialiste de la réparation des avions, est une coentreprise de Royal Air Maroc et d’Air France-KLM située dans la zone aéroportuaire de Casablanca.


    Politique industrielle volontariste

    Le Maroc a misé sur une politique industrielle volontariste pour se distinguer des autres zones de sous-traitance aéronautique comme l’Europe de l’Est, le Mexique, l’Inde et le Brésil. L’Agence marocaine de développement des investissements met en avant le service clés en main apporté aux industriels : plus de 200 hectares de foncier dans les environs de l’aéroport Mohammed V de Casablanca, la proximité du port de Tanger Med et des lignes d’assemblage d’Airbus à Toulouse, Hambourg et Séville, accessibles en quelques heures par avion, la mise en place d’un guichet unique pour faciliter les formalités administratives d’installation.

    Mais l’atout principal réside dans une importante main-d’œuvre qualifiée… et très compétitive par rapport à l’Europe. Le salaire minimum s’élève à 3 100 dirhams, soit environ 280 euros ! Quand un technicien avec quelques années d’expérience peut prétendre en France à un salaire de 3 000 euros, son équivalent au Maroc reçoit entre 500 et 600 euros. «Ici, l’industrie a une très bonne image auprès des jeunes. C’est moins le cas dans les pays occidentaux, en particulier en France», estime un industriel local. Un constat un peu douloureux sans doute pour l’aéronautique française, en manque cruel de chaudronniers, de mécaniciens, de soudeurs…

    Se défendant d’être un pays low cost, le Maroc revendique plutôt le statut de «best cost» grâce à son pari sur la formation. Il est capable de «produire» des techniciens et des ingénieurs aéronautiques en grand nombre. À quelques encablures des usines près de l’aéroport, l’Institut des métiers de l’aéronautique (IMA) en est la cheville ouvrière. Dans les ateliers d’apprentissage, vêtus de blouses bleues et équipés de lunettes de protection, les apprentis niveau bac +2 (dont 20 à 30 % de filles) usinent, percent, liment, mesurent… Ils savent déjà quel employeur ils rejoindront en fin de parcours. L’IMA forme en fonction de la demande des industriels, tant sur le nombre de salariés nécessaires que sur les compétences techniques recherchées…

    «Nous leur apprenons leur futur métier dans les conditions où ils l’exerceront chez leur employeur, mais également le savoir-être en entreprise pour qu’ils soient prêts à travailler dès leur sortie», souligne Patrick Ménager, le directeur général de l’IMA. Deux mille jeunes sont passés par l’institut l’an passé, et au total 11 000 depuis son inauguration, en 2011. Cerise sur le gâteau des employeurs : cette formation est totalement prise en charge par l’État marocain.



    L'Institut des métiers de l’aéronautique a formé 2 000 jeunes en 2022.



    Champ d’expertise étendu

    Au-delà des constructeurs étrangers, le pays peut compter aussi sur sa compagnie nationale Royal Air Maroc, qui a créé des coentreprises avec des acteurs de pointe : Safran pour la maintenance des moteurs, Air France-KLM pour la réparation des avions. Et il n’entend pas s’arrêter en si bon chemin. Révolu le temps où les usines étaient assimilées à des ateliers low cost pour leur maison mère en France, avec des opérateurs peu formés cantonnés au rôle de presse-bouton. «Nous commençons à offrir des prestations d’ingénierie et d’industrialisation en dépêchant parfois des ingénieurs et des techniciens en France», indique Badre Jaafar, le directeur général de Sermp, filiale marocaine du groupe Le Piston français, spécialisé dans les pièces mécaniques de précision.

    Le Gimas veut aussi se développer sur d’autres marchés connexes en saisissant des opportunités dans le secteur de la défense et la cybersécurité. Thales a installé à Casablanca son sixième centre d’expertise pour offrir des services de sécurisation à distance des systèmes informatiques 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. « La cybersécurité constitue notre premier axe de développement au Maroc. Notre centre de supervision compte déjà une quarantaine d’experts et nous prévoyons près de 150 embauches d’ici à 2026, essentiellement pour nous renforcer sur ce segment », ambitionne Hicham Alj, le responsable des activités de Thales au Maroc.

    Si le pays bénéficie à plein de la mondialisation de l’aéronautique, il commence également à en pâtir. « Certains industriels, en France ou au Canada, débauchent nos techniciens en leur proposant de salaires plus intéressants, regrette un acteur local. Nous sommes partagés. Nous perdons des ressources formées, mais ces salariés aspirent à une carrière et une vie personnelle meilleures. » Dans l’aéro, la guerre des talents est aussi globalisée.
    Un centre de production aux portes de l’Europe
    • 2 milliards de dollars d’exportations aéronautiques en 2022
    • 150 entreprises installées près de l’aéroport de Casablanca
    • 20 000 emplois qualifiés
    (Source : Gimas)

    « L’aéronautique est une vitrine de nos compétences », selon Ali Seddiki


    Pourquoi le Maroc mise-t-il sur l’aéronautique ?
    Si l’automobile et le textile restent les premiers pourvoyeurs d’emplois industriels, l’aéronautique nous intéresse particulièrement par la qualité d’emploi exigée. C’est un secteur d’assemblage complexe, qui nécessite des ressources humaines très qualifiées. C’est une vitrine des compétences et de la capacité du Maroc à pleinement s’intégrer dans les chaînes de valeur mondiales.

    Quelle est la dynamique actuelle ?
    Plus de 140 entreprises de l’aéro se sont installées au Maroc. Avant la période du Covid, de 2014 à 2019, dix acteurs s’installaient ici par an, en moyenne. Nous avons franchi le seuil de 2 milliards de dollars d’exportations, soit une croissance de l’ordre de 17 % par rapport à 2021.

    Pourquoi l’État marocain finance-t-il les formations dans l’aéronautique ?
    C’est la puissance de notre modèle. Les industriels ont l’assurance d’avoir des profils répondant à leurs besoins et le coût est pris en charge par l’État. Quand un équipementier a envie de s’installer au Maroc, pendant que son usine est en construction, ses futures ressources humaines sont sélectionnées sur concours et formées selon ses standards... Lorsque l’usine ouvre, il récupère des techniciens et des compagnons opérationnels.
    Dernière modification par ayoub7, 10 mai 2023, 14h18.
    "Tout ce qui te dérange chez les autres, c'est seulement une projection de ce que tu n'as pas résolu en toi-même" - Bouddha

  • #2
    Maintenant le Maroc a construit sa base industrielle dans l'aéronautique, il peut capitaliser sur cette infrastructure pour aller de l'avant

    Commentaire


    • #3
      Exact, ça lui permettra aussi de faire une transition interessante vers l’industrie militaire avec tous ces profils qui ont déjà de l’expérience, que ce soit en auto ou en aéronautique.
      "Tout ce qui te dérange chez les autres, c'est seulement une projection de ce que tu n'as pas résolu en toi-même" - Bouddha

      Commentaire

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