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Une banque au bord du gouffre fait trembler le secteur financier américain

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  • Une banque au bord du gouffre fait trembler le secteur financier américain


    Les difficultés de la Silicon Valley Bank, spécialisée dans le financement du capital-risque en Californie ont eu un effet de contagion sur les quatre premières banques américaines, qui ont perdu, jeudi, 52 milliards de dollars de capitalisation.

    Début de panique bancaire aux Etats-Unis : à court de liquidités, l’entreprise spécialisée dans le financement du capital-risque en Californie, la Silicon Valley Bank (SVB), a dû liquider en catastrophe une partie de son portefeuille de bons du Trésor américain et d’obligations pour 21 milliards de dollars (19,8 milliards d’euros), encaisser une perte de 1,8 milliard de dollars et lancer une augmentation de capital pour se renflouer à hauteur de 2,25 milliards de dollars.

    L’annonce en a été faite, mercredi 8 mars dans la soirée, et l’action de la société, qui finance la moitié de la Silicon Valley, s’est effondrée en Bourse le lendemain de 60 %. Elle perdait 20 % supplémentaires dans les échanges informels après la clôture des marchés, jeudi.

    La contagion a gagné les autres banques de Wall Street : jeudi, les quatre premiers établissements américains – J.P. Morgan, Bank of America, Wells Fargo, Citi – ont perdu ensemble 52 milliards de dollars de capitalisation, tandis que l’index des banques KBW a reculé de 7 %, sa plus forte baisse depuis juin 2020, en pleine crise due au Covid-19.

    Les actions des groupes bancaires européens chutaient elles aussi, vendredi matin. Peu avant 10 heures, le titre de la Société générale perdait 5,14 %, BNP Paribas 4,33 % et Crédit agricole 3,35 %. Ailleurs en Europe, la Deutsche Bank perdait 6,95 %, la britannique Barclays 5,04 %, l’italienne Intesa Sanpaolo 3,24 %, et la suisse UBS plus de 4 %. L’affaire a fait chuter Wall Street, le S&P 500 perdant 1,85 %, jeudi. La Bourse de Paris reculait fortement, vendredi matin, de 1,91%.

    Que s’est-il passé ? Tout remonte à l’époque de la crise sanitaire et de la politique de taux zéro de la Réserve fédérale (Fed, banque centrale des Etats-Unis). Les start-up américaines lèvent alors des capitaux en masse, à une période où l’argent coule à flots, et elles les déposent dans leur banque, la Silicon Valley Bank, dont les actifs doublent en 2021. Celle-ci, logiquement, les réinvestit dans des actifs en théorie sans risque – des bons du Trésor des Etats-Unis ou émis par des institutions publiques américaines qui ne rapportent quasiment rien en cette période d’argent gratuit.

    « Il est possible que nous ayons trouvé notre Enron »

    C’est négliger le risque lié aux taux : depuis mars 2022, la Fed a remonté les siens brutalement. Ils sont désormais supérieurs à 4,5 %. Logiquement, la valeur de marché des bons du Trésor détenus par la banque a baissé, car, quand les taux montent, les opérateurs achètent de nouveaux titres plus rémunérateurs et vendent ceux qui ne rapportaient quasiment rien.
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    Ce n’est pas très grave si la banque peut détenir ses bons jusqu’à échéance et se faire rembourser, mais la Silicon Valley Bank n’a pas cette latitude : de nombreuses start-up, incapables de lever des capitaux en période d’argent cher et de disette financière, en sont réduites à brûler le cash qu’elles détiennent à la banque et lui demandent leur argent.

    L’infortunée Silicon Valley Bank, de crainte d’avoir une crise de liquidités, a vendu brutalement son portefeuille de bons du Trésor avec une perte de 8,5 % (1,8 milliard de dollars sur 21 milliards), ce qui est considérable pour des produits de taux. Il lui reste encore un portefeuille d’obligations de 91 milliards de dollars qu’elle a prévu de conserver jusqu’à leur échéance et dont la valeur de marché actuelle n’est que de 76 milliards.

    Goldman Sachs doit aider à placer les actions, tandis que le fonds d’investissement General Atlantic a promis d’apporter 500 millions de dollars. Mais le Founders Fund, un véhicule d’investissement fondé par Peter Thiel, créateur de PayPal et gourou de la Silicon Valley, a conseillé aux entreprises de retirer leurs fonds de la banque.

    Tribe Capital, cité par Bloomberg, invite à retirer au moins une partie des capitaux : « Puisque le risque n’est pas nul et que le coût est faible, autant diversifier votre risque, voire vous retirer complètement. » Face à ce début de panique, le directeur financier de la SVB, Greg Becker, a exhorté ses clients à « rester calmes ». L’inquiétude a toutefois été renforcée par l’annonce qu’une banque spécialisée dans les cryptodevises, Silvergate, allait être mise en liquidation.

    Pour la première fois depuis la crise financière de 2008, la peur dépasse le monde des cryptodevises. « Il est possible que nous ayons trouvé notre Enron », la grande faillite de l’an 2000, a tweeté Michael Burry ; ce financier fut l’un des premiers à spéculer sur l’imminence de la crise des subprimes, ces prêts immobiliers à risque qui allaient provoquer la débâcle financière de 2008.

    « Les banques vont devoir reconnaître d’énormes pertes »

    La crise a été amplifiée par les propos tenus, lundi 6 mars, par Martin Gruenberg. Selon le président de la Federal Deposit Insurance Corporation, l’agence de garantie des dépôts bancaires américains, les pertes latentes des établissements du pays sur les actions et les obligations étaient, fin 2022, de 620 milliards de dollars, une explosion par rapport aux 8 milliards de dollars affichés seulement un an plus tôt. Ce chiffre reste toutefois très inférieur aux capitaux propres des banques (2 200 milliards), mais on y voit les conséquences du resserrement monétaire brutal de la Fed.

    Comme l’explique le Wall Street Journal, les banques se sont retrouvées, pendant la pandémie, forcées de placer l’argent de leurs clients, inondés de liquidités par les programmes d’aide gouvernementaux, et se retrouvent grevées par la hausse des taux.

    Ces pertes resteront latentes si les clients des banques ne sont pas obligés de vendre pour satisfaire leurs propres clients, désireux par exemple de céder leurs actions pour acheter de nouveaux titres obligataires plus rémunérateurs avec la hausse des taux.

    Les grandes banques ont certes des sources de financement beaucoup plus diversifiées que la SVB, qui dépendait à 90 % des dépôts, mais l’inquiétude gagne du terrain. « Les banques avec de grosses lignes de bons du Trésor ont le plus de problèmes. Elles se sont endormies. Personne ne s’attendait à cette inflation continue », a déclaré au Financial Times le financier Christopher Whalen, qui ajoute : « Les banques vont devoir reconnaître d’énormes pertes. Tout le monde regarde ces pertes et les répercute sur le marché. »

    Arnaud Leparmentier(New York, correspondant)
    وألعن من لم يماشي الزمان ،و يقنع بالعيش عيش الحجر
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