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Portrait de Mostafa Terrab, à la tête de l’Office chérifien des phosphates (OCP), le géant marocain des engrais depuis 2006. Une entreprise qui, dans la crise mondiale actuelle des engrais, joue un rôle clé pour l’Afrique notamment.
En octobre, Mostafa Terrab était l’invité d’honneur du président de la Banque mondiale, David Malpass, pour un débat sur la crise mondiale des engrais. Mostafa Terrab vient de promettre de livrer à l’Afrique qui en manque cruellement, quatre millions de tonnes d’engrais phosphatés en 2023. De quoi couvrir 80% de ses besoins, et ce, à des tarifs préférentiels.
Un coup politique et un coup de com’ à la fois, qui ne surprennent pas ceux qui, comme Pascal Airault, connaissent ce patron hors norme, arrivé à la tête de l’Office chérifien des phosphates (OCP), en 2006 : « Mostafa Terrab a un physique impressionnant. Il a un physique de catcheur, une voix grave. Il vient d’une grande famille de Meknès. Son grand-père était Mohamed Belarbi Alaoui, figure de l’Islam moderniste. Et lui incarne le patron moderne. Il se balade avec le Financial Time (grand quotidien économique britannique, NDLR) sous le bras. Il est passé par l’entreprise Bechtel (la première entreprise américaine de travaux publics, NDLR) aux États-Unis. Il a aussi travaillé à la Banque mondiale. »
►À lire aussi : Au Maroc, les producteurs d'engrais africains réfléchissent à l'avenir
Mohamed VI lui confie la mission de redresser un mastodonte mal en point. L’OCP était alors la vache à lait de la monarchie marocaine, une entreprise opaque et vieillissante. Mostafa Terrab, formé en France à l’école nationale des Ponts et Chaussées, et au Massachusetts Institut of Technology (MIT), entreprend une révolution copernicienne. Mounir Halim dirige Afriqom, agence d’information spécialisée sur les engrais. Ce physicien a travaillé trois ans avec Mostafa Terrab : « Il y a un changement de culture, que j’ai vécu à l’époque. Il faut prendre la responsabilité. Il faut donner la décision aux différents niveaux de management. Certainement à l’américaine, mais du bon côté, avec de l’action, avec de la vision et du suivi et certainement de la créativité. »
Outre des campagnes de communication axées sur l’écologie et qui visent aussi à contrebalancer l’image d’une industrie réputée polluante, Mostafa Terrab entreprend surtout de faire de la première entreprise marocaine une machine à profit. Pour cela, l’OCP devient non plus simple fournisseur de phosphates brut, mais aussi d’engrais, quadruplant sa production en treize ans : « Quand on vend un phosphate à cent dollars (la tonne, NDLR) à une usine en Australie qui va le transformer et le vendre à 400 dollars, il y a une marge qui est captée par celui qui transforme le produit, expliqueMounir Halim, ex-directeur des ventes en Europe d’OCP. Mostafa Terrab dit "non ! Pourquoi est-on en train de donner notre matière première ?" Il veut capter la marge, et en plus, il devient l’un des plus grands producteurs et exportateurs du marché. On se retrouve donc en position de leader sur le pricing (la politique de prix, NDLR), sur la stratégie et donc devient influenceur du marché. »
Stratégie gagnante
Transformée en société anonyme, publiant ses résultats, l’OCP séduit. Cette année, son chiffre d’affaires devrait dépasser les onze milliards d’euros. Le groupe s’est aussi lancé à la conquête de l’Afrique. Suivant la ligne politique fixée par le palais, Mostafa Terrab multiplie les investissements au sud : usines en Éthiopie, au Nigéria, partenariats au Sénégal et dans une douzaine d’autres pays.
L’OCP de Mostafa Terrab est aussi un instrument diplomatique pour le Maroc dans sa politique envers le Sahara occidental. Pascal Airault ajoute : « On pense qu’en établissant des liens commerciaux, des liens économiques très étroits avec un certain nombre de pays du continent qui étaient enclins à conserver leur soutien politique à la république arabe sahraoui démocratique, on peut espérer au bout d’un certain temps obtenir un changement d’attitude. »
L’OCP est un bras économique marocain sous influence. Rabat a ainsi rappelé une cargaison de 50 000 tonnes d’engrais destinés au Pérou après que Lima a rétabli ses relations avec les indépendantistes sahraouis.
RFI
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Portrait de Mostafa Terrab, à la tête de l’Office chérifien des phosphates (OCP), le géant marocain des engrais depuis 2006. Une entreprise qui, dans la crise mondiale actuelle des engrais, joue un rôle clé pour l’Afrique notamment.
En octobre, Mostafa Terrab était l’invité d’honneur du président de la Banque mondiale, David Malpass, pour un débat sur la crise mondiale des engrais. Mostafa Terrab vient de promettre de livrer à l’Afrique qui en manque cruellement, quatre millions de tonnes d’engrais phosphatés en 2023. De quoi couvrir 80% de ses besoins, et ce, à des tarifs préférentiels.
Un coup politique et un coup de com’ à la fois, qui ne surprennent pas ceux qui, comme Pascal Airault, connaissent ce patron hors norme, arrivé à la tête de l’Office chérifien des phosphates (OCP), en 2006 : « Mostafa Terrab a un physique impressionnant. Il a un physique de catcheur, une voix grave. Il vient d’une grande famille de Meknès. Son grand-père était Mohamed Belarbi Alaoui, figure de l’Islam moderniste. Et lui incarne le patron moderne. Il se balade avec le Financial Time (grand quotidien économique britannique, NDLR) sous le bras. Il est passé par l’entreprise Bechtel (la première entreprise américaine de travaux publics, NDLR) aux États-Unis. Il a aussi travaillé à la Banque mondiale. »
►À lire aussi : Au Maroc, les producteurs d'engrais africains réfléchissent à l'avenir
Mohamed VI lui confie la mission de redresser un mastodonte mal en point. L’OCP était alors la vache à lait de la monarchie marocaine, une entreprise opaque et vieillissante. Mostafa Terrab, formé en France à l’école nationale des Ponts et Chaussées, et au Massachusetts Institut of Technology (MIT), entreprend une révolution copernicienne. Mounir Halim dirige Afriqom, agence d’information spécialisée sur les engrais. Ce physicien a travaillé trois ans avec Mostafa Terrab : « Il y a un changement de culture, que j’ai vécu à l’époque. Il faut prendre la responsabilité. Il faut donner la décision aux différents niveaux de management. Certainement à l’américaine, mais du bon côté, avec de l’action, avec de la vision et du suivi et certainement de la créativité. »
Outre des campagnes de communication axées sur l’écologie et qui visent aussi à contrebalancer l’image d’une industrie réputée polluante, Mostafa Terrab entreprend surtout de faire de la première entreprise marocaine une machine à profit. Pour cela, l’OCP devient non plus simple fournisseur de phosphates brut, mais aussi d’engrais, quadruplant sa production en treize ans : « Quand on vend un phosphate à cent dollars (la tonne, NDLR) à une usine en Australie qui va le transformer et le vendre à 400 dollars, il y a une marge qui est captée par celui qui transforme le produit, expliqueMounir Halim, ex-directeur des ventes en Europe d’OCP. Mostafa Terrab dit "non ! Pourquoi est-on en train de donner notre matière première ?" Il veut capter la marge, et en plus, il devient l’un des plus grands producteurs et exportateurs du marché. On se retrouve donc en position de leader sur le pricing (la politique de prix, NDLR), sur la stratégie et donc devient influenceur du marché. »
Stratégie gagnante
Transformée en société anonyme, publiant ses résultats, l’OCP séduit. Cette année, son chiffre d’affaires devrait dépasser les onze milliards d’euros. Le groupe s’est aussi lancé à la conquête de l’Afrique. Suivant la ligne politique fixée par le palais, Mostafa Terrab multiplie les investissements au sud : usines en Éthiopie, au Nigéria, partenariats au Sénégal et dans une douzaine d’autres pays.
L’OCP de Mostafa Terrab est aussi un instrument diplomatique pour le Maroc dans sa politique envers le Sahara occidental. Pascal Airault ajoute : « On pense qu’en établissant des liens commerciaux, des liens économiques très étroits avec un certain nombre de pays du continent qui étaient enclins à conserver leur soutien politique à la république arabe sahraoui démocratique, on peut espérer au bout d’un certain temps obtenir un changement d’attitude. »
L’OCP est un bras économique marocain sous influence. Rabat a ainsi rappelé une cargaison de 50 000 tonnes d’engrais destinés au Pérou après que Lima a rétabli ses relations avec les indépendantistes sahraouis.
RFI
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