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«Le pétrole sera régi désormais par les fondamentaux économiques»

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  • «Le pétrole sera régi désormais par les fondamentaux économiques»

    Entretien avec Ali Kefeifi. Expert en énergie


    La directrice générale du FMI, Christine Lagarde, a déclaré, récemment, que les cours du pétrole devraient rester durablement bas et elle n’envisage aucun redressement avant 2019, alors que d’autres experts s’attendent à un rebond des prix fin 2016-début 2017. Quel est votre point de vue sur ces deux hypothèses ?

    La directrice générale du Fonds monétaire international, Mme Lagarde, n’envisage aucun redressement avant 2019 car elle traduit le modèle offre-demande sans traduire le modèle circonférentiel à effet secondaire (marché financier dont les «hedge funds» à moyen terme et, structurellement, les pays de l’Ocde).

    Le modèle d’évolution des prix du pétrole obéit au modèle décrit par les économistes occidentaux Cournot puis Stackelberg, et s’inscrit dans deux sous-modèles : le modèle économique des échanges de matières premières non renouvelables, dont la production est régie par le modèle de Hotelling (rythme de production en fonction des profits nets actuels de production et des taux d’intérêt futur). Les deux hypothèses s’appuient sur les deux parties du modèle explicatif de l’évolution des prix du pétrole.

    La directrice générale du FMI raisonne sur la base de ce modèle central, à savoir le sous modèle offre-demande marqué ces dernières années par l’importance des stocks de pétrole dans les pays de l’OCDE, dont le pétrole brut + les produits raffinés (devant couvrir ensemble 60 jours de consommation) et, en plus, les stocks stratégiques (SPR) de sécurité, données sensibles non réellement publiques mais couvrant une période de l’ordre de 30 jours de consommation aux Etats-Unis, soit 90 jours au total (90 fois 20 millions barils en stock aux Etats-Unis !).

    Le sous-modèle «tradero-financier volatil», bâti autour du modèle macroéconomique offre-demande, qui exprime un sous-modèle complémentaire, traduit les effets de la finance internationale, des traders ou acheteurs vendeurs quotidiens, etc. Depuis juin 2014, il est sans effet par rapport au modèle principal offre-demande. Et ce sera la fin de beaucoup de modèles entre 2015 et 2030 : fin des Etats rentiers avant 2017 (Angola, Algérie, etc..) comme le Bahreïn en 1990 ou l’Arabie Saoudite en 2029, etc.

    - Habituellement très sensibles aux tensions géostratégiques, les cours du pétrole ont poursuivi leur dégringolade malgré le conflit politique entre l’Iran et l’Arabie Saoudite. Comment interprétez-vous cette situation ?

    Dans les pays de l’OCDE, le stock global, devant faire face aux préoccupations géostratégiques, couvre environ 90 jours, ce qui permet de faire face aux aléas des sous pays de la région du Moyen-Orient et en particulier les 2 ou 3 entités citées, Etats rentiers absolus ou pays limitrophes du détroit d’Ormuz. En fait, durant ces derniers mois, le modèle d’évolution des prix est déterminé par le sous modèle de base mentionné ci-dessous. Et ce sera le cas pendant les deux ou trois prochaines années, durant lesquelles l’offre de production dépassera la demande. Après 2017 et jusqu’à 2020, le modèle probable sera celui d’un pétrole oscillant entre ƒ60 et 80 dollars le baril en dollars constants.

    Les spécialistes et autres traders diront adieu au Moyen-Orient et aux Etats rentiers, puis affirmeront que la loi du pétrole sera régie par les fondamentaux économiques : le début de la fin du monopole du pétrole, puis l’avènement de la théorie économique classique d’un coût calqué sur celui du Moyen-Orient (20 dollars par baril), à savoir un pétrole qui retrouvera l’économie classique, avec des coûts marginaux compris entre 20 dollars par baril (prix du pétrole produit à récupération primaire et secondaire), 30 à 80 dollars/baril de pétrole de schiste et autres pétroles non conventionnels, ou 50 à 80 dollars par baril pour les pétroles à récupération tertiaire (par voie thermique, chimique ou autre). Les pays de l’OPEP essaieront de résister au marché pétrolier international, mais sans succès et ce sera la fin du GCC en 2025-2030 et des structures wahhabites en 2020.

    - La Banque d’Algérie, dans sa dernière note de conjoncture, a fait état d’une baisse de près de 3% de la production d’hydrocarbures en 2015. Selon vous, ce recul est-il dû à la situation de désinvestissement ?

    La Banque d’Algérie, tout comme le FMI, a-t-elle, sur la base des hypothèses du ministère de l’Energie algérien, fait des simulations erronées ? Pour ce faire, il suffit de reprendre des simulations de l’article 4 du FMI des années 2010 à 2014. Ces données et leurs prévisions étaient totalement erronées, ainsi que chaque citoyen ou étudiant peut le vérifier sur internet, ce qui n’honore pas l’extrême compétence des économistes du FMI. Cependant, le Fonds a fait des simulations erronées car il se fondait sur les hypothèses du ministère de l’Energie, tout au moins des ministres de l’Energie des années 2000-2014.

    Néanmoins, la Banque d’Algérie, qui connaît bien la fiabilité des hypothèses du ministère de l’Energie, tombe sous un autre biais statistique, différent du FMI, qui s’appelle la langue de bois. Au lieu de donner ce qu’elle ne semble pas connaître, le taux de déplétion des gisements d’hydrocarbures liquides, la Banque d’Algérie donne le taux de déclin des hydrocarbures liquides et gazeux, ignorant que les taux de déplétion des hydrocarbures liquides, soit moins de 7%, sont négativement nettement plus élevés que les taux de déplétion des hydrocarbures gazeux.

    Durant les années 1950, les écoliers algériens apprenaient qu’on ne mélange pas les torchons et les serviettes. Du moins on ne mélange pas le pétrole à 50 dollars/b et le gaz naturel à 10 dollars/b (ou 2 dollars par million BTU). Sauf à prendre les Algériens pour des illettrés, y compris ceux du gouvernement issus de l’ENA, on n’a pas le droit de confondre un pétrole qui ne sera plus là en 2026 et un gaz naturel séculairement éternel.

    Pour conclure, le pétrole n’a jamais été le problème : 30, 50, 70, 90, 100, 110, 120 ou 150 dollars/baril, peu importe, les conséquences sont les mêmes pour nos frères et sœurs du Sud ou du Nord, de l’Est ou de l’Ouest. Le grave legs mutatis mutandis est que le prix d’équilibre budgétaire de l’Etat rentier algérien en 2016 est de... 96 dollars/b. Nous sommes perdus comme l’Angola (90 dollars/b), l’Iran (87 dollars/b), l’Irak (81 dollars/b, mais mieux que l’Equateur (120 dollars/b), Nigeria (120 dollars/b) et… la Libye «daéchisée» ( 269 dollars/b) !

    El watan
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