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Un été économique meurtrier (3/4). Les pays émergents pris au piège de la dette

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  • Un été économique meurtrier (3/4). Les pays émergents pris au piège de la dette

    Un été économique meurtrier : Les pays émergents pris au piège de la dette

    20 septembre 2015 | Par martine orange
    Mediapart

    Le miracle des pays émergents est terminé. Pris dans le ralentissement économique mondial, la chute du pétrole et des matières premières, les émergents découvrent le revers de leur croissance passée : une montagne de dettes, essentiellement privées. Ils se retrouvent à la merci de l’évolution du dollar et des déplacements massifs de capitaux.

    L’euphorie n’a duré que quelques heures. Jeudi 17 septembre, les milieux financiers se félicitaient de la décision de la Réserve fédérale. La Banque centrale américaine les avait entendus : elle avait choisi de ne pas augmenter ses taux. L’argent facile allait continuer de couler à flots. Mais l’inquiétude a vite pris le pas sur le soulagement. Vendredi, les mêmes financiers ont commencé à prêter attention aux explications de Janet Yellen, la présidente de la Fed, pour justifier le statu quo. « Plus les investisseurs ruminent la communication de la Fed de jeudi, plus ils semblent le prendre mal », notait un analyste de SpreadEx cité par le Guardian, en commentant la chute de toutes les places boursières. Elles ont toutes perdu entre 1,5 % et 3 % dans la journée.

    Car loin de lever les incertitudes, la Fed les a plutôt alimentées. Tout au long de sa conférence, la présidente de la Réserve fédérale semblait plus être la présidente de la banque centrale mondiale que celle des États-Unis. Elle n’a cessé de parler de la fragilité d’un système mondial désormais totalement interconnecté, du ralentissement de la Chine, des problèmes des pays émergents, plombés par la chute du pétrole et des matières premières. Le tableau dressé était sombre, bien éloigné de celui fait avant l’été. Comme Mario Draghi, le président de la BCE, l’avait fait deux semaines plus tôt, elle confirmait que quelque chose s’était cassé cet été.

    S’il fallait marquer le moment précis de cette cassure, ce serait sans doute le 11 août, même si l’événement est plus une manifestation des dérèglements du système que sa cause. Ce jour-là, la banque centrale de Chine a pris tout le monde par surprise. Elle annonçait qu’elle abandonnait séance tenante la parité fixe du yuan par rapport au dollar, en vigueur depuis 2005, pour laisser flotter sa monnaie. En quelques heures, la monnaie chinoise perdit 4,6 %. La planète monétaire était sur les dents. La Chine serait-elle à son tour en train de mener une dévaluation monétaire pour soutenir ses exportations qui s’effondrent ?

    Depuis le début de la crise, les dirigeants occidentaux ne cessent de mener des dévaluations compétitives dans l’espoir d’aider leur économie. Les politiques non conventionnelles menées par les banques centrales ont eu pour effet mécanique de faire baisser leur devise par rapport aux autres. Entre 2009 et 2013, le dollar a ainsi perdu plus de 20 % de sa valeur par rapport à l’euro, avant de repartir à la hausse, la livre sterling près de 30 % par rapport à l’euro. Le yen, lui, a chuté de plus de 45 % depuis 2013 par rapport au dollar. La banque centrale européenne s’est lancée dans cette voie à son tour : l’euro a dévalué de 15 % en un an par rapport au dollar, de près de 30 % par rapport à son plus haut de 2008

    Mais voir la Chine se lancer à son tour dans cette guerre larvée des monnaies est autre chose, expliquent les dirigeants occidentaux. Tous redoutent de voir une vague de produits chinois, à des prix défiant toute concurrence, envahir un peu plus leurs marchés, cassant le reste des industries locales, alimentant la spirale déflationniste de chute des prix et des salaires, qui mine l’économie mondiale.

    « Nous n’avons aucune intention de dévaluer »
    , ont répété à plusieurs reprises les autorités chinoises, cherchant à rassurer les Occidentaux. Le mouvement du 11 août, expliquent-elles, est purement technique. Il a pour objectif de normaliser la politique monétaire chinoise, afin de libéraliser le yuan et lui permettre d’entrer dans les monnaies de réserve qui composent les droits de tirage spéciaux du FMI.

    Depuis, les observateurs, même les mieux aguerris, se perdent en conjectures pour comprendre les intentions chinoises. Après avoir annoncé leur volonté de laisser flotter leur monnaie, elles ne cessent d’intervenir pour maintenir une parité quasi fixe par rapport au dollar, de 2 % inférieure par rapport à la précédente. Ce qui rend la manœuvre encore plus incompréhensible. La banque centrale chinoise a brûlé quelque 100 milliards de dollars de réserves en un mois pour soutenir sa monnaie, dans l’espoir sans doute d’endiguer la fuite massive des capitaux. Ces derniers jours, un strict contrôle des capitaux a été rétabli. Mais des analystes prédisent que cela risque de ne pas être suffisant, qu’un jour ou l’autre la Chine laissera aussi filer le yuan.

    « La dévaluation chinoise est un cas d’école sur la manière dont il ne faut pas conduire une politique monétaire »
    , écrit Barry Eichengreen, professeur d’économie à Berkeley. Quelle qu’ait été leur motivation – dévaluer ou libéraliser –, la façon dont les autorités chinoises ont mené l’opération a été catastrophique, selon lui. « Elles ont miné la confiance qu’elles savent ce qu’elles font. En ajustant leur taux de change sans en expliquer les motifs, elles ont simplement nourri le soupçon que les performances économiques de la Chine sont sans doute pires que les chiffres officiels le suggèrent », explique-t-il. Ce jour-là, en tout cas, le monde a pris conscience que quelque chose craquait en Chine et dans l'économie mondiale.

    Tempête monétaire


    Dix-sept devises prises dans la tourmente après la dévaluation du yuan © Reuters

    Le mouvement chinois a déclenché une tempête monétaire dans les pays émergents, déjà malmenés depuis plus d’un an. Sans attendre, les pays voisins comme le Viêtnam, la Malaisie, l'Indonésie, étroitement liés à l’économie chinoise, ont dévalué leur monnaie pour s’aligner sur les nouveaux cours du yuan. Mais d’autres se sont simplement retrouvés pris dans une bourrasque monétaire, faisant face à des fuites massives de capitaux. En quelques jours, des milliards de dollars ont quitté les pays émergents pour se réfugier dans des lieux jugés plus sûrs, comme les États-Unis et l’Europe.

    Face à cette hémorragie, les banques centrales des pays n’ont eu d’autres choix que dévaluer leur monnaie et d’augmenter leur taux. Le Kazakhstan, mis à mal depuis un an par la chute du pétrole et des matières premières, ses seules richesses économiques, et miné par la corruption, a dû dévaluer sa monnaie de 26 % d’un coup. Même si cela n’a pas pris les mêmes proportions, c’est aussi le cas de l’Afrique du Sud, de l’Algérie, de la Russie, du Ghana, de la Turquie, de la Guinée. « Au total, 17 pays ont vu leur monnaie de se déprécier d’au moins 3 % [après la dévaluation chinoise, ndlr]. Sans surprise, ce sont tous des pays émergents », constate un analyste de la Deutsche Bank.

    Le miracle des pays émergents est bien terminé. Depuis 2008, les financiers et les économistes occidentaux ne juraient pourtant que par eux. Là était l’espoir, la source de la nouvelle croissance face à des économies en récession. Profitant des centaines de milliards de dollars, distribués quasi gratuitement par la Réserve fédérale, les financiers se sont précipités vers les pays émergents, semblant offrir des perspectives de croissance et surtout de gains bien plus intéressants : les taux d’intérêt qui y étaient pratiqués étaient bien plus élevés que les taux zéro occidentaux. « La politique monétaire extraordinaire menée par les banques centrale a eu pour effet secondaire de provoquer un afflux considérable de capitaux à la recherche de meilleurs rendements en direction des pays de la périphérie », explique Cédric Durand, professeur d’économie à l’université Paris 13.

    Flux de capitaux étrangers dans les pays émergents


    .../...
    Dernière modification par jawzia, 20 septembre 2015, 16h39.

  • #2
    suite et fin

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    Des centaines de milliards de dollars se sont déversés dans ces pays ces dernières années. Face à cette manne providentielle et qui semblait être accordée sans conditions, qui aurait résisté ? Depuis 2008, la dette extérieure des pays émergents est passée de 2 800 à 7 500 milliards de dollars. L’endettement a fait un bond de plus de 50 points pour atteindre 167 % du PIB, selon la Banque des règlements extérieurs. Dans les pays d’Amérique du Sud, la hausse de l’endettement a dépassé les 113 %. « Les pays émergents ont mis en œuvre les solutions occidentales, ce qui a maintenu pendant un temps la croissance mondiale. Aujourd’hui, ils se retrouvent pris dans le même piège de la dette », constate l’économiste Thomas Coutrot.

    Mais à cela s’ajoute une autre fragilité : cet afflux de capitaux étrangers les rend extrêmement dépendants de politiques monétaires décidées ailleurs. Tout changement de ligne de la FED a des répercussions immédiates chez eux. La moindre hausse des taux se traduit par un renchérissement du service de la dette. « Une des dimensions du retournement actuel est lié au resserrement de la politique monétaire aux États-Unis avec l’arrêt l’an dernier du QE et avec en perspective une hausse des taux d’intérêts par la FED dans les prochains mois. Dans ce nouveau contexte, les capitaux ont commencé à refluer vers les États-Unis, déstabilisant les pays émergents », explique Cédric Durand.

    Car c’est une des caractéristiques du capitalisme de ces dernières années. Les capitaux qui ont afflué dans les pays émergents ne l’ont pas été plus sous la forme d’investissements directs réalisés par des entreprises pour construire une usine de voitures ou une centrale électrique – des actifs tangibles qui ne bougent pas, quoi qu’il arrive – mais sous la forme de flux financiers opportunistes. Comme une nuée de sauterelles, ils partent aussi vite qu’ils arrivent, à la vitesse de la nanoseconde, sans se préoccuper des risques de déstabilisation et de dévastation qu’ils peuvent laisser derrière eux.

    Les gouvernements des pays émergents, disent certains économistes, sont moins exposés qu’auparavant. Ils ont tiré, selon eux, les leçons de la crise du Sud-Est asiatique de 1997. D’abord, ils ont en règle générale gardé leurs finances publiques sous contrôle. Ensuite, ils s’endettent le moins en dollar ou en monnaie étrangère, afin de ne pas se retrouver soudainement étranglés par des changements monétaires qui leur échappent. Selon l’agence Fitch, l’endettement supplémentaire des gouvernements ne correspond qu’à un quart environ (1 000 milliards de dollars) des dettes contractées par les pays émergents depuis 2008. La moitié, dit l’agence, l’aurait été en devises étrangères.

    Les dangers de la dette privée

    Cela suffit-il à assurer une relative immunité ? La banque des règlements internationaux ne le croit pas. Même si les gouvernements ont des finances saines, des réserves de change assurées, ils se trouvent vite pris en étau d’un resserrement de crédit et d’une hausse du dollar, sans parler des fameux credit default swaps. Prenant acte du ralentissement de leur économie, de la baisse des recettes liées au pétrole et aux matières premières, les investisseurs ont tous augmenté la prime de risque sur les pays émergents.

    Les pays désignés comme les plus fragiles, soit pour des raisons économiques, soit pour des raisons politiques, voire les deux, sont les plus touchés. Au Brésil, les taux sur les émissions obligataires à cinq ans sont passés de 6,5 % à 15 %. L’Afrique du Sud a vu les siens portés à 8 %. Ces derniers jours, la banque centrale de Turquie a été obligée de consentir des taux de 11,33 % – ils étaient à 6,5 % en 2013 – pour lever l’équivalent de 450 millions de dollars sur les marchés. Ces taux prohibitifs, imposés à des économies en ralentissement, faisant face à des fuites massives de capitaux, ne peuvent qu’alimenter la crise et la récession.

    Evolution de la dette du secteur non financier © BIS

    Mais un autre danger, mal mesuré jusqu’à présent, guette les pays émergents : l’explosion de la dette privée. Car les grands emprunteurs de ces dernières années ont été d’abord les entreprises privées. Attirées par des conditions financières sans précédent, elles ont levé des capitaux sur tous les marchés étrangers pour financer des projets plus ou moins rentables. Elles doivent désormais payer des prêts, renouveler des lignes de crédit dans des conditions de plus en plus onéreuses, alors que leur activité ralentit.

    Selon un phénomène de transmission bien connu, les mauvaises créances commencent à s’accumuler dans le système bancaire, fragilisé à son tour. Le Wall Street Journal rapporte que la banque américaine Standard Chatered, très présente dans les pays émergents, a vu ses crédits non performants augmenter de 1,25 milliard de dollars au cours des six derniers mois.

    Les risques que peut représenter cet endettement privé pour un État ne sont pas que théoriques, comme l’a illustré la crise du rouble en décembre 2014. Alors que le pays était déjà ébranlé par la chute pétrolière, la guerre en Ukraine, les sanctions occidentales, et son isolement international, l’étincelle est partie du géant pétrolier Rosneft, très lié au Kremlin. Le groupe, très endetté en dollars, devait alors rembourser en cette fin d’année 7 milliards de dollars, et semblait dans l’incapacité de le faire. Dans la panique, une émission géante de 625 milliards de roubles (environ de 11 milliards de dollars), garantie par l’État, a été lancée.

    Mais la fragilité de Rosneft a dévoilé celle de tous les autres. Si les finances publiques avaient été redressées, les entreprises russes, elles, s’étaient endettées à hauteur de plus de 500 milliards de dollars sur les marchés étrangers. Dans le mois qui suivait, les banques et les groupes russes devaient rembourser quelque 30 milliards de dollars de crédits étrangers. Tout le système financier s’est retrouvé sous tension et le rouble, déjà très fragile, a dégringolé de 40 % en une semaine. Pour arrêter la chute, la banque centrale de Russe a dû apporter en garantie aux banques les milliards du fonds souverain, augmenter ses taux jusqu’à 17 %, et dépenser quelque 15 milliards de réserve en une semaine. Le rouble est toujours au plus bas, et l’économie est en récession.

    Même si le cas russe porte une dimension politique, de semblables exemples ne sont pas à exclure dans les périodes à venir. En attendant, les créanciers internationaux commencent à demander des gages à tous les gouvernements des pays émergents, selon des règles bien connues en Europe. Le Mexique s’est engagé à diminuer de 221 milliards de pesos (13 milliards de dollars) ses dépenses budgétaires, après les avoir réduites de 124 milliards de pesos cette année, afin de regagner la confiance des investisseurs. Le Brésil, qui a été classé en junk bond par Standard & Poor’s, a promis de dégager un excédent budgétaire l’an prochain. Les nouvelles mesures d’austérité devraient représenter 17 milliards de dollars, afin d’atteindre l’objectif fixé.

    On ne change pas des mesures qui perdent...

    Mediapart
    Dernière modification par jawzia, 20 septembre 2015, 16h39.

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    • #3
      C'est quand déjà 2029 ........ histoire se souffler la bougie centenaire et se remémorer le bon vieux temps oeilfermé
      " Je me rend souvent dans les Mosquées, Ou l'ombre est propice au sommeil " O.Khayaâm

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      • #4
        Les pays désignés comme les plus fragiles, soit pour des raisons économiques, soit pour des raisons politiques, voire les deux, sont les plus touchés. Au Brésil, les taux sur les émissions obligataires à cinq ans sont passés de 6,5 % à 15 %. L’Afrique du Sud a vu les siens portés à 8 %. Ces derniers jours, la banque centrale de Turquie a été obligée de consentir des taux de 11,33 % – ils étaient à 6,5 % en 2013 – pour lever l’équivalent de 450 millions de dollars sur les marchés. Ces taux prohibitifs, imposés à des économies en ralentissement, faisant face à des fuites massives de capitaux, ne peuvent qu’alimenter la crise et la récession
        Pour bientôt Cell. Très bientôt !!!!

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        • #5
          Pour bientôt Cell. Très bientôt !!!!
          Ce qu'il y a de bien avec les cataclysme ...... c'est que les microorganisme y survivent généralement .

          Il ny'a qu'à prier pour que nos nano-économies insignifiantes et primitives soient épargnées .
          " Je me rend souvent dans les Mosquées, Ou l'ombre est propice au sommeil " O.Khayaâm

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          • #6
            Les pays désignés comme les plus fragiles, soit pour des raisons économiques, soit pour des raisons politiques, voire les deux, sont les plus touchés. Au Brésil, les taux sur les émissions obligataires à cinq ans sont passés de 6,5 % à 15 %. L’Afrique du Sud a vu les siens portés à 8 %. Ces derniers jours, la banque centrale de Turquie a été obligée de consentir des taux de 11,33 % – ils étaient à 6,5 % en 2013 – pour lever l’équivalent de 450 millions de dollars sur les marchés. Ces taux prohibitifs, imposés à des économies en ralentissement, faisant face à des fuites massives de capitaux, ne peuvent qu’alimenter la crise et la récession
            Ces taux sont très élevés...il y a clairement un manque de confiance des marchés dans les économie de ces pays.

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            • #7
              Si un pays emprunte à 15% comme le Brésil, au bout des 5 ans, il aura à rembourser en tout et pour tout à peu près 2,5 fois la somme qu'on lui a prêté!!!!...c'est de la connerie!!!

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