«Vous savez mieux que moi, quels que soient nos efforts, que l'argent est la clef de tous les grands ressorts, et que ce doux métal qui frappe tant de têtes, en amour comme en guerre, avance les conquêtes.»
La question est posée à tout citoyen algérien et à tout observateur impartial de savoir comment un pays aussi riche que l'Algérie qui possède suffisamment de ressources diverses (naturelles, financières et humaines) n'arrive pas à se développer ni même à amorcer un décollage comme l'attestent la plupart des classements de notre pays au niveau mondial.
Les réponses à cette question sont multiples et mettent en cause régulièrement le mode de gouvernance au niveau politique et économique. L'un des aspects qui a souvent été négligé jusqu'à ces derniers temps est celui de la valeur de la monnaie qui est un indicateur de l'état de l'économie et de la société dans son ensemble. Le dinar ne cesse de se déprécier depuis plusieurs décennies et ce phénomène d'érosion continu du dinar pénalise aussi bien les particuliers salariés et petits commerçants que les entreprises travaillant en Algérie.
Nous nous proposons dans cette contribution de réfléchir sur quelques aspects de la politique monétaire de l'Algérie, ses conséquences et ses causes profondes.
C'est la banque d'Algérie, qui met en œuvre la politique monétaire de l'Etat (pouvoir de création monétaire et fixation du cours légal de la monnaie) ; elle a pour la première fois, rendue publique une note d'information le 7/11/2013, suite à l'annonce d'une nouvelle dépréciation du dinar de 10%, qui nous a laissé dubitatif et perplexe.
Nous reprenons certains passages de cette note publiés par la presse avant de les commenter : «le fort amenuisement du différentiel d'inflation vis-à-vis des principaux partenaires commerciaux de l'Algérie, soit l'amélioration de l'un des fondamentaux du taux de change effectif réel du dinar, se conjugue à la consolidation de la valeur interne de la monnaie nationale.»
La note insiste sur la maîtrise de l'inflation : « La désinflation (baisse du taux d'inflation) entamée au début de l'année 2013 se confirme tendanciellement au 4e trimestre en cours en contexte de baisse sensible des principaux produits alimentaires de base.»
Outre cette maîtrise de l'inflation selon la Banque d'Algérie, la situation macroéconomique de l'Algérie (réserves de changes importantes) contribue à la stabilité du dinar dont l'évolution à la baisse a des incidences sur le pouvoir d'achat du citoyen. “Cette stabilité monétaire et la solidité de la position financière extérieure nette de l'Algérie contribuent à la stabilité de la valeur externe de la monnaie nationale».
Elle ajoute que la flexibilité des cours de change du dinar «est endogène au régime de flottement dirigé adopté depuis la mise en place du marché interbancaire des changes en 1996, en situation de convertibilité du dinar pour les transactions internationales courantes». Que l'ancrage de la flexibilité «s'est davantage développé et consolidé au cours des années 2000, corrélativement à la solidité de la position financière extérieure nette de l'Algérie, la flexibilité émergente comme la règle même de fonctionnement de ce marché»
«Les études effectuées par le FMI et la banque d'Algérie à la suite de l'envolée des prix des produits agricoles de base à la fin des années 2000 ont montré que la transmission à l'inflation en Algérie de l'augmentation des cours mondiaux de ces produits est extrêmement faible comparativement aux autres pays émergents et en développement.»
«Qu»en termes savants ces choses-là sont dites !' Pourrait-on s'exclamer en parodiant une tirade d'une pièce de Molière!
Pour résumer il n'y a pas de dépréciation du dinar, mais au contraire une stabilité de la monnaie nationale et du pouvoir d'achat du citoyen. Il n'y a pas d'inflation et même une désinflation. Ici plus qu'ailleurs le message subliminal adressé au citoyen, véhiculé par une telle analyse est à l'opposé de son caractère public, il tient en une phrase: Circulez y a rien à voir!
Pourtant quelques semaines auparavant la banque d'Algérie annonçait une dépréciation du dinar de l'ordre de 10%. Quant aux prix il n'a pas fallu attendre deux mois pour observer une flambée quasi générale des prix qu'on peut difficilement imputer aux mécanismes traditionnels de l'offre et de la demande.
Ces conséquences réelles sont conformes à ce que la plupart des experts attendent d'une dépréciation :
«Une dépréciation ou une appréciation de la monnaie nationale par rapport à celle des autres pays influe sur le niveau interne des prix, sur l'épargne, sur les importations et les exportations et donc sur l'emploi et doit inévitablement être constatée au bout d'un certain temps par une dévaluation ou une réévaluation officielle avec leurs conséquences politiques et économiques»
L'argumentation de la banque d'Algérie nous rappelle celle du professeur Pangloss-«il est démontré disait-il, que les choses ne peuvent être autrement : car tout étant fait pour une fin, tout est nécessairement pour la meilleure fin. Remarquez bien que les nez ont été faits pour porter des lunettes ; aussi avons-nous des lunettes. Les jambes sont visiblement instituées pour être chaussées, et nous avons des chausses. Les pierres ont été formées pour être taillées et pour en faire des châteaux : aussi monseigneur a un très beau château : le plus grand baron de la province doit être le mieux logé ;(…)Par conséquent ceux qui ont avancé que tout est bien ont dit une sottise : il fallait dire que tout est au mieux.»
Pangloss «prouvait admirablement qu'il n'y a point d'effet sans cause, et que dans ce meilleur des mondes possibles, le château de monseigneur le baron était le plus beau des châteaux et madame la baronne la meilleure des baronnes possibles»(Voltaire, Candide éditions livre de poche p. 47).
Le lecteur aura compris qu'une explication trop technique, comme la langue de bois, constitue parfois un écran de fumée pratique afin de dissimuler la réalité.
Dans cette contribution nous nous attellerons à montrer les conséquences d'une telle faiblesse de la monnaie nationale, d'en rechercher les raisons profondes et d'esquisser quelques pistes pour une solution.
Pour cela nous partirons de la définition même de la monnaie.
Selon une des définitions de la monnaie qui nous est donnée par Wikipédia «Une monnaie se caractérise par la confiance qu'ont ses utilisateurs dans la persistance de sa valeur et de sa capacité à servir de moyen d'échange. Elle a donc des dimensions sociales, politiques, psychologiques, juridiques et économiques.»
La monnaie n'est pas un instrument neutre comme le pensaient les classiques et les néoclassiques mais elle peut être au contraire active, comme l'a démontré Keynes, et utilisée pour améliorer les performances économiques d'un pays. Or ce qui a été fait en ce domaine est loin d'être satisfaisant
Si nous partons de l'adhésion qu'une monnaie est sensée susciter force est de constater que la confiance dans le dinar est fortement ébranlée suite aux différents glissements vers le bas du dinar depuis plusieurs décennies.
Rappelons que le dinar a été créé par la loi 64-111 du 10/04/1964. Le dinar est resté stable de 1970 à 1981 et s'est apprécié jusqu'à 1985. A compter de 1986 il se déprécie rapidement en raison de la chute du prix des hydrocarbures. Cette dépréciation est suivie d'une dévaluation officielle (à deux chiffres par rapport au franc français un franc pour dix dinars). Elle s'accélère jusqu'aux années 2000 pour atteindre un rapport de un à cent par rapport à l'euro. Il atteint aujourd'hui en 2014 un rapport de un euro pour 113 dinars à la banque alors qu'au marché parallèle il s'échange à près de 160 dinars pour un euro. S'il est vrai que dans les années 80, la crise économique et la chute des prix du pétrole étaient des arguments en faveur d'une dévaluation drastique du dinar par rapport aux devises étrangères les mêmes arguments sont inopérants aujourd'hui puisque les prix du pétrole n'ont jamais été aussi élevés et que la crise financière n'a que peu touché l'Algérie.
La question est posée à tout citoyen algérien et à tout observateur impartial de savoir comment un pays aussi riche que l'Algérie qui possède suffisamment de ressources diverses (naturelles, financières et humaines) n'arrive pas à se développer ni même à amorcer un décollage comme l'attestent la plupart des classements de notre pays au niveau mondial.
Les réponses à cette question sont multiples et mettent en cause régulièrement le mode de gouvernance au niveau politique et économique. L'un des aspects qui a souvent été négligé jusqu'à ces derniers temps est celui de la valeur de la monnaie qui est un indicateur de l'état de l'économie et de la société dans son ensemble. Le dinar ne cesse de se déprécier depuis plusieurs décennies et ce phénomène d'érosion continu du dinar pénalise aussi bien les particuliers salariés et petits commerçants que les entreprises travaillant en Algérie.
Nous nous proposons dans cette contribution de réfléchir sur quelques aspects de la politique monétaire de l'Algérie, ses conséquences et ses causes profondes.
C'est la banque d'Algérie, qui met en œuvre la politique monétaire de l'Etat (pouvoir de création monétaire et fixation du cours légal de la monnaie) ; elle a pour la première fois, rendue publique une note d'information le 7/11/2013, suite à l'annonce d'une nouvelle dépréciation du dinar de 10%, qui nous a laissé dubitatif et perplexe.
Nous reprenons certains passages de cette note publiés par la presse avant de les commenter : «le fort amenuisement du différentiel d'inflation vis-à-vis des principaux partenaires commerciaux de l'Algérie, soit l'amélioration de l'un des fondamentaux du taux de change effectif réel du dinar, se conjugue à la consolidation de la valeur interne de la monnaie nationale.»
La note insiste sur la maîtrise de l'inflation : « La désinflation (baisse du taux d'inflation) entamée au début de l'année 2013 se confirme tendanciellement au 4e trimestre en cours en contexte de baisse sensible des principaux produits alimentaires de base.»
Outre cette maîtrise de l'inflation selon la Banque d'Algérie, la situation macroéconomique de l'Algérie (réserves de changes importantes) contribue à la stabilité du dinar dont l'évolution à la baisse a des incidences sur le pouvoir d'achat du citoyen. “Cette stabilité monétaire et la solidité de la position financière extérieure nette de l'Algérie contribuent à la stabilité de la valeur externe de la monnaie nationale».
Elle ajoute que la flexibilité des cours de change du dinar «est endogène au régime de flottement dirigé adopté depuis la mise en place du marché interbancaire des changes en 1996, en situation de convertibilité du dinar pour les transactions internationales courantes». Que l'ancrage de la flexibilité «s'est davantage développé et consolidé au cours des années 2000, corrélativement à la solidité de la position financière extérieure nette de l'Algérie, la flexibilité émergente comme la règle même de fonctionnement de ce marché»
«Les études effectuées par le FMI et la banque d'Algérie à la suite de l'envolée des prix des produits agricoles de base à la fin des années 2000 ont montré que la transmission à l'inflation en Algérie de l'augmentation des cours mondiaux de ces produits est extrêmement faible comparativement aux autres pays émergents et en développement.»
«Qu»en termes savants ces choses-là sont dites !' Pourrait-on s'exclamer en parodiant une tirade d'une pièce de Molière!
Pour résumer il n'y a pas de dépréciation du dinar, mais au contraire une stabilité de la monnaie nationale et du pouvoir d'achat du citoyen. Il n'y a pas d'inflation et même une désinflation. Ici plus qu'ailleurs le message subliminal adressé au citoyen, véhiculé par une telle analyse est à l'opposé de son caractère public, il tient en une phrase: Circulez y a rien à voir!
Pourtant quelques semaines auparavant la banque d'Algérie annonçait une dépréciation du dinar de l'ordre de 10%. Quant aux prix il n'a pas fallu attendre deux mois pour observer une flambée quasi générale des prix qu'on peut difficilement imputer aux mécanismes traditionnels de l'offre et de la demande.
Ces conséquences réelles sont conformes à ce que la plupart des experts attendent d'une dépréciation :
«Une dépréciation ou une appréciation de la monnaie nationale par rapport à celle des autres pays influe sur le niveau interne des prix, sur l'épargne, sur les importations et les exportations et donc sur l'emploi et doit inévitablement être constatée au bout d'un certain temps par une dévaluation ou une réévaluation officielle avec leurs conséquences politiques et économiques»
L'argumentation de la banque d'Algérie nous rappelle celle du professeur Pangloss-«il est démontré disait-il, que les choses ne peuvent être autrement : car tout étant fait pour une fin, tout est nécessairement pour la meilleure fin. Remarquez bien que les nez ont été faits pour porter des lunettes ; aussi avons-nous des lunettes. Les jambes sont visiblement instituées pour être chaussées, et nous avons des chausses. Les pierres ont été formées pour être taillées et pour en faire des châteaux : aussi monseigneur a un très beau château : le plus grand baron de la province doit être le mieux logé ;(…)Par conséquent ceux qui ont avancé que tout est bien ont dit une sottise : il fallait dire que tout est au mieux.»
Pangloss «prouvait admirablement qu'il n'y a point d'effet sans cause, et que dans ce meilleur des mondes possibles, le château de monseigneur le baron était le plus beau des châteaux et madame la baronne la meilleure des baronnes possibles»(Voltaire, Candide éditions livre de poche p. 47).
Le lecteur aura compris qu'une explication trop technique, comme la langue de bois, constitue parfois un écran de fumée pratique afin de dissimuler la réalité.
Dans cette contribution nous nous attellerons à montrer les conséquences d'une telle faiblesse de la monnaie nationale, d'en rechercher les raisons profondes et d'esquisser quelques pistes pour une solution.
Pour cela nous partirons de la définition même de la monnaie.
Selon une des définitions de la monnaie qui nous est donnée par Wikipédia «Une monnaie se caractérise par la confiance qu'ont ses utilisateurs dans la persistance de sa valeur et de sa capacité à servir de moyen d'échange. Elle a donc des dimensions sociales, politiques, psychologiques, juridiques et économiques.»
La monnaie n'est pas un instrument neutre comme le pensaient les classiques et les néoclassiques mais elle peut être au contraire active, comme l'a démontré Keynes, et utilisée pour améliorer les performances économiques d'un pays. Or ce qui a été fait en ce domaine est loin d'être satisfaisant
Si nous partons de l'adhésion qu'une monnaie est sensée susciter force est de constater que la confiance dans le dinar est fortement ébranlée suite aux différents glissements vers le bas du dinar depuis plusieurs décennies.
Rappelons que le dinar a été créé par la loi 64-111 du 10/04/1964. Le dinar est resté stable de 1970 à 1981 et s'est apprécié jusqu'à 1985. A compter de 1986 il se déprécie rapidement en raison de la chute du prix des hydrocarbures. Cette dépréciation est suivie d'une dévaluation officielle (à deux chiffres par rapport au franc français un franc pour dix dinars). Elle s'accélère jusqu'aux années 2000 pour atteindre un rapport de un à cent par rapport à l'euro. Il atteint aujourd'hui en 2014 un rapport de un euro pour 113 dinars à la banque alors qu'au marché parallèle il s'échange à près de 160 dinars pour un euro. S'il est vrai que dans les années 80, la crise économique et la chute des prix du pétrole étaient des arguments en faveur d'une dévaluation drastique du dinar par rapport aux devises étrangères les mêmes arguments sont inopérants aujourd'hui puisque les prix du pétrole n'ont jamais été aussi élevés et que la crise financière n'a que peu touché l'Algérie.
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