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TURQUIE : Un pas positif envers les minorités

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  • TURQUIE : Un pas positif envers les minorités

    Les organisations non musulmanes de Turquie vont enfin retrouver les biens dont elles ont été spoliées en 1936. Grecs, Arméniens et Juifs saluent cette décision, prise le 27 août par le gouvernement d'Ankara.



    Le gouvernement turc, dirigé par l'AKP, a publié, le 27 août, un décret qui va permettre que soient rendus aux minorités non musulmanes de Turquie (Arméniens, Grecs et Juifs) les biens immobiliers que l'Etat turc leur a confisqués en 1936, année où toutes les organisations non musulmanes ont été obligées de présenter les listes de ce qu'elles possédaient. Si ces biens ont été vendus, le gouvernement s'engage à verser une compensation aux intéressés. Cette décision, attendue depuis longtemps, a suscité des réactions très positives dans les communautés concernées ainsi que dans la presse turque.

    Yagmur Atsiz, éditorialiste du quotidien Star, se félicite ainsi de cette décision dans un style très lyrique : "J'applaudis vraiment ce gouvernement, qui a mis fin à une injustice en posant cet acte historique, empêchant désormais l'Etat de spolier nos concitoyens non musulmans. Nous prenons ainsi nos distances vis-à-vis de pratiques cruelles dignes d'un Etat voyou. Je m'en réjouis d'autant plus que ce décret a été promulgué, selon ses concepteurs, non pas par charité mais pour rétablir un droit.

    Cela signifie donc qu'un jour nous pourrons nous promener comme des citoyens normaux d'un pays normal sans avoir honte." Et Yagmur Atsiz d'ironiser sur le fait que cette décision émane d'un parti, l'AKP, accusé selon lui à tort de prôner l'instauration de la charia [droit musulman] : "Ce qui me fait rire, c'est qu'avec cette décision l'AKP applique pour le coup vraiment la charia ! En effet, ce n'est peut-être pas le cas pour l'idéologie kémaliste, mais selon la charia, les droits accordés aux non musulmans sont sacrés !"

    Sami Kohen, dans Milliyet, considère que la décision de restituer les biens immobiliers aux minorités non musulmanes revêt "une valeur symbolique importante traduisant avant tout un changement de mentalité. Elle illustre l'abandon des politiques discriminatoires et tyranniques envers les minorités non musulmanes de Turquie. Il s'agit d'un signe montrant que la tendance à ostraciser les non-musulmans et à les considérer comme des étrangers n'est plus de mise, à tout le moins parmi les cercles dirigeants de ce pays.

    Cette décision, si elle ne concerne qu'un groupe limité [estimé à environ 120 000 personnes], envoie, outre un message à destination de la société turque, un autre message, vers l'extérieur cette fois, traduisant la volonté de la Turquie d'affirmer son attachement aux valeurs démocratiques."

    Si ce décret s'inscrit dans le programme de démocratisation de l'AKP, il est également le fruit de pressions extérieures, estime néanmoins Sami Kohen, qui explique que la Turquie a été condamnée à plusieurs reprises par la Cour européenne des droits de l'homme sur la question de la confiscation des biens immobiliers appartenant aux minorités non musulmanes, "ce qui a fortement mécontenté Ankara". "Ces pratiques ont ainsi été dénoncées par les diverses instances de l'Union européenne, de même que par le Congrès des Etats-Unis". Selon l'analyste de Milliyet, "ce décret devrait donc mettre un terme à ces critiques et à ces pressions".

    En Bulgarie, les journaux ne sont pas en reste, d'abord parce que des représentants de la communauté bulgare en Turquie ont été conviés au dîner de rupture de ramadan donné par le Premier ministre turc Erdogan à l'intention des minorités religieuses du pays. Pour la presse de Sofia, qui consacre de nombreux articles à l'événement, il s'agit d'une "première" dans l'histoire souvent compliquée entre les deux pays. "Parmi les 162 invités du Premeir ministre, on pouvait voir le représentant de la communauté orthodoxe bulgare, Vassil Liazé", relate la correspondante du quotidien à grand tirage Troud dans la mégapole turque.

    Ce dîner a été aussi l'occasion pour les représentants des communautés religieuses minoritaires de remercier Erdogan de la décision du gouvernement de restituer un grand nombre de propriétés leur appartenant, confisquées par décision de la Cour suprême en 1974. "Une erreur historique a ainsi été réparée", a déclaré le patriarche Bartolomée de Constantinople, le primat de l'Eglise orthodoxe d'Istanbul, cité par Troud. Selon la presse bulgare, la Bulgarie pourrait demander la restitution de quelques 45 propriétés, la plupart situées dans la partie européenne de la ville, dont un hôpital et de nombreux édifices historiques à caractère religieux.

    Selon le quotidien Dnevnik, ces restitutions sont également le fruit des nombreuses pressions de l'Union européenne qui a toujours jugé la mainmise turque "illégale". Selon d'autres sources, les autorités d'Ankara auraient demandé en échange à Sofia d'aider les nombreux Turcs d'origine bulgare qui ont fui le pays dans les années 1980 à faire valoir leur droits à la retraite en Bulgarie.

    Pierre Vanrie
    Courrier international
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin
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